Turquie : séisme et population laissée à l’abandon

5e2c2a8a34318Le 24 Janvier 2020 vers 19h un puissant séisme de magnitude 6,7 s’est produit à Elazig, dans l’Est de la Turquie. Le séisme a également touché les régions autour comme Mardin, Batman, Şırnak, Bingöl, Dersim, Adıyaman et Malatya. Pour l’instant, le bilan fait état de 39 morts et plus de 1600 blessés.

Des expériences sismiques fréquentes, une irresponsabilité alarmante

La Turquie est située dans une zone sismique très active, et a déjà expérimenté plusieurs fois des cas de séismes tant à l’Est qu’à l’Ouest du pays. En 1999, à Gebze (Nord-Ouest), un puissant séisme de magnitude 7,4 avait fait 17 000 morts. Puis en 2011, c’est la région de Van (Est) qui a été touchée par un séisme de magnitude 7,1 faisant plus de 600 morts.

Après la tragédie du séisme de 1999, l’État avait mis en place un impôt pour constituer un fonds d’urgence pour prévenir les besoins en cas de séisme. En 21 ans, plusieurs milliards de livres turques ont été amassées par cet impôt, mais on ne sait pas où est cet argent. Quant au Croissant-Rouge, plusieurs scandales ont acté de la non-transparence de la gestion des dons perçus, et de l’utilisation des dons pour des intérêts privés (location de villas luxueuses, hausse de salaires très importants des dirigeants, achats de véhicules de luxe, location d’avion…). Malgré tout, le Président du Croissant-Rouge a osé demander des dons par envoi de SMS. Face aux nombreuses critiques qu’il a reçues sur twitter, il a supprimé son tweet.

Le Croissant-Rouge a également demandé des dons de sang pour venir en aide aux blessés. Pourtant, en tant qu’organisme humanitaire, il doit disposer de stocks de sang car il est régulièrement fait appel à l’humanité des gens pour qu’ils donnent leur sang. Or, une politique de profit existe également en ce sens puisque depuis de longues années déjà, les hôpitaux n’ont plus le droit de disposer de stock, seul le Croissant-Rouge est autorisé, et ce dernier vend, oui je dis bien vend, le stock de sang récolté aux hôpitaux. Ce pourquoi en cas de calamité, ils ne disposent plus de rien puisque le don de sang est un réel marché.

Les autorités turques ont fait preuve assez rapidement d’une irresponsabilité complète. En numéro 1, nous avons le ministre de l’Intérieur turc, Süleyman Soylu qui a clairement menacé les personnes qui critiquent les mesures prises par le gouvernement, d’ailleurs une enquête a été ouverte sur les utilisateurs de réseaux sociaux qui auraient publié des critiques.

Deuxièmement nous avons eu le ministre de l’énergie et des ressources naturelles Fatih Dönmez qui a déclaré je cite « il ne serait pas juste de tout attendre de l’État. Nos concitoyens devraient également prendre des mesures de précaution ». Cette phrase représente dans toute sa splendeur l’irresponsabilité et l’incapacité du gouvernement à agir… Une politique écœurante digne d’un État capitaliste.

Le rapport entre le séisme et la lutte de classe

Le séisme est un phénomène naturel en soi, mais la connaissance de ce phénomène depuis la nuit des temps démontre que les conséquences catastrophiques du séisme sont du fait de l’urbanisation biaisée et non planifiée, l’état pitoyable des infrastructures, qui transforment les événements naturels en catastrophe ou en destruction. Par ce biais, ceux qui subissent le plus les conséquences catastrophiques du séisme, ce sont les travailleurs, c’est la classe ouvrière. Le séisme comme « calamité naturelle » ne touche pas tout le monde de la même manière. Entre les bourgeois très riches qui habitent dans des logements construits selon les normes antisismiques, et les travailleurs qui habitent dans les quartiers remplis d’immeubles construits de manière anarchique sans aucune précaution, sans contrôle, et avec les matériaux les moins chers, on voit bien que ce n’est pas le séisme qui tue en soit, mais bien le capitalisme.

On le voit à Istanbul, des séismes de faibles magnitude se répètent dans la ville depuis le mois de Septembre, et d’après les experts, un puissant séisme de l’amplitude de celui de Gebze peut à tout moment toucher cette ville de plus de 15 millions d’habitants. Malgré ces expériences, et malgré la connaissance de la menace qui pèse sur Istanbul, l’habitat ne correspond que très rarement aux normes antisismiques. La vie de millions d’habitants est ainsi clairement menacée. Les précautions prises sont insuffisantes voire inexistantes.

Ce n’est sûrement pas avec un système capitaliste basé sur le profit qu’il est possible de limiter les dégâts en cas de calamité naturelle. Les normes antisismiques ne sont pas respectées parce que ça coûterait plus cher, les zones de rassemblement ne sont pas constituées parce qu’il faut construire plus d’immeubles pour générer plus de profits, les dons perçus/impôts servent à financer des intérêts privés etc… Dans une zone sismique aussi active que la Turquie, la population doit être instruite sur ce qu’est le séisme, comment il se produit, et ce qu’il faut faire en cas de séisme. Les habitats doivent être construits selon les normes antisismiques, des zones de rassemblements de la population doivent être prévues.

Ce nouveau tremblement de terre vient confirmer que le peuple n’a rien à attendre d’Erdogan et de ses alliés qui ne font que s’enrichir et aider les capitalistes à s’enrichir sur le dos des travailleurs et de la population de toute la Turquie. Tout en organisant la solidarité par les organisations du mouvement ouvrier (syndicats, associations indépendantes), nous devons construire un parti qui s’oppose à la politique d’Erdogan et au capitalisme, et construise la lutte pour en finir avec ce système et ses conséquences meurtrières.

Seule le socialisme permettra de prendre des décisions de manière démocratique et au profit de tous, seul le socialisme permettra réellement d’informer, de prévenir la population des risques et ainsi éviter les dégâts.

Par Nazim