Retraites : l’épargne salariale passe sans réaction populaire

Les manifestations massives du 25 janvier ont montré de façon magistrale que les travailleurs ne sont pas tous intoxiqués par la propagande annonçant l’inéluctable faillite de la retraite par répartition et sont prêts à se mobiliser pour défendre leurs acquis quand on organise, même mal, la contre-attaque aux projets du patronat.

Article paru dans l’Egalité n°86

Le moins que l’on puisse dire, c’est que , face aux projets de fond d’épargne salariale de Fabius qui veut instaurer de biais ce que le MEDEF veut faire passer de force, la riposte a été étouffée dans l’œuf.

Coups d’épingle contre siphon

Le vote des fonds d’épargne salariale est passé complètement inaperçu, non que les directions syndicales ou le PCF, par exemple, passeraient totalement sous silence le projet de loi gouvernemental : l’Humanité y a même consacré toute sa une du 3 octobre et est revenue plusieurs fois sur le sujet. L’Hebdo VO de la CGT a publié deux pages de texte sur cette  » mauvaise réponse  » le 18 octobre Dès le 15 septembre, ce même magazine faisait un compte-rendu de la conférence de presse de rentrée de la confédération où l’on pouvait lire ce paragraphe : Au passage, Bernard Thibaut a épinglé le projet de loi sur l’Epargne Salariale qui vient en discussion au Parlement le 3 octobre : « Si elle devait être approuvée, la constitution de ces fonds exonérés de cotisations sociales aurait de fait, la faveur des employeurs, qui auraient tôt fait de l’utiliser pour éluder les augmentations de salaire et du même coup mettre en péril l’avenir du système de protection sociale, les modalités de sortie en rente venant en prime fragiliser dangereusement les retraites complémentaires ».

Fortes paroles ! Pratiquement, tout est dit sur la nocivité du projet gouvernemental. Hélas, Thibault parle de cela « au passage » et le terme épingler « souligne la faiblesse de l’arsenal mis en ouvre pour que l’avenir du système de protection sociale » ne soit pas « mis en péril »

Et effectivement, le projet de loi a été adopté une première fois par l’Assemblée Nationale le 4 octobre sans la moindre mobilisation des salariés concernés. La  » sortie en rente  » ayant été exclue du texte, les députés communistes ont voté pour et l’Huma- Hebdo du 7 octobre est allé jusqu’à titrer :objectif positif mais peut mieux faire ! en deuxième lecture, le 16 janvier, « le groupe communiste devait s’abstenir alors que son vote positif début octobre avait suscité quelques remous au sein du PCF » relève l’Huma du 17… (on nous dira peut- être que c’est moins pire que l’attitude du député Vert du Val- d’Oise qui, entre octobre et janvier, a fait le trajet inverse de l’abstention au vote pour, mais nous avons d’autres Cochet à fouetter !)

Comment ne pas se scandaliser d’une telle passivité quand, comme dit Frédéric Dayan dans la Voix Ouvrière du 13 octobre « Laurent Fabius veut développer l’épargne salariale, mais son projet ressemble trop à des fonds de pension. Le risque est grand de « siphonner » et d’affaiblir la protection sociale solidaire ».

La droite a voté contre non pas parce que cette loi irait dans le mauvais sens mais parce qu’elle n’irait pas assez loin. Comme dit « l’expert » Paul Maillard dans le supplément « placements » de la Tribune du 27 octobre « ces innovations rendent l’épargne – et plus particulièrement les plans d’épargne entreprise très attractive pour les PME. Sans oublier que l’expérience démontre que la mise en place de ces formules renforce le dialogue social au sein de l’entreprise et fidélise les salariés ».

Par Jacques Capet