Victoire du mouvement anti-CPE : Espoir chez les travailleurs et les jeunes, soulagement chez les dirigeants syndicaux

Les dirigeants des principales organisations syndicales se sont publiquement félicités de la victoire contre le CPE, qui serait due selon eux à « l’unité syndicale » durant cette lutte. Pourtant cette victoire est à mettre au compte de la mobilisation radicale de la jeunesse, lycéens et étudiants, qui a pu entraîner une importante partie des travailleurs à faire grève et à manifester à ses côtés.

Article paru dans l’Egalité n°119

C’est même cette radicalisation massive qui a contraint les directions syndicales à la fois à maintenir l’unité (celui qui aurait lâché le mouvement l’aurait payé cher en terme d’image et de syndicalisation) et à appeler à des journées de grève unitaire. Ces appels, en particulier aux journées de grève du 28 mars et du 4 avril, répondaient à une réelle volonté de lutter de beaucoup de travailleurs et les deux manifestations ont atteint des chiffres records, autour des 3 millions à chaque fois. Pourtant les directions syndicales ont, par ces journées, organisé une mobilisation minimale, empêchant à tout prix l’extension et la généralisation de la lutte à tous les secteurs du travail. Elles se sont bien gardé de répondre aux appels de la jeunesse en lutte (en particulier de la coordination étudiante), dès le 7 mars par exemple, où la plupart des organisations syndicales ont refusé de lancer un appel clair à la grève. Elles ont remis ça à plusieurs reprises, laissant les jeunes seuls, notamment, face à la répression policière comme le 23 mars. Pourtant la volonté des travailleurs à entrer en lutte était énorme et dans plusieurs départements, des appels unitaires à une grève générale interprofessionnelle avec la jeunesse ont pu s’organiser, comme dans les Bouches-du-Rhône dès le 8 mars.

Les directions syndicales, avec le gouvernement (tout comme le PS) ont montré une belle unanimité tout au long de ce mouvement anti-CPE pour en souhaiter la fin rapide. Ainsi Julliard, dirigeant de l’UNEF, était en contact permanent avec le cabinet de Villepin, comme avec Sarkozy d’ailleurs. Aussi bien Chérèque que Thibault (ou Emmanuelli), en harmonie avec Parisot, pressaient le gouvernement de retirer le projet sur le CPE, faute de quoi la « paix sociale » risquait d’être menacée et la santé économique du pays fragilisée. Et ils avaient raison, car tout pas supplémentaire vers une extension ou une radicalisation de la lutte posait immanquablement la question de l’alternative politique au système capitaliste. Question que ne veulent surtout pas voir poser les partis de l’ex gauche plurielle et leurs fidèles représentants à la tête des organisations syndicales. Eux veulent avant tout que les travailleurs attendent sagement 2007 et tirer le bénéfice électoral de l’opposition à la politique du gouvernement. Mais sûrement pas remettre en cause un système dont ils sont de constants défenseurs.

Pour des syndicats de combat !

Cette lutte victorieuse contre le CPE comporte plusieurs acquis positifs. D’abord en montrant qu’on peut gagner contre le gouvernement et le patronat, et seulement par une grève commune des travailleurs et des jeunes. Beaucoup en ont pris conscience pendant ce mouvement. Ensuite par la compréhension du rôle des directions syndicales. La plupart des travailleurs n’en sont plus dupes (pas plus d’ailleurs que du PS : un récent sondage montre que pour les 2/3 des personnes interrogées, il ne constitue pas une alternative politique au gouvernement actuel). Un peu partout, des initiatives locales, de syndiqués de base jusqu’à des Unions Départementales, ont commencé à lancer des appels et à s’organiser pour une véritable grève générale. Il faut continuer dans ce sens, en intervenant sur nos lieux de travail, dans nos entreprises, dans nos syndicats. Il faut nous organiser collectivement face à l’inertie des directions syndicales, pour faire que nos syndicats redeviennent des outils de lutte. Dans chaque lutte, nous devons nous organiser dans des comités de mobilisation, des Assemblées Générales de grévistes, incluant les syndicats, qui décident démocratiquement des actions et élisent leurs représentants. Car cette victoire contre le CPE n’est qu’une étape. Les attaques du gouvernement et du patronat continuent, CNE et code du travail, loi « Egalité des chances » et prochaine loi raciste Sarkozy sur l’immigration. Sans compter les privatisations et les licenciements de masse. Il est certain que d’autres luttes vont se déclencher. Il ne tient qu’à nous de les généraliser, c’est ce que les militants de la Gauche Révolutionnaire veulent organiser, partout où ils interviennent.

Par Pascal Grimbert