Tribune libre : Trois trotskistes, bonjour les dégâts !

Si les trotskistes ont raté la première élection du Président de la République au suffrage universel en 1965, ils se sont bien rattrapés depuis. Ils ont présenté un (ou une) candidat(e) en 69 (Krivine), en 81 et en 95 (Laguiller); deux en 74 (Arlette et Alain) et en 88 (Laguiller et Boussel- Lambert). On risque d’en avoir trois en 2002.

Article paru dans l’Egalité n°90

Pour son 5ème tour de piste, Arlette a peu de soucis à se faire : tous les maires la connaissent et les militants de Lutte Ouvrière sont rodés. Il n’en est pas de même d’Olivier Besancenot que la LCR a décidé de lancer et encore moins du candidat inconnu que le Parti des Travailleurs choisira éventuellement à son congrès de novembre, si la pêche aux signatures a été bonne.

Les ex-alliés d’extrême-gauche aux européennes de 99 sollicitent les élus en faisant appel à leurs « convictions démocratiques » qui doivent permettre l’existence d’une candidature répondant aux « aspirations d’une fraction non-négligeable de l’opinion publique » même si leurs « propres choix politiques sont très différents »…

Mr ou Mme X

Les « lambertistes » qui d’ailleurs ne se classent nulle part sur l’échiquier, essaient, eux, de persuader les maires des petites communes que le PT est le seul qui les défende face à l’intercommunalité forcée voulue par Pasqua puis par Chevènement et Voynet dans le cadre de l’Europe des régions et de la subsidiarité maastrichienne. Après FO, le PS, l’UNEF, et le Grand Orient de France, le PT tente d’infiltrer l’Association des Maires de France. Mais, malgré cette main tendue aux petits notables, la partie n’est pas gagnée. Les élus divers droite hésitent à soutenir ces ultra-laïcards. Quant aux divers-gauche, le PS a des moyens de pression efficaces pour les dissuader de favoriser un candidat qui ne pratiquera pas le désistement républicain au 2ème tour. De plus, ce ne doit pas être facile de signer un chèque à l’ordre de Mr ou Mme X.

Gênes ou anti-Gênes

Les démarcheurs de la LCR, ne se battent pas pour un fantôme. L’image de marque d’O. Besancenot, c’est la manif : Nice, en décembre dernier, le 9 juin à Paris  » pour l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des profits  » et Gênes, surtout Gênes, où il n’a pas rencontré les dirigeants du PS qui essaient de prendre le train en marche, ni les « pâlichons  » du PCF (cf. le Monde du 4/09). Il n’y pas rencontré non plus son éventuel concurrent lambertiste, ni sa chère camarade Arlette. Elle a boudé, comme le PT, toutes les manifs réformistes initiées  » par les petits-bourgeois d’ATTAC et les ploucs de la Confédération Paysanne « . Nous caricaturons à peine le langage commun du PT, obsédé par Maastricht et de LO qui s’en balance. Les argumentations sont, il est vrai, très divergentes : LO reproche à Bové, Cassen et Aguiton d’être des nationalistes et estime qu’il faut se battre à l’intérieur de nos frontières contre nos propres capitalistes. Le PT, lui, accuse les mêmes d’être des comparses de la mondialisation.

Léon, reviens ! Ils sont devenus fous !

On le voit, les programmes des trois « trotskistes » sont très différents. On serait tenté de dire que cela justifie bien des candidatures distinctes. Il y a aussi un créneau pour celle de Dieudonné, pourquoi pas celle d’Amokrane pour les motivé-es, celle de Bové, celle d’un membre du PCF autre que R.Hue choisi par la base ou présenté en concurrence.

Mais le bon sens voudrait au contraire que, par delà tout ce qui les sépare, tous ceux qui combattent le capitalisme fassent bloc pour présenter une alternative crédible. C’est le sens de notre combat pour un vrai Parti des Travailleurs fédérant toutes les tendances révolutionnaires mais aussi tous ceux qui, dans l’action syndicale ou associative, affrontent le pouvoir économique, politique etc. du capital. Si nous sommes peu nombreux à militer vraiment dans ce sens, nous sommes persuadés de refléter les aspirations de la plupart de ceux qui voteront trotskiste en 2002 et de beaucoup de ceux qui s’abstiendront par refus de trancher entre les « héritiers » de Léon ou, parce que la cacophonie de leurs professions de foi aura rendu le message inaudible et les perspectives bien lointaines.

Par Jacques Capet