Allemagne : Grève déterminée dans la fonction publique

Depuis le 6 février les salariés de la fonction publique sont en grève illimitée contre la prolongation du temps de travail. Avec des dizaines de milliers de grévistes dans 9 des 16 Länder (régions fédérales), il s’agit de la plus grande grève dans la fonction publique depuis 1992.

Article paru dans l’Egalité n°118

Trois conflits différents sont à l’origine de la grève. Premièrement, les employés des communes dans l’Allemagne de l’Ouest s’opposent à une prolongation du temps de travail de 38,5 à 40 heures. Deuxièmement, les employés des Länder se battent contre une prolongation du temps de travail déjà mise en place (42 heures en Bavière). Troisièmement les salariés des hôpitaux publics se battent également pour le maintien des 38,5 heures par semaine. Selon les calculs du syndicat Ver.di (syndicat de la fonction publique) une prolongation du temps de travail hebdomadaire de 1,5 heures signifie une perte de 4% des emplois et menacera 400.000 emplois qui dépendent de la fonction publique.

Une grève solide et déterminée

Malgré la tactique « flexible » du syndicat Ver.di d’appeler seulement quelques secteurs choisis à la grève et une région après l’autre, et non pas l’ensemble des salariés de la fonction publique, la grève est massivement suivie et s’élargit de plus en plus (35.000 grévistes dans la troisième semaine). La combativité s’est vue dans les votes pour la grève avec des résultats autour de 95 %. Après des années d’attaques du gouvernement de « gauche » de Schröder contre les conditions de travail dans la fonction publique et une suppression d’emplois énorme (2,2 millions d’emplois en moins depuis 1995), les travailleurs ne sont pas prêts à lâcher le morceau et à travailler davantage.

Alors que les employeurs publics utilisent des centaines de travailleurs en intérim et des chômeurs en « emploi à 1 Euro » pour briser la grève, alors que la police à Osnarbrück (ville dans le Nord) a violemment fait passer les non-grévistes chez les éboueurs, la grève reste solide. Une grande solidarité existe parmi la population malgré la propagande anti-gréviste des médias (soutien de 60%). La combativité et la détermination des grévistes ont surpris tant les employeurs que les dirigeants du syndicat Ver.di et ils ne se sont pas attendu à ce que les salariés fassent grève contre la prolongation du temps de travail. Malheureusement, l’attitude de la direction de Ver.di empêche d’utiliser pleinement cette combativité exemplaire et d’élargir la grève à toute la fonction publique à l’échelle du pays et de faire le lien avec le privé. Bsirske, secrétaire général du Verdi, a déjà proposé un faux compromis aux employeurs : les jeunes salariés peuvent travailler 39 heures et les plus vieux 38 heures.

La conscience de classe se développe

Une grande colère existe chez les grévistes contre « ceux d’en-haut », contre les attaques contre les conditions de travail et de vie, contre cette politique pour les riches et les patrons. Dans un contexte de licenciements de masse dans le privé (suppression de 20.000 emplois prévue chez Volkswagen, 32.000 chez Telekom,…) les salariés du public font le lien, comprennent qu’ils ont les mêmes problèmes et les mêmes intérêts que les travailleurs du privé. A Nuremberg, 4000 employés des services publics sont partis en manifestation à l’usine de AEG où 1700 travailleurs sont en grève contre la fermeture du site. Vu qu’un conflit s’annonce dans la métallurgie début mars, le potentiel serait là pour unifier les travailleurs du public et du privé. A Brème, le DGB (fédération des syndicats) appelle à une journée de grève de tous les secteurs grâce à la pression de la base. L’élargissement de la grève dans la fonction publique et la construction d’une grève commune privé-public sont nécessaires pour changer le rapport de force en faveur des travailleurs.

Par Olaf van Aken