Économie mondiale : le chaos

La crise économique déclenchée par la Covid a plongé le monde dans un chaos gigantesque. La politique des gouvernements pro-capitalistes à travers le monde n’a rien résolu. L’économie n’est pas revenue à son niveau pré-pandémie. En fait, les capitalistes n’ont pas de solution !

Les prévisions de croissance pour 2021 ont été revues à la baisse par le FMI en octobre, à +5,9 % (-3,9 % en 2020). Il était logique que le redémarrage de l’activité post-confinements entraîne cette croissance. Mais cela ne veut pas dire qu’elle est solide. Au contraire, pendant les périodes de crise, comme le soulignait Trotsky dans les années 1930, toute reprise est plus superficielle, et plus courte.

Un rebond alimenté par la spéculation

La politique des gouvernements et des banques centrales a été d’inonder les entreprises et les institutions d’argent, soit avec des crédits très peu chers, soit par de l’agent donné directement (chômage partiel, plans de « relance »…). En a résulté non seulement une spéculation effrénée, mais aussi une explosion des niveaux de dette – y compris pour plein d’entreprises qui ne pourront pas les rembourser. Le nombre de faillites va exploser en 2022. La dette mondiale atteint désormais près de 100 % du PIB et dépassera les 300 000 milliards de dollars fin 2021 !

De nombreux pays, comme par exemple l’Argentine, font face à un risque de défaut de paiement, c’est-à-dire que les États ne sont pas en capacité de rembourser les dettes qu’ils ont contractées auprès des banques.

Même les États-Unis ont dû relever en urgence le plafond de la dette, ce qui permet de payer les dépenses courantes de l’État. Mais du coup, il n’y a pas d’argent pour financer les promesses de relance de Biden. Les problèmes de l’économie US sont loin d’être finis. La situation de la majorité des travailleurs est très précaire. La reprise a ramené des emplois, mais ils sont mal payés et les conditions de travail exécrables. Les travailleurs ne toléreront pas cette situation indéfiniment.

La Chine aussi est dans la tourmente. La faillite probable du géant Evergrande est révélatrice du niveau de spéculation. Ce groupe immobilier, le deuxième plus grand du pays, qui représente 3 millions d’emplois directs ou indirects, dans des domaines économiques variés (médias, véhicules électriques…), a carrément construit des villes entières où personne ne réside, juste à des fins spéculatives. Tout ça financé par une dette tellement énorme (260 milliards $) qu’elle ne peut plus être remboursée. Cela a failli déclencher une crise boursière. C’est peut-être le début d’une nouvelle crise pour la Chine, dont les capacités de production continuent d’être perturbées, notamment à cause du variant Delta de la Covid.

L’éclatement de bulles spéculatives, des crises boursières plus ou moins importantes à travers le monde sont largement probables.

Instabilité

Mais la crise ce n’est pas que sur les places boursières. À force de fonctionner à flux tendus, qui est devenu la norme sous l’économie capitaliste, les circuits de production et d’approvisionnement sont incapables de résister aux perturbations. Tout a été chamboulé. Le redémarrage de l’activité a créé une forte demande et des pénuries de biens qui perturbent l’économie mondiale.

Les nombreuses pénuries, par exemple celle des puces électroniques ou matériaux semi-conducteurs sont en train de mettre des milliers de travailleurs en chômage technique (voir l’article sur Renault page 5). Ces pénuries vont encore durer plusieurs mois voire trimestres et leur impact sera colossal, « pire que le confinement », selon des syndicats métallos.

Les chaînes d’approvisionnement, elles aussi sont dans le chaos, incapables de gérer la trop forte circulation de marchandises. Dans la baie du port de Los Angeles, en octobre, des centaines de porte-conteneurs stagnaient là, ne pouvant pas décharger leur marchandises faute de dockers et d’infrastructures, créant ainsi des pénuries de PQ ou même de baskets aux US. On a des situations similaires dans de nombreux pays.

La forte demande a, elle aussi, créé de la spéculation et de l’inflation. Il y a une forte augmentation des prix des matières premières (carton : +18 % en un an, plastique : +21 %, aluminium : +24  %, produits pétroliers : +17 %, etc.), des prix alimentaires (sucre : +14 %, volaille : +23 %, maïs +28 %, fruits : 34 %), prix de l’énergie (gaz : +30 %; électricité en gros : +50 %) et tout cela a un impact pas seulement dans nos portefeuilles mais aussi sur la production et donc nos emplois.

L’accumulation de tous ces facteurs rend la situation économique encore plus incertaine qu’il y a quelques mois (voir L’Égalité n°205). La concurrence entre les principaux capitalistes mondiaux, pour gagner des marchés et faire des profits, n’a vraiment pas fini de s’intensifier. Le monde est bouleversé. Cette situation constitue, en fait, le tableau de fond de tout ce qu’il se passe dans le monde, y compris en France.

Le dur prix payé par la population

Le pire dans tout ça, c’est que l’argent a coulé à flots, mais s’est retrouvé dans les poches d’une toute petite minorité de personnes. La vaste majorité de la population mondiale a souffert grandement. 31 millions de personnes de plus ont été poussées dans la pauvreté extrême à travers le monde ; 155 millions de personnes souffrent de famine. Mais pendant ce temps-là, le nombre de milliardaires a encore augmenté : pour la première fois, le monde compte plus de 3 000 milliardaires, et leur fortune totale a grimpé à 10 000 milliards de dollars (c’est presque 3,5 fois le PIB de la France). Cela signifie que la part de la classe ouvrière n’a fait que diminuer.

La crise est bel et bien réelle, mais les super-riches se sont gavés dessus – et ils vont continuer à tout faire pour que ce soit nous, les travailleurs, les jeunes, les pauvres, qui paient le prix fort. La remise en cause du système capitaliste va donc continuer. C’est une situation objectivement favorable à la lutte pour une société socialiste. Une société qui remplacera le chaos capitaliste par la gestion et la planification collective et démocratique des ressources et de la production, pour satisfaire les besoins de toutes et tous en sauvegardant notre environnement.

Par Cécile Rimboud, article paru dans l’Egalité n°207