Immigrés : des boucs émissaires en Europe comme aux antipodes !

Le sort des réfugiés et immigrés se dégrade rapidement. On refuse de les accueillir, on impose des conditions de vie inacceptables. Partout, le droit d’asile est attaqué, le capitalisme au bord d’une crise économique importante ne prend plus de gants à ce sujet ; la démagogie électoraliste raciste prend le dessus.

Article paru dans l’Egalité n°89

Le dernier exemple en date est celui du cargo « le Tampa ». Ce cargo, battant pavillon norvégien, a secouru le 26 août dernier un bateau indonésien rempli d’hommes, de femmes et d’enfants en détresse. Non loin des côtes australiennes, le commandant s’est empressé de demander la possibilité d’accoster sur l’Ile de Christmas. A sa grande surprise, il a essuyé un refus des autorités maritimes. Une grève de la faim est commencée pour infléchir le gouvernement australien. Sans succès.

Comme les flics qui avaient expulsé violemment les sans-papiers de Saint-Bernard, l’Australie investit militairement le cargo pour empêcher son entrée dans les eaux territoriales. C’est la plus grosse sortie de l’armée australienne depuis celle au Timor oriental ! Le 3 septembre, l’Australie obtient le « dépôt » des réfugiés sur l’île de Nauru. Charmant site où la végétation ne pousse plus en raison d’anciennes extractions de phosphate, ce minuscule Etat de 21 km2 est au bord de la faillite ! Bel avenir pour les réfugiés.

Une politique anti-réfugiés violente et démagogique

Mi-août, John Howard, premier ministre australien, était mal placé dans les sondages pré-électoraux. Il refuse les réfugiés du Tampa et poursuit une campagne contre « la menace d’une invasion étrangère ». Il appelle à « défendre [leurs] frontières et à faire tout le nécessaire pour protéger [leur] souveraineté ». Sa côte de popularité, par cette cynique manipulation des peurs des électeurs, augmente. L’Etat australien construit sur le vol des terres aux aborigènes, a un lourd passé xénophobe contre les immigrants. L’Australie a adopté depuis quelques temps une politique répressive contre les réfugiés qui sont parqués dans 6 nouveaux centres d’internement, où les conditions de vie y sont déplorables. Tout réfugié entré illégalement n’a pas les mêmes droits sociaux que les autres réfugiés, pas de regroupement familial, un visa limité de trois ans. Cette Australie ressemble au bagne anglais qu’elle fut !

L’Europe poursuit sa rationalisation de l’immigration

Les autres pays ont crié au scandale à grand renfort de presse. Que d’hypocrisie ! En réalité, le droit d’asile est de toute part attaqué par chaque gouvernement capitaliste, sans le moindre scrupule.

Ainsi, depuis septembre, Blair demande la fermeture du centre de rétention français de Sangatte près du tunnel sous la Manche. Ce centre est le point de départ de l’immigration outre-manche. Prévu pour une capacité d’accueil de 600 personnes, il en reçoit jusqu’à 1700. Les conditions de vie, la promiscuité y développent nombre de conflits entre les réfugiés en attente. Parqués comme des animaux, comment peut-on vivre décemment ?

En France, les dissensions au sein du gouvernement pluriel à ce sujet montrent une des faiblesses de la forteresse-Europe de Schengen. En attente d’un statut, ces réfugiés sont inexpulsables et irrégularisables selon leurs lois répressives. Ils sont un vide juridique à eux seuls !

Ainsi, près du détroit de Gibraltar, l’Etat espagnol construit des miradors détectant par infra-rouges les embarcations sommaires marocaines cherchant à passer. Cependant, les bateaux rapides des passeurs des propriétaires terriens andalous vont trop vite pour être détectés. La loi du profit est encore sauve…

L’Allemagne : fer de lance de la rationalisation de l’immigration

Début août, Otto Schilly, ministre de l’intérieur allemand, publie un projet de loi sur l’immigration. Malgré les 4.5 millions de chômeurs en Allemagne, il y a 1.5 million d’emplois vacants qualifiés dans la métallurgie, l’électronique et l’hôtellerie. Le BDI (organisation patronale nationale allemande) explique alors qu’avec la faible démographie du pays, le recours à 300 à 400 000 immigrés va être nécessaire.

Le gouvernement Schroeder répond directement à leurs attentes avec l’appui des syndicats, IGMétal en tête. Une loi à plusieurs niveaux sur l’immigration est faite, un an avant les élections générales. La loi soutenue par les députés de la majorité SPD-verts et par la CDU doit passer en octobre après les élections dans certains landers. Son but : déterminer les besoins annuels en travailleurs étrangers sur le marché de l’emploi.

Les bases sont claires : on crée 3 catégories d’immigrés : les étrangers hyper-qualifiés qui sont accueillis sans limite, les travailleurs étrangers moyennement qualifiés obtiendraient leur permis selon les besoins de chaque Land. Les immigrants sans contrat de travail doivent avoir suffisamment de points. Ces points se calculent en fonction de l’âge, de la qualification, des connaissances linguistiques germaniques…Plus de contrat pendant trop longtemps entraîne l’impossibilité de pouvoir renouveler le permis de séjour ! Une agence gouvernementale sur l’immigration et les réfugiés sera créée : « un instrument souple, moderne, favorable aux entreprises […] permettant de limiter l’immigration et de l’orienter à la demande ».

Partout dans le monde, nous nous battons pour le droit d’asile, la régularisation sans condition de tous les sans-papiers avec des titres de séjour longs et la liberté de circulation.

Par Leïla Messaoudi