Education nationale : Du Collège aux entreprises, un enseignement au rabais

Le ministre de l’éducation a annoncé pour 2005 une réforme de la classe de troisième, afin de concilier les connaissances communes avec la  » diversification des parcours  » . La réalité sera bien différente.

Article paru dans l’Egalité n°108

Pour diversifier les parcours il faudra choisir entre la LV2 (l’espagnol, l’allemand…) et  » la découverte professionnelle « . Choisir une de ces deux options ce sera décider, dès la troisième, entre l’enseignement professionnel et l’enseignement général. Les connaissances culturelles communes vont diminuer et celles du monde du travail augmenter. C’est la vision capitaliste de l’éducation : il faut sélectionner au plus tôt ceux qui devront être exploiter rapidement.

Seront aussi supprimées deux classes spécifiques (3° d’insertion, 3° techno) qui devaient aider les élèves démotivés, au profit du  » dispositif d’alternance  » déjà existant. Ce dispositif géré par le collège propose aux enfants  » décrocheurs  » d’alterner entre les cours généraux et les stages en entreprise ou en lycée professionnel. On demande finalement aux structures qui en avaient l’habitude de ne plus recevoir ces jeunes, et au collège, souvent démuni devant ces problèmes, de le faire. L’état, lui, ne dépensera plus un centime alors qu’il attribuait des moyens supplémentaires pour les deux classes spécifiques, et ce pour un système sans cadre national, qui met à l’écart certains enfants et qui peut occasionner des frais pour les familles.

Avec ces deux projets, les entreprises vont prendre pied dans le collège. Le but n’est pas de « diversifier les parcours », mais de sélectionner rapidement les enfants pour les former au monde du travail. Ce sont bien sûr les enfants issus des couches sociales les plus défavorisées qui sont concernés : pourquoi donc donner aux futurs exploités un accès à la connaissance et à la culture ? Face à ces projets, le SNES, principal syndicat du secondaire, parle « d’avancées » alors que la remise en cause du « collège unique », même s’il est loin d’être une solution aux difficultés des enseignement, ne fera qu’accroître les inégalités sociales.

Le gouvernement et les médias, déclarent régulièrement que les moyens phénoménaux donnés jusque là à l’éducation n’ont pas permis de lutter contre l’échec scolaire et que le nombre d’enfants scolarisés a diminué. Pourtant, même si le chiffre reste trop élevé (60 000), en 40 ans la part de jeunes sortant de l’école sans qualification est passée de 40 % à 8 % ; quant à la baisse des effectifs elle est très limitée ( 0,6 % dans le secondaire) et provisoire (nouvelle augmentation en 2008).

Le discours n’est là que pour justifier les économies que la baisse des impôts et la rigueur obligent à faire. Les lycées et les collèges ont perdu 6300 postes d’enseignant, 30000 surveillants et aides-éducateurs. Pour 2005, 24200 recrutements sont prévus pour le primaire et le secondaire, alors que 33900 enseignants prendront leur retraite : c’est à nouveau 9700 postes supprimés.

Concrètement les enfants sont de moins en moins aidés, leur projet d’orientation se fait en étant peu conseillé, des classes sont fermées, d’autres sont surchargées, certaines formations sont supprimées ; les actes de violence ont augmenté de 10 % dans les établissements scolaires car le personnel de surveillance a diminué. Qui s’en soucie ? Pas le gouvernement.

L’objectif du ministère est clairement de précariser les travailleurs de l’Education nationale : le contrat des assistants d’éducation est souvent à renouveler tous les ans. Avec l’augmentation des effectifs et la diminution du nombre de profs, on court à la catastrophe … à moins d’utiliser massivement des non-titulaires. Les vacataires sont déjà très employés : leur contrat d’embauche ne dépasse jamais 200 heures et les rend corvéables à merci dans l’espoir d’un renouvellement. Comme solution, le ministère de la fonction publique propose un nouveau CDD renouvelable une fois, voire un CDI sans aucune sécurité de l’emploi. C’est un moyen de régulariser la précarité et d’empêcher les travailleurs de s’organiser.

Par Luc de Chivré