Au delà de l’aspect humain qui va de soi, la finalité d’une revendication telle que la régularisation de tous les sans-papiers est l’instauration d’une société égalitaire.
Article paru dans l’Egalité n°88
Toute une série de secteurs de l’économie (agriculture, hôtellerie, confection…) reposent sur l’exploitation d’une main d’œuvre clandestine et notamment de dizaines de milliers de Sans Papiers. Pour les patrons, les avantages sont nombreux : salaires faibles, aucune obligation de respecter le droit du travail… C’est un moyen pour le patronat d’exercer une pression directe sur les travailleurs et leurs acquis. Les lois sur l’immigration sont directement responsables de la fabrication de milliers de Sans Papiers qui vivent parfois dans des conditions dramatiques. Par exemple on estime à 30 000 dans la région parisienne. Le nombre de jeunes femmes en situation irrégulière qui font office d’employées de maison pour quelques centaines de francs par mois, quand elles sont payées, et avec souvent 10 à 12 heures de travail par jour, leur passeport étant détenu par leurs employeurs, véritables esclavagistes modernes.
La régularisation des Sans Papiers, l’égalité des droits pour tous les habitants, n’est pas seulement un mot d’ordre moral ou humanitaire, mais bien l’exigence sociale qui combine le refus de l’exploitation et des dispositions juridiques qui lui permettent de s’exercer.
Le fait même de nuancer ce mot d’ordre trahit bien la renonciation à la recherche de cet objectif. Il n’est pas question ici de faire la demande de titre de séjour (voire de l’avoir faite il y a 4 ans !) dont l’obtention dépendrait du degré d’assimilation,… il est question ici de refuser toute forme d’exploitation. Tant qu’une main d’œuvre corvéable à merci existera, les conditions de travail et de vie de l’ensemble du prolétariat seront tirées vers le bas.
Parce que l’intérêt de chacun passe par l’intérêt de tous, aucune expression revendicative ne peut être isolée de la formulation d’un autre choix économique et politique.
A travail égal, salaire égal, régularisation de tous les sans-papiers, liberté de circulation et d’installation, droit de vote et éligibilité des étrangers à toutes les élections, accès à la fonction publique… ces exigences n’ont de cohérence que dans leur interdépendance afin qu’une fois appliquées, les jalons d’une société nouvelle soient posés. Il est vrai que certains partis bourgeois reconnaissent un attrait sympathique à ces revendications, mais ils s’empressent aussitôt de les définir comme utopiques (et de les oublier quand ils sont au pouvoir.).
Les révolutionnaires leur accordent d’autant mieux cet argument qu’en effet, ces mots d’ordre prônant l’égalité des droits resteront une utopie, un idéal inaccessible, tant qu’une société d’exploitation de l’Homme par l’Homme perdurera car les discriminations sont l’un de ses fondements.
Par Florence Degouy