L’enfer de la sous-traitance

Quand une grosse boîte ferme ou se restructure, on évoque tant de salariés licenciés et autant dans la sous-traitance.

Article paru dans l’Egalité n°104

Ce qu’il faut savoir, c’est que même quand la grosse boîte ne jette aucun de ses ouvriers ou employés, il lui arrive souvent de virer une partie plus ou moins importante de ses intérimaires, de ne pas renouveler ses C.D.D. et surtout de ne rien donner ou de donner beaucoup moins de travail à certains de ses sous-traitants dont elle peut récupérer la production . Les travailleurs frappés par ces mesures sont généralement dans l’impossibilité de mener une lutte efficace pour résister à la misère et les médias ne parlent pratiquement jamais de cette précarité .

Or celle-ci se développe. L’« externalisation » a renforcé considérablement l’importance de la sous-traitance et, sous prétexte de qualité (zéro défaut), les grandes firmes, notamment dans l’automobile, ont mis en esclavage leurs sous-traitants (du moins les petits, car certains comme Michelin ou, à un degré moindre, Valéo, sont en situation plus forte pour négocier leurs contrats).

A la fin des années 80, Renault et Peugeot-Citroën ont décidé de réduire de moitié le nombre de leurs sous-traitants en payant moins cher leurs prestations et en exigeant une plus grande qualité. Certaines de ces exigences étaient justifiées car les consommateurs ont droit à des produits irréprochables mais d’autres (notamment des tolérances dimensionnelles) étaient seulement nécessaires pour le remplacement des ouvriers par des robots. On n’avait pas les mêmes exigences pour améliorer la sécurité ou le confort des O.S. sur les chaînes…

Comme les patrons de ces P.M.E. veulent garder à tout prix leurs marchés, ils répercutent sur leurs salariés et leurs intérimaires cette pression féroce d’où dégradation des conditions de travail. Quant à la précarité, elle est d’autant plus grande que beaucoup de ces entreprises se sont montées en zone rurale pour utiliser une main d’œuvre à bon marché (Gilbert Declercq, l’ancien leader de la C.F.D.T. des Pays de Loire, parlait dans les années 70 de « régions-pilotes pour usines-pirates »). Quand la boîte ferme ou  » dégraisse « , il n’y a aucune possibilité de retrouver du boulot sur place.

Et grâce à ça,  » nos  » voitures peuvent résister à la concurrence internationale et les profits de Renault et P.S.A. sont florissants…

Par Jacques Capet