Mélenchon aime faire le buzz autour de sa personne. Pour dire qu’il prend du « recul » comme il dit, que la « pression est trop forte », il ne peut s’empêcher de tout ramener à lui, drôle de méthode pour évacuer la pression… « Il faut aussi que le grand arbre n’empêche pas le reste de la forêt de pousser »… rien que ça.
En gros, Mélenchon nous explique qu’il a tout faux depuis 2009 mais que c’est la faute des autres. Il explique à sa manière mais c’est en grande partie vrai, que le caractère « insurrectionnel » de sa candidature en 2012 en explique le succès. Mais il oublie d’expliquer que c’est dans un accord de long terme avec le parti communiste qu’il s’est engagé en fondant le Front de Gauche. Il fait mine de découvrir 5 ans après que ce parti, qu’il connaît depuis les années 70, a sa propre stratégie. Mélenchon se plaint que le PCF a choisi dans de nombreuses villes un accord avec le PS aux municipales mais il ne raconte pas à ses lecteurs que c’est le cas depuis 1977, et que depuis, cet accord a été reconduit bien que le PS soit devenu de plus en plus ouvertement procapitaliste. Pourquoi ? Parce que Mélenchon ne veut pas rompre avec le réformisme, et sa « révolution citoyenne » ou sa « révolution par les urnes ». Il ne veut pas remettre en cause sa propre participation gouvernementale avec Jospin ou son soutien indéfectible à Mitterrand. Il fait semblant de découvrir des désaccords avec le PCF. Pourtant, en février dernier, il vantait la possibilité d’un accord avec Europe Ecologie sur la base d’une liste de circonstance à Grenoble avec un pur produit du « capitalisme vert » l’actuel maire de Grenoble, Eric Piolle. On voit mal la différence de fond avec les élus PCF qui prétendent que le PS a accepté leurs demandes dans les villes où il y a eu accord aux municipales.
Volatilité ?
Mélenchon n’est pas à une contradiction près. En 2012-2013 il dit « qu’ils s’en aillent tous », en 2014 il dit, à propos de la possible élection de Marine Le Pen à la présidentielle de 2017 (c’est quand même loin dans le temps…) « elle y arrivera, (…) parce que la société est en train de se diriger vers le point ‘qu’ils s’en aillent tous’ Et quand le point ‘qu’ils s’en aillent tous’ est atteint, tout saute en même temps ». Où est le problème ? N’est ce pas ce qui s’est passé en 1789, ou lors de La Commune de Paris, ou ce qu’il a manqué en Mai 68, une révolution qui chasse du pouvoir tous les corrompus et les privilégiés. En fait, Mélenchon ne veut pas pousser au bout la logique du « prenez le pouvoir » qui était pourtant un très bon slogan de campagne en 2012. Si le peuple prend le pouvoir, ce n’est pas pour le repartager avec ceux qui l’enfument à longueur de journée, qu’ils soient au PS, à EE-LV ou à l’UMP. Quant à savoir si Le Pen y « arrivera »… ce fatalisme ressemble à la politique de l’autruche alors qu’il faudrait renouveler l’appel à construire un outil politique qui soit l’expression de la révolte qui gronde parmi les travailleurs, les jeunes, les chômeurs…
Le combat continue
Prendre le temps de réfléchir et d’analyser est indispensable pour changer la situation. Que Mélenchon ait besoin de recul, on peut le comprendre, mais il y aurait certainement autre chose à dire dans ce cas, et en tous cas si on veut vraiment prendre du recul, on ne se fend pas d’une interview quasi uniquement centrée sur soi-même. Ça, ça ressemble plus à un moyen d’attirer l’attention et faire parler de soi que de se mettre à l’écart.
Que le FdG soit un échec définitif, on n’en sait rien. Par contre ce qui est sûr, c’est que s’il ne s’oriente pas réellement vers les couches les plus exploitées et les plus opprimées, s’il ne devient pas un porte parole de la lutte contre la politique d’Hollande-Valls-Gattaz, alors le FdG ne sera pas l’instrument qu’utiliseront des millions de travailleurs, de jeunes, de chômeurs, pour organiser leur colère et la transformer en lutte. Et il est clair que ce n’est pas l’orientation que proposent des forces comme le PCf ou autre.
Entre temps, loin des préoccupations de la présidentielle de 2017, il va falloir affronter le plan d’austérité du gouvernement et les nouvelles attaques patronales, et c’est cela qu’il faut préparer.