Syndicalisme dans le secteur social, reprenons depuis le début…

Les militants syndicaux ont bon tenter d’impulser les luttes, le secteur social est désormais à dominante associative, la décentralisation et le désengagement de l’Etat ayant fait leur œuvre.Article paru dans l’Egalité n°98

Il en découle un éclatement des structures, des écarts de conditions de travail – qui ne sont qu’apparents en réalité -, et un isolement des salariés persuadés qu’ils sont les seuls confrontés à telle ou telle attaque. Ils pensent que leurs difficultés qu’ils subissent sont spécifiques à leur association, et qu’elles découlent de choix de leurs directions ou d’organismes de tutelles qui les auraient dans le collimateur.

Un tel contexte pourrait favoriser le morcellement de plusieurs petites luttes internes, mais cela ne s’avère qu’à moitié vrai. Dans un secteur où le conflit et le rapport de force sont deux notions méprisables et considérées comme puériles, il arrive tout de même que certaines associations se mobilisent. C’est en général dans les associations de taille importante où le champ revendicatif y est très spécifique et où l’absence de volonté d’étendre la mobilisation aux autres associations susceptibles d’être concernées persiste. « La culture associative » fait que même lorsque la nécessité de s’organiser pour défendre nos emplois ou nos outils de travail est présente aux esprits, la forme associative prend bien souvent le dessus sur le syndicalisme, y compris pour les travailleurs sociaux syndiqués.

Il faut donc passer en premier lieu par une implication réelle des travailleurs dans la construction d’une mobilisation, pour qu’émerge la question de la construction syndicale. Il ne s’agit pas de défier les principales structures syndicales existantes (CFDT, SUD, CGT), mais d’avantage d’une étape transitoire. Ne pas prendre en compte ce réflexe associatif reviendrait à prendre le risque de se couper de travailleurs combatifs pour qui la question de se syndiquer n’est qu’une question de temps. A Rouen, c’est dans un contexte de criminalisation des précaires ; du tout répressif, de mise en concurrence des structures d’aides sociales sous la pression des coupes budgétaires drastiques, que des salariés syndiqués et non syndiqués se sont regroupés en collectif.

Ce collectif est en constante évolution depuis sa constitution en juin dernier – tant sur la forme que sur le fond. S’il est principalement ancré dans le champ de l’insertion, le nombre et le type d’associations impliquées augmentent régulièrement. C’est d’ailleurs en participant à ce collectif qu’une quinzaine de salariés d’un centre d’hébergement ont décidé de créer une section syndicale SUD dans leur association. Et même si la défiance aux structures syndicales est encore loin d’être dépassée, il est désormais évident qu’elles ont leur place dans cette mobilisation naissante. Le collectif appelle d’ailleurs à une réunion intersyndicale le 12 novembre prochain, l’objectif étant d’appeler à une première journée d’action et d’impulser une mobilisation qui devra s’inscrire dans le long terme.

Par Mélanie Gras