Verts et écologie : Impasse de la vélorution

La fermeture à Paris des voie sur berge, rebaptisées « Allée de la vélorution » par les Verts cet été, aux véhicules à moteur pendant un mois n’aurait pas été aussi critiquée si elle avait été mieux préparée. Tibéri, lui, avait su faire passer la fermeture dominicale de cet axe et de quelques autres sans prendre à rebrousse-poil la population ni surtout augmenter les embouteillages et donc la pollution sur les itinéraires laissés libres aux émetteurs de CO2, de particules et de décibels.

Article paru dans l’Egalité n°89

De même, les couloirs bus-taxis-vélos de 4,5 mètres de large protégés par un muret ou une banquette sont une vieille revendication écologiste qu’il est urgent de faire entrer dans les faits progressivement. Les bus de la Petite Ceinture circulent nettement mieux sur les boulevards des Maréchaux depuis qu’ils ont des couloirs protégés réalisés là-encore à la fin de l’ère Tibéri. La suppression d’une file pour les voitures passe encore plus facilement lorsque l’on crée une ligne de tramway comme en Seine-St-Denis et dans diverses villes de province. L’opération Rivoli-Sébastopol des Verts soutenus par Delanoë risque de faire beaucoup de mécontents sans améliorer la santé des Parisiens car, pour dissuader les citadins d’utiliser des engins polluants, il faut leur offrir une alternative. Le vélo ne peut en être une que dans certains cas, surtout tant qu’il n’y a que quelques tronçons protégés. Par contre, les transports en commun qui ont déjà dans la capitale et la petite couronne un vaste réseau pourraient devenir plus attractifs s’ils étaient renforcés et si leurs tarifs s’acheminaient vers la gratuité. Or il n’y a pas eu d’augmentation substantielle de l’offre et, en guise de baisse du ticket et de la carte d’abonnement, cette année encore, la hausse des tarifs de la RATP a été supérieure à l’inflation. Merci, Monsieur le Ministre des Transports !

A l’échelle nationale et même européenne, la journée « en ville sans ma voiture » du 22 septembre risque d’être, cette année encore, un gadget sans grande portée.

Couleuvres et manœuvres

Sur l’interdiction aux Poids Lourds du Tunnel sous le Mont-Blanc lorsqu’il réouvrira, les Verts ont raison de soutenir les riverains de la vallée de Chamonix. Mais c’est trop facile de taper sur Gayssot alors qu’ils sont dans le même gouvernement depuis plus de quatre ans et que pendant toute cette période, on les a peu entendus élever le ton sur la question du ferroutage.

Aux côtés des militants de la Confédération Paysanne qui détruisent les champs de maïs transgéniques, il y a souvent des Verts, mais au bas des textes qui ont autorisé leur mise en culture, à côté de la signature de Jospin et de Glavany, il y a celle de Voynet. Et fin octobre, le troisième aéroport international du Bassin Parisien (dont les Verts ne veulent pas) risque d’être décidé avec le paraphe du Ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement…

Hors du domaine écologique aussi, des Sans-Papiers à la Tchétchénie, en passant par la RTT, on pourrait multiplier les exemples du grand écart entre des positions militantes relativement correctes et courageuses et les compromis passés avec le PS pour à peine atténuer l’impact du rouleau compresseur capitaliste. Anecdotique, mais ô combien symbolique, est l’attitude de Cochet qui retire sa signature de la motion Mondebourg lorsqu’il prend conscience que pour remplacer Voynet au gouvernement, il faut un décret du Président de la République et qu’il vaut mieux ne pas demander sa comparution en Haute-Cour…

Il y a parmi les Verts d’anciens révolutionnaires comme Lipietz. Il y a aussi des petits bourgeois du centre-gauche comme Mamère (qui a pris la mairie de Bègles au PCF sous l’étiquette PS et avec l’aide de la droite et qui a magouillé avec Lalonde et Tapie) ou Cochet (qui change de circonscription comme Bernard Pons et qui n’avait pas mis les pieds à la Fête de l’Huma avant d’y être invité en tant que vice-président de l’Assemblée Nationale). Mais ce n’est pas par rapport à leurs origines idéologiques qu’ils se chamaillent le plus dans leurs CNIR ou durant leur université d’été car ils se revendiquent tous de la gauche plurielle, car l’écologie politique qui les réunit évacue le caractère central de la lutte des classes dans l’histoire comme dans l’actualité, ce qui revient à faire l’impasse sur la nécessité de détruire le capitalisme pour, notamment, sauver la planète. Sous prétexte de ne pas être ringards, les adeptes de la vélorution sont dans l’impasse.

Par Jacques Capet