Qui aurait pu croire il y a encore quelques mois qu’un candidat se définissant comme socialiste et prônant une «révolution politique» aux Etats Unis pourrait être le plus sérieux opposant à Hillary Clinton dans les primaires du Pari Démocrate? En remportant une victoire historique dans le New Hampshire (devançant de 22 points Hillary Clinton) Bernie Sanders, sénateur de l’état du Vermont, fait renaître l’espoir dans la jeunesse et la classe ouvrière américaine. Avec son programme pour une couverture médicale pour tous, des universités publiques gratuites, la taxation du «big business » ou encore un salaire minimum de $15 de l’heure, il permet à toute une couche de la population américaine d’exprimer sa révolte contre «la classe des milliardaires».
La campagne des 99%
En cohérence avec ses slogans contre le «big business» et Wall Street, la campagne de Sanders est financée de façon indépendante par des donateurs individuels, il a ainsi reçu $96,311,423 avec une moyenne de $27 par don, bien loin des $194,969,148 officiellement récoltés par l’équipe Clinton avec une moyenne de $144 par don. A cela s’ajoute les centaines de meetings et de marches de soutien partout dans le pays et surtout les soutiens de sections syndicales qui ont rompu avec les directives de leur direction en soutenant officiellement sa candidature. Il met en oeuvre un des slogans des derniers mouvements de protestation comme «Occupy Wall Street» : «nous sommes les 99%».
Des contradictions
Il est indéniable que cette campagne est un réel tremblement de terre politique, cependant elle comporte des contradictions importantes. La principale est de vouloir lutter contre Wall Street tout en voulant se maintenir dans le système dirigé par Wall Street.
Se présenter sous l’étiquette du Parti Démocrate (alors qu’il a toujours été indépendant) l’un des partis du «big business» nous paraît être une erreur, même si cela lui permet probablement d’obtenir plus de visibilité. Au fur et à mesure que sa campagne gagne du soutien toute la machine du Parti Démocrate se ligue contre lui et met à jour cette contradiction. Les militants de Socialist Alternative (organisation sœur de la Gauche révolutionnaire aux USA) participent activement à la campagne depuis ses débuts tout en discutant largement de celles ci avec les militants.
Mais, au delà de Sanders, ce qui est important c’est la radicalisation que sa candidature permet. Elle fait écho à un mouvement de fond, qui s’est manifesté ces dernières années par exemple par la réélection de notre camarade Kshama Sawant au conseil municipal de Seattle, les luttes comme celle des travailleurs des fast foods pour les $15 de l’heure et le droit syndical ou le mouvement de la jeunesse noire «Black lives matter» (la vie des noirs compte).
La fin du bipartisme?
Le Parti Démocrate ne peut pas être l’outil d’un changement de système, ni même de réformes sociales-démocrates. On le voit avec Obama, qui ne se dit pas socialiste loin s’en faut, mais qui n’a pas réussi à imposer même des mesures fondamentales pour les travailleurs comme une sécurité sociale pour tous. On le voit encore avec Hillary Clinton soutenue par les super riches.
Cette campagne démontre déjà à elle seule quel potentiel existe pour organiser les millions de travailleurs contre les 1% de super riches qui dominent la société. En mettant en place une campagne de terrain et de lutte avec la plateforme «Movement 4 Bernie» (Mouvement pour Bernie) nos camarades ont réussi à convaincre des soutiens de Sanders de la nécessité pour les travailleurs et les jeunes de s’organiser de façon indépendante. Pour construire une opposition réelle aux représentants politiques du big business il est nécessaire de construire un mouvement qui s’appuie sur les travailleurs et la jeunesse dans les quartiers, les syndicats, les campus etc. Car cette campagne n’est que le début, et doit être liée à la perspective de construire un nouveau parti pour les 99%.
Par Virginie Prégny