L’impérialisme américain enlisé en Irak

Ces deux derniers mois, le conflit en Irak a pris des proportions d’insurrection quasi totale du pays, des zones du triangle sunnite (Nord et Ouest de Bagdad) aux nombreuses régions du Sud chiite. Les Etats-Unis ont dû se retirer de nombreuses villes et sortent la grosse artillerie pour rester dans certaines.

Article paru dans l’Egalité n°110

Avec plus de 14 000 Irakiens morts depuis le début de l’invasion US en mars 2003 et des dizaines de milliers de blessés, nul doute que le rejet de l’occupation US et alliés grossit. Les groupes de résistance armée trouvent des volontaires de plus en plus nombreux et malgré les morts, les troupes se reconstituent.

Malgré la stratégie d’Alaoui et de Bush de minimiser numériquement cette résistance, les chiffres sont là, les soldats morts aussi, ainsi que les enlèvements nombreux de ressortissants occidentaux. Les attentats se multiplient à raison de plus de 80 par jour depuis août 2004.

Bush et son administration font miroiter de futures élections « démocratiques ». Cependant, la tenue d’éventuelles élections en janvier est non seulement aléatoire mais sera à coup sûr un facteur aggravant de la situation irakienne. Quelles que soient les élections, partielles probablement, les résultats refléteront le rapport de forces actuel. Le discrédit du gouvernement de marionnettes d’Alaoui est total, le boycott du scrutin de nombreuses ethnies est à prévoir, et par conséquence, l’accroissement de la résistance armée reste la seule réponse pour de plus en plus d’Irakiens.

Plus grave que le Vietnam

La stratégie de l’impérialisme américain aboutit à un échec cuisant. Brique après brique, les arguments pour motiver cette invasion tombent. D’armes de destruction massive, il n’y a aucune trace là-bas. Mais ce n’est pas le plus lourd pour Bush et Blair. Le principal problème est l’absence de stabilité de l’Irak occupé. Ce n’est pas un pays client fiable dans la région. Le poids américain est plus fragile que jamais dans l’ensemble du monde arabo-musulman, face à l’Iran, et avec l’appui de Sharon en Israël. La situation peut être comparée au Vietnam par le soulèvement que produit l’occupation mais la situation mondiale est différente. La région est instable et les rapports de force sont autres depuis la chute des pays staliniens. L’alliance entre impérialistes est aussi très fragile. Autant d’éléments qui divisent les capitalistes. Au sein de l’administration Bush, militaires et ministère de la défense (Rumsfeld et Wolfowitz) ont des relations tendues. Les premiers jugent que la situation est désastreuse.

Retrait immédiat des troupes !

La situation n’est plus tenable. Kerry, Bush, Blair ou Howard seront contraints de retirer leurs troupes. Mais le peuple irakien paie le lourd prix de cette aventure militaire. Le capitalisme laisse un pays où les risques de polarisation ethnique et d’éclatement sont très forts. 50% des Irakiens déclarent qu’ils « ne voteront pas pour quelqu’un hors de leur ethnie ou groupe linguistique. » (Financial Times du 8 octobre 04) Les privilégiés de chaque groupe jouent la carte de la division et l’Islam politique de droite marquant des points renforce ces divisions religieuses et ethniques.

L’unique moyen de s’en sortir c’est une mobilisation indépendante des travailleurs d’Irak. En tant que marxistes et socialistes, nous sommes pour le retrait de toutes les troupes et nous soutenons le droit des irakiens de résister. Mais nous ne soutenons pas inconditionnellement toute résistance. La résistance actuelle défend souvent des intérêts totalement contradictoires à ceux de tous les travailleurs irakiens.

Des milices multi-ethniques armées organisées dans chaque région chiite, sunnite, turkmène et kurde sont la seule réponse pour combattre l’occupation. La construction d’organisations indépendantes des travailleurs dans les usines est une nécessité pour prendre en mains l’économie détruite. Le combat anti-impérialiste sur des bases de classe et la transformation socialiste de la société sont les éléments-clé pour une victoire possible en Irak et pour que les irakiens décident réellement de leur avenir.

Par Leila Messaoudi