En 1994, des grèves sur les salaires et la victoire des jeunes contre le CIP (le « SMIC jeune ») ouvrent la voie. En octobre 1995, la journée de grève du 10 est un raz de marée. Les étudiants en grève depuis début octobre se joignent aux travailleurs. Mi-novembre Juppé annonce son plan, attaquant la Sécu et les retraites frontalement. La riposte devient commune. Les cheminots entrent en grève reconductible entraînant d’autres secteurs.
L’organisation de la grève
Se mettent en place des assemblées générales, rassemblements de travailleurs pour décider de la manière de lutter ensemble, jeunes, public, privé. Et ce, pendant deux mois de lutte. Les salariés passent dans les entreprises d’à côté pour encourager le débrayage. Des AG s’adressent aux directions des syndicats pour qu’ils organisent une grève générale pour faire tomber le gouvernement. De manière plus ou moins claire, si la Sécurité sociale était au cœur des revendications, c’est tout le capitalisme qui était remis en cause. La lutte, et son fonctionnement collectif, augmente la conscience politique de la classe ouvrière.
Les syndicats, poussés par les syndiqués à la base, concèdent plusieurs journées de grève mais sans jamais appeler à poursuivre le jour suivant, freinant l’extension au privé, centrale pour battre complètement Juppé. Grâce à ce mouvement d’ampleur des ouvriers et de la jeunesse, le plan de Juppé est battu. Les gouvernements suivants ont mis une quinzaine d’années à mettre en place ce plan Juppé.
Une grève politique
Le fond de la grève était politique, la grande majorité voulait chasser Chirac-Juppé mais pas « pour remettre une fausse gauche à la place ». Les militants étaient au premier rang de la construction de la grève mais les organisations politiques (PCF mais pas seulement) étaient frileuses. Il a manqué un véritable parti de lutte des travailleurs et de la jeunesse qui aurait pu permettre de généraliser les formes avancées d’organisation de la lutte, et les mots d’ordre appelant à dégager Chirac-Juppé.
Par Elemiah, article paru dans l’Egalité n°213