La situation au lendemain des régionales, le besoin d’une opposition combative contre Macron

Avec 65,7 % d’abstention, les élections régionales et départementales des 20 et 27 juin n’ont pas passionné les foules. Et on ne peut pas dire qu’elles sont significatives du fond politique dans le pays. Elles ont avant tout montré que les partis qui disposent d’implantation et de visibilité, à défaut de nombreux militants, ont pu conserver leur avantage.

Voici l’édito du supplément à l’Egalité n°205, vous pouvez vous procurer ce supplément auprès des militants ou en nous contactant.

Sur les 12 régions métropolitaines, toutes ont reconduit l’équipe sortante : 5 pour le PS et ses alliés, 7 pour la droite sous la forme LR ou UDI. Mais on ne peut pas vraiment en tirer des conclusions fermes. D’une part, les élections régionales n’ont pas d’enjeux clairs pour une majorité de la population. Les Régions n’ont pas de grands pouvoirs sauf celui d’aider le gouvernement à casser les services publics comme la SNCF ou l’Éducation et la Santé. Les régions ne représentent que 13 % du budget total des collectivités territoriales (Communes, Départements et Régions) et ne s’occupent ni de la solidarité (RSA, dépendance, enfance, personnes âgées, etc) ni des services publics locaux (écoles, centres médicaux et sociaux…).

Et malheureusement, les élections départementales sont désormais mises sous la tutelle des régionales et voient leurs enjeux disparaître.

Mais c’est aussi parce que le PS et la droite ne représentent pas une opposition claire à Macron que les élections n’ont passionné personne, particulièrement avec la campagne politique limitée par les restrictions dues aux mesures liées à la pandémie. Au contraire de celles de 2015 et surtout de celles de 2010 qui avaient pour enjeu de sanctionner la politique nationale (en 2015 du PS, en 2010 de la droite et de Sarkozy) les élections de 2021 ne représentaient qu’une sorte de routine qui néanmoins a montré que Macron n’a aucune base locale (son parti, LaRem, étant éliminé dès le 1er tour dans les Hauts de France, en Occitanie ou en Auvergne-Rhône-Alpes, et dépassant à peine les 11 % dans d’autres régions comme la Normandie, l’Île-de-France ou la Bourgogne-Franche-Comté).

Ça ne veut pas dire que Macron lui-même recule dans les intentions de vote pour la présidentielle de 2022 ; cela montre que ce qu’il manque, c’est une véritable force politique d’opposition, implantée dans les luttes, les quartiers et les entreprises, qui rassemblerait ainsi des millions de travailleurs, de jeunes, de retraités, contre la politique de Macron.

Nouveaux recul pour le Rassemblement National

Le RN, qui a retenu un soutien médiatique énorme, a en fait pris une véritable claque. Il perd de nombreux cantons par rapport à 2015 : de 31 il passe à seulement 13. Aux régionales, ses listes sont également en recul, même en Provence Alpes Côte d’Azur (PACA) où la tentative de mettre une tête de liste issue de la droite classique, Thierry Mariani, s’est transformé en échec, le RN obtenant 42,7 % des voix, soit 520 000 votes, là où Marion Maréchal-Le Pen en obtenait 880 000 en 2015.

C’est certainement le début d’une crise profonde pour le RN qui d’un côté ne peut faire sans Marine Le Pen pour avoir un fort score aux présidentielles mais dont beaucoup de dirigeants critiquent la ligne trop « sociale » de leur dirigeante. Alors que Marine Le Pen s’est prononcée officiellement pour la retraite à 60 ans (tout en étant contre les grèves de travailleurs qui défendent les retraites…), de nombreuses figures du RN ou assimilé (R. Ménard, G. Collard, Marion Maréchal-Le Pen…) sont contre.

D’autre part, le RN ne sait pas faire autre chose que des campagnes électorales, ayant très peu de militants, et voyant bien souvent ses élus disparaître en cours de mandat.

Le poison que continue d’insuffler le RN dans la vie politique est toujours là, car ça arrange bien la droite ou les macronistes de faire oublier que les responsables du chômage et de la mauvaise qualité de vie en France sont le gouvernement et les grands patrons.

Le PS reprend la tête de la « gauche » pro-capitaliste

Comme nous l’écrivions lors du bilan des élections municipales de 2020, les bons scores d’Europe Écologie-Les Verts (EELV) ne représentaient pas une véritable vague mais bien plus l’envie de certaines couches de la population des centres-villes d’avoir une gestion plus écologique de leur commune. EELV s’est mis alors à servir de caution écologique au PS, qui a pu ainsi se faire passer pour « écologiste et social » – quand dans le même temps, rien dans son programme ou dans sa gestion des collectivités territoriales n’est social ou écologique.

De fait, le PS avait laissé la tête de liste à EELV dans les régions qui ne pouvaient pas être gagnées et a ainsi conservé les siennes. Autant les scores très bas de la liste emmenée par Karima Delli (22 %) dans les Hauts-de-France, qui distillait l’illusion d’une « gauche » rassemblée du PS à la France Insoumise (alors que leurs programmes sont incompatibles) que la fusion, très politicarde, des listes EELV, PS et PCF-LFI, au 2ème tour en Île-de-France, pour un résultat très moyen (la liste dite de gauche ne progresse que de 45 000 voix entre les deux tours, tandis que celle de V. Pécresse pour la droite en récupère près de 300 000) ont leur utilité pour les dirigeants du PS. Ce dernier, qui était entièrement discrédité après la politique de Valls-Hollande (et dont Macron était sans problème le ministre de l’économie) reprend ainsi peu à peu la main. Le PS peut désormais se prétendre capable d’avoir un candidat pour la présidentielle de 2022 (certainement en la personne de la Maire de paris, Anne Hidalgo), il est sûr que désormais PCF et EELV finiront par s’aplatir devant lui, certes en râlant un peu des fois.

Rassemblement des agents territoriaux en grève devant l’Hôtel de Ville de Paris contre la loi de casse de la fonction publique

Une occasion manquée pour le PCF et LFI ?

Le dirigeant et « candidat » (très bas dans les sondages) du PCF, Fabien Roussel, déclare que le nombre d’élus régionaux PCF a augmenté. Mais uniquement parce qu’il a accepté d’être avec le PS dans des régions comme la Bretagne, la Bourgogne-Franche-Comté ou en Centre-Val-de-Loire. Refusant toujours de mener une politique indépendante du PS, le PCF est très divisé. Une partie des adhérents est favorable à l’alliance avec la France Insoumise, tant les programmes sont proches, mais une majeure partie des dirigeants préfère gérer une situation où cela se termine en accord avec le PS.

Au niveau départementales, le PCF perd son dernier département (le Val-de-Marne, 94) et ne conserve ses élus que dans de vieux bastions historiques, comme dans le Nord, l’Allier ou en Seine-Maritime, mais bien souvent parce que ce sont des maires.

Pourtant, lorsque le PCF a fait binôme avec LFI, les scores n’étaient pas mauvais, dépassant bien souvent les 10 % voire 15 %. Cela aurait pu être l’occasion de faire une campagne bien plus combative, de dénonciation de la politique de Macron et de la casse des services publics, lesquels sont largement attaqués par les majorité PS aussi (voir notamment les luttes actuels des agents municipaux dans l’article au verso). Mais la direction du PCF ne veut pas de rupture avec le PS, ne comprenant pas le besoin d’une force politique de masse qui ne peut être incarnée par un PCF s’adaptant de plus en plus au capitalisme.

La FI de son côté a été incapable d’avoir une politique cohérente. Dans le sud-ouest (Occitanie, Nouvelle-Aquitaine), elle s’est présentée avec le NPA, obtenant des scores honorables en dépassant les 5 %, mais ailleurs, elle a été au 1er ou au 2nd tour avec le PS comme dans les Hauts-de-France. C’était pourtant une ligne à ne pas franchir selon le texte adopté par l’assemblée LFI de l’été 2020. Néanmoins, c’est un signe de la faiblesse démocratique et programmatique de LFI qui a fait ces choix sans que cela soit ne discuté et validé par les militant-es.

Pour autant, les préoccupations de la majorité de la population sont bien les questions d’emploi, d’avenir de la jeunesse, de la Santé… Autant de sujets qui demandent un programme de lutte contre Macron et tous les partis qui défendent le capitalisme, que ce soit la droite, le RN, ou la pseudo gauche du PS-EELV.

C’est cela que la campagne autour de Mélenchon devra incarner dans les prochains mois. Il faut que le programme soit plus combatif, axé sur la défense des droits et des intérêts des travailleur-ses et de la majorité de la population. Défendre les services publics ou l’augmentation des salaires comme le dit LFI c’est bien, mais il faut plus.

Nous devons récupérer ce que les capitalistes nous volent : le gaz et l’électricité, la finance, le transport ferroviaire…doivent être en propriété publique. La campagne de la FI devra se baser sur les luttes des travailleur-ses et dénoncer les véritables causes de nos problèmes : le capitalisme et sa dictature du profit, et les gouvernements qui le servent.

Dans le même temps, cette campagne servira aux luttes si nous en faisons une campagne permettant de construire un véritable nouveau parti des travailleurs et de la jeunesse, un parti de combat, démocratique, qui avance une véritable alternative à ce système pourri : contre le capitalisme, pour le socialisme !