Pays Basque : Non à l’interdiction de Batasuna !

Sous prétexte de lutte anti-terroriste, les gouvernements européens ont mis en place des lois sécuritaires, visant ceux qui « veulent détruire les structures politiques ou économiques d’un pays ». En réalité, ils cherchent à criminaliser et à prévenir tout mouvement social de masse contre les désastres économiques du capitalisme.

Article paru dans l’Egalité n°97

Dans ce contexte, alors que l’ETA a renoué avec sa politique d’attentats qui frappent aussi des civils innocents, le premier ministre espagnol Aznar a obtenu du Parlement le vote de « la loi sur les partis politiques ». Tout parti soutenant des terroristes ou leur rendant hommage est visé. Par une écrasante majorité(88%) les députés du Parti populaire d’Aznar et les socialistes du PSOE ont approuvé la loi. Le PNV (parti nationaliste basque) et les députés catalans s’y sont opposés. Et le PCE s’est abstenu. Elle vise avant tout Batasuna, présentée comme la vitrine politique de l’ETA.

Offensive politique contre le pays basque

Le 26 août, le juge Garzon décide, comme la nouvelle loi le lui permet, de suspendre Batasuna immédiatement et pour trois ans. Batasuna a changé de nom juste avant sa suspension : Socialistes Abertzales (« Socialistes patriotes »). Les locaux sont fermés, les manifestations interdites. Il leur est interdit de se reformer sous un autre nom. Garzon veut lancer en même temps des commissions rogatoires contre les locaux de Batasuna en France, à Bruxelles et au Nicaragua. Le gouvernement espagnol espère son interdiction avant Noël.

C’est une attaque sans précédent depuis Franco contre les libertés démocratiques au pays basque. En 1979, il a obtenu un statut d’autonomie. Un Parlement basque siège depuis 1980. Batasuna y a sept députés. Aux élections régionales de mai 2001, Batasuna a obtenu 10% des suffrages. Il dirige 60 mairies à l’image de celle de Mondragon, ville industrielle de 24000 habitants dont il est à la tête depuis 1987.

Le Pays basque a de nombreuses zones portuaires et industrielles et le mouvement ouvrier y est riche d’expériences. A Bruxelles, le LAB (syndicat des travailleurs basques) a ainsi participé aux manifestations contre la mondialisation capitaliste. Il était aux côtés des salariés de LU-Danone, AOM Liberté, Moulinex en juin 2001, à Paris, contre les licenciements.
En mettant en avant le terrorisme d’ETA, en interdisant un parti fortement implanté, le gouvernement Aznar cherche à opposer les basques au reste des travailleurs espagnols. En concentrant toute l’attention sur la lutte contre l’ETA, le gouvernement Aznar espère faire oublier l’opposition à sa politique (Il y a eu une grève générale très suivie et 3 millions de personnes dans les rues en juin !). Il prévient ainsi des luttes unies entre travailleurs basques et travailleurs espagnols.

Dénoncer cette loi, défendre Batasuna, n’est pas soutenir ETA

Batasuna ne condamne pas les attentats d’ETA et c’est une erreur stratégique. ETA a rompu une trêve passée avec les syndicats et les mouvements sociaux. Elle a renoué avec l’activisme militaire individuel. La majorité du peuple basque rejette cette stratégie. Si la fin justifie les moyens et la nôtre est celle de l’émancipation de la classe ouvrière et de tous les opprimés, les buts et les moyens sont indissociables.

Or par essence le terrorisme individuel, la lutte armée, secrète sont anti-démocratiques, divisent les peuples au lieu de les unir contre leurs véritables ennemis : les capitalistes. Mais notre position n’implique pas que les opprimés d’ici ou d’ailleurs n’ont aucun droit à se défendre contre le capitalisme et impérialisme. Nous pensons que cette défense doit toujours se faire par la mobilisation des masses, armées si nécessaire.

Droit à l’autodétermination pour le peuple basque

ETA a choisi le terrorisme pour revendiquer l’indépendance du pays basque. Nous rejetons ce choix. La lutte pour la reconnaissance des droits nationaux, politiques et culturels du peuple basque sont légitimes. Leur droit essentiel est celui à l’autodétermination.
C’est dans une perspective socialiste, que les peuples des régions basque, catalane et castillane retrouveront le chemin de la lutte et d’un avenir commun.

Par Marie-Jo Douet et Sylvain Bled