Grèce : L’héritage de la capitulation historique de Syriza permet aux conservateurs de confirmer leur victoire électorale

Comme prévu, le second tour des élections législatives grecques a permis au principal parti du capitalisme grec, la Nouvelle Démocratie (ND), de remporter une majorité absolue. À la grande joie des commentateurs capitalistes internationaux, ce résultat confirme que le leader de la ND, Kyriákos Mitsotákis, restera Premier ministre, sans avoir à compter sur les votes d’un quelconque partenaire de coalition.

Article par Martin Powell-Davies paru en anglais sur le site de notre internationale socialistworld.net

Kyriakos Mitsotakis, leader de la Nouvelle Démocratie et premier ministre de la Grèce (Photo : Wikimedia Commons)

Résultats des élections générales grecques de juin 2023 (organisées sous une législation électorale différente de celle de mai 2023) :

Nouvelle Démocratie : 40,56% = 157 députés (mai 2023 : 40,8 % 146 députés).

Syriza (Coalition de la gauche radicale) : 17,83 % = 47 députés (mai 2023 : 20,1 % 71 députés).

Pasok (sociaux-démocrates) : 11,84 % = 33 députés (mai 2023 : 11,5 % 41 députés)

KKE (parti communiste grec) : 7,69 % = 20 députés (mai 2023 : 7,2 % 26 députés)

Spartiates (extrême droite) : 4,63 % = 13 députés (mai 2023 : ne s’est pas présenté)

Solution hellénique (extrême droite) : 4,44 % = 12 députés (mai 2023 : 4,5 % 16 députés)

Niki (extrême droite) : 3,69 % = 10 députés (mai 2023 : 2,9% 0 député)

Cours de la liberté : 3,17 % = 8 députés (mai 2023 : 2,9 % 0 député)

MeRA25 : 2,5 % = 0 député (mai 2023 : 2,6 % 0 député)

Taux de participation : 52,84 % (mai 2023 : 61,1 %)

[Voir les résultats complets des élections ici : https://ekloges.ypes.gr/current/v/home/en/parties/]

Après que la Nouvelle Démocratie a manqué de peu la majorité globale lors du « premier tour » des élections de mai, Mitsotakis a opté pour un nouveau scrutin. Il savait qu’elles se dérouleraient dans le cadre d’une législation électorale différente, qui accordait des sièges supplémentaires au parti vainqueur.

L’issue de ce second tour était déjà largement considérée comme acquise. Les seules questions étaient de savoir de combien la ND augmenterait sa marge de victoire sur l’opposition de Syriza, et lequel des petits partis, de gauche et de droite, dépasserait le seuil des 3 % requis pour faire élire des députés.

Le taux de participation n’a été que d’un peu plus de 50 %, ce qui montre à quel point les électeurs grecs ne croient pas aux promesses des politiciens après de nouvelles semaines d’émissions électorales et de slogans vides de sens. Parmi ceux qui ont voté, il n’y a pas eu de nouveau basculement en faveur de Mitsotákis. Mais l’ancienne gauche Syriza, qui a trahi tant d’espoirs des travailleurs en capitulant devant l’Union Européenne et les marchés des patrons et en introduisant de nouvelles coupes [budgétaires] brutales, s’en est sortie encore plus mal qu’avant. Le Pasok, autrefois puissant, n’a pas réussi à obtenir beaucoup plus de voix aux dépens de Syriza, obtenant à nouveau un score d’environ 12 %.

Cependant, après avoir été déçus par des partis qui se disaient « socialistes », il n’est pas surprenant que certains Grecs désenchantés aient voté pour l’extrême droite. Le parti nationaliste « Solution hellénique » a de nouveau obtenu suffisamment de voix pour se voir attribuer des députés au Parlement. Ils seront rejoints par le nationaliste religieux « Niki » et par les « Spartiates », un groupe d’extrême droite jusqu’alors largement inconnu. Les Spartiates ont été soutenus depuis une cellule de prison par Ilías Kassidiáris, ancien dirigeant du parti néofasciste « Aube dorée », après que son propre parti a été exclu des élections. Le succès des Spartiates montre comment une telle interdiction, proposée par la Nouvelle Démocratie et soutenue par les députés du Pasok lors de la précédente législature, a fini par aider l’extrême droite, en renforçant ses prétendues références « anti-establishment ».

À gauche, « MeRA25 », le parti dirigé par l’ancien ministre des finances de Syriza, Varoufákis, n’a pas réussi à dépasser le seuil des 3 %. Cependant, une autre scission de Syriza, le « Cours de la liberté », dirigé par Zoé Konstantopoúlou, ancienne présidente du Parlement grec sous le gouvernement Syriza, y est parvenu de justesse.

Le KKE (le parti communiste grec), avec seulement 20 députés, sera la principale voix de gauche au parlement. Le chef du KKE, Dimitris Koutsoumpas, est même arrivé en deuxième position derrière Mitsotákis lors d’un sondage d’opinion réalisé en juin 2023 sur la position personnelle des chefs de parti. Contrairement à Tsípras, leader de Syriza, qui est désormais perçu par de nombreux travailleurs comme un politicien de plus qui a abandonné ses principes, Koutsoumpas apparaît comme une voix authentique qui s’oppose à tous les partis du capitalisme. Mais le KKE n’a pas été en mesure d’attirer un soutien massif de la part de la classe ouvrière grecque afin de combler le vide laissé par les trahisons des deux anciens partis de gauche, le Pasok et Syriza.

Comme c’est le cas au niveau international, les travailleurs grecs devront surmonter les échecs et les trahisons des anciens partis de gauche pour construire un nouveau parti ouvrier de masse. Si la classe ouvrière grecque peut se doter d’une direction à la hauteur de ses traditions de lutte, alors que l’économie mondiale se dirige vers une crise, l’autosatisfaction de la classe capitaliste grecque face à la réélection de son représentant politique, Mitsotákis, pourrait être de courte durée.