Une baisse du chômage en trompe-l’œil

De Villepin avait promis, lors de son accession au poste de 1er ministre, de réduire de façon sensible le chômage en 100 jours. Les chiffres semblent lui donner raison. Mais en réalité derrière l’effet d’annonce se cache une toute autre réalité pour les chômeurs et les précaires.

Article paru dans l’Egalité n°115

Cette baisse du chômage s’est faite surtout par une augmentation des radiations et des cessations d’inscription. En effet le gouvernement et les institutions chargées du traitement du chômage ont appliqué les règles à la lettre. Par exemple, en Haute-Normandie, la direction de l’ANPE et de l’ASSEDIC ont effectué en juillet une opération de cessation d’inscription de toutes les personnes ayant travaillé 136 heures les deux mois précédents. Cette opération, que la plupart des conseillers ANPE ont découvert alors qu’elle était déjà en cours, s’est faite sans que les directions régionales de ces deux organismes se posent la question de savoir quel type d’emploi avait occupé ces personnes qu’elles radiaient : emploi pérenne (CDI) ou précaire comme des missions intérim courte durée renouvelées chaque semaine. Ce genre de méthode peut expliquer le chiffre des radiations de juillet dans toute la France: 34 000 !

Seules 20% des sorties de la liste des demandeurs d’emploi se fait grâce à un retour à l’emploi. Et parmi ces 20%, seulement 25% se font vers un emploi stable. Comment pourrait-il en être autrement alors que l’économie capitaliste française et mondiale est en berne.

Il est clair, que le gouvernement ne va pas en rester là. La volonté de De Villepin de faire recevoir les chômeurs 1 fois par mois par les conseillers ANPE sans une augmentation significative du nombre de conseillers se situe dans la même logique. Depuis la mise en place du PARE-PAP en 2001, les chômeurs sont contrôlés tous les 6 mois. Cette augmentation de charge s’était faite avec l’embauche de 3500 conseillers sur des fonds ASSEDIC, venant combler uniquement la baisse du temps de travail, sans que l’ANPE puisse rendre le service auquel les chômeurs peuvent prétendre. Cette nouvelle augmentation se fera sans embauche à l’ANPE. En conséquence ces convocations mensuelles se réduiront à un véritable contrôle social du chômage : si vous avez recherché et que vous en avez la preuve vous pourrez continuer à être inscrit et à percevoir le cas échéant des indemnités chômage, sinon la sanction risque d’être immédiate !

A ce propos, l’arsenal répressif à l’encontre des chômeurs se renforce et s’affine : par exemple le 1er refus d’emploi quel qu’il soit – CDI, emploi précaire, contrat d’apprentissage ou de professionnalisation, ou contrat aidé – de formation ou d’action d’insertion, entraînera une radiation de 15 jours. Si le chômeur persévère, une radiation de 1 à 6 mois pourra être prononcée à son encontre. La première absence à une convocation entraînera une radiation de 2 mois, par la suite la sanction sera portée de 2 à 6 mois. Ces radiations seront accompagnées de suspension, réduction ou suppression des indemnités de chômage décidées la direction départementale du travail. L’ASSEDIC, qui procède aussi à des contrôles de recherche d’emploi, pourra elle aussi réduire, suspendre ou supprimer les indemnités.

Les chômeurs doivent se regrouper dans les associations et les syndicats afin de se mobiliser collectivement dès maintenant, car ils ne pourront pas se défendre individuellement face à la volonté du gouvernement de faire baisser le chiffre du chômage, à défaut du chômage lui-même, et de fournir une main d’œuvre toujours plus précaire au patronat. Mais le chômage ne pourra disparaître qu’avec la fin de cette société qui fonctionne pour le profit d’une minorité pour laquelle le chômage de masse est une nécessité vitale. Seule l’établissement d’une société gérée démocratiquement par les travailleurs pour la satisfaction de tous permettra en répartissant le travail entre toutes les mains de faire disparaitre le chômage : le socialisme.

Par Yann Venier