Devoir de mémoire ou nécessité de lutter ?

Le débat fait fureur actuellement sur le fameux article de loi qui demande que dans les programmes scolaires soit enseigné le rôle positif de la colonisation. Accepter cela, ce serait reprendre les arguments racistes des colonisateurs de l’époque qui chaque fois prétendaient coloniser pour civiliser les « nations inférieures ». Jamais la colonisation n’a été faite pour autre chose que pour accroître les richesses des pays colonisateurs. Pour que cette colonisation soit rentable, il a fallu que soient développées quelques infrastructures, et quelques cadres locaux. Mais c’était uniquement pour « valoriser », en termes capitalistes, la colonie.

Ceux qui veulent que soient évoqués à égalité les horreurs et les bienfaits de la colonisation cherchent avant tout à masquer la cause purement économique, exploiteuse, de la colonisation. D’ailleurs, de nombreuses élites locales s’en étaient bien accommodées, qui faisaient de la vente de leur propre peuple une source de revenus importante. Il est bien agréable de noter qu’au passage une vérité historique a enfin été reconnue : l’esclavage a été rétabli par le dictateur meurtrier qu’a été Napoléon.

Pour autant, ce débat ne doit pas en masquer un autre : celui de comment lutter et combattre le racisme et l’impérialisme aujourd’hui Le collectif « Devoir de mémoire » (rebaptiser « Devoir de réagir » suite aux évènements dans les quartiers populaires) après quelques colloques sur la question, a lancé une opération d’appel à l’inscription des jeunes des quartiers populaires sur les listes électorales. Besancenot, Jamel Debbouze ou le rappeur Joey Starr figurent parmi les fondateurs de ce collectif. Si au début l’appel ne voulait pas se limiter à la simple question du vote, l’opération du 20 décembre se limita complètement à cela. A un jeune qui lui disait « s’inscrire mais pour voter pour qui ? » Joey Starr et les autres ont été bien incapables de répondre.

En quelques semaines, une initiative qui pouvait donner des éléments de politisation voire de « susciter des vocations » comme le disait le rappeur, s’est transformé en manœuvre aisément récupérable par le PS.

Il en va comme pour le colonialisme, la reconnaissance du caractère criminel de l’esclavage etc. comme pour les suites politiques des évènements dans les « banlieues » : c’est en les liant à l’analyse même du capitalisme et donc aux moyens de combattre ce système que de tels combats seront efficaces. Les milliers de jeunes qui vont s’inscrire sur les listes électorales ne devraient pas attendre de savoir pour qui ils peuvent voter. Ils doivent se réunir, discuter de ce qu’il faut pour briser la discrimination sociale que subissent les quartiers en termes de logement, d’emploi, de services publics, de racisme etc.

Et si des organisations les défendent vraiment, alors qu’ils s’y joignent ; sinon qu’ils n’hésitent pas une seule seconde à s’impliquer eux mêmes.

Article paru dans l’Egalité n°117