Préparer une rentrée contre les licenciements

Le 9 juin dernier nous étions près de 30 000 à manifester contre les licenciements à l’appel de la coordination de la Bourse du Travail de Paris, composée des salariés des entreprises qui licencient, de syndicats, d’associations et d’organisations politiques.

Article paru dans l’Egalité n°88

L’organisation de cette mobilisation par les salariés subissant les licenciements, eux-mêmes, est un fait notable. La présence, en tête de cortège, des salariés d’une trentaine d’entreprises qui licencient, rompant avec les luttes isolées, en est un autre. Mais le fait le plus marquant restera le caractère unitaire – salariés, syndicats, associations, et organisations politiques – gage de ce premier succès qui doit en appeler d’autres.

Cependant l’ampleur de cette manifestation ne fut pas à la hauteur des enjeux. Le refus injustifiable de la direction de la CGT, qui fut la principale absente mais non la seule, d’y participer, préférant sa propre manifestation du 22 mai, en est en partie responsable. Mais qu’on ne s’y trompe pas, il était fort peu probable qu’une seule manifestation, même rassemblant des centaines de milliers de personnes, puisse mettre un coup d’arrêt à cette vague de licenciements, rendue nécessaire aux yeux des patrons – pour le maintien de leurs profits immédiats – par l’approche certaine de la crise économique. Malheureusement la date tardive par rapport à l’annonce des licenciements rendait la perspective d’une manifestation plus ambitieuse difficile à tenir.

Car la vague des licenciements continue et s’accroît, comme récemment chez Philips, Ericsson, Nokia, 3M, Canal Plus, Compagnie Française d’Electrochimie, la Banque de France et avec la restructuration d’Alcatel. Elle ira sans doute en s’amplifiant à mesure que la crise s’approfondira ; il est donc nécessaire dès maintenant de préparer pour la rentrée la mobilisation qui nous a fait défaut – un véritable « tous ensemble » – d’autant que la loi Guigou n’a rien résolu contrairement à ce que veut nous faire croire le gouvernement. Quant à la direction du PCF, il continue de faire le grand écart : dans la rue avec les salariés en lutte, afin de redorer un blason passablement terni par des années de cogestion avec la Gauche plurielle, tout en continuant à voter après les quelques simagrées d’usage des lois en trompe l’œil.

Il ne faut pas que la pression retombe durant les mois d’été. La participation des salariés de Lu Ris-Orangis à la manifestation fin juin des salariés d’AOM est une chose à renouveler chaque fois que c’est possible, comme par exemple la décision de manifester lors du passage du Tour de France. Le réseau qui s’est construit doit continuer de fonctionner et doit s’étendre. Les salariés des entreprises qui viennent d’annoncer leur plan de licenciements doivent y être intégrés. Tout cela afin de pouvoir organiser dès septembre, de manière élargie, une réunion préparatoire à une nouvelle manifestation.

Seul un mouvement d’ensemble des salariés du privé et du secteur public, imposant l’interdiction pure et simple des licenciements et la réquisition sous contrôle des salariés des entreprises qui refusent cette mesure, pourra arrêter ce lynchage social. Comme premier pas vers cette perspective une journée de grève générale autour des revendications communes aux travailleurs du public et du privé (salaires, retraites, emploi) sera nécessaire. Il est de la responsabilité des confédérations syndicales peu actives jusqu’à maintenant, de la préparer et d’y appeler conjointement avec les salariés unis dans la Coordination de la Bourse du Travail de Paris.

Par Yann Venier