Le second tour est venu confirmer les premiers éléments d’analyse que pouvait donner le premier. L’abstention a encore progressé, établissant un nouveau record, 38%, après les 36,5% du 1er tour (et 4% de bulletins blancs et nuls). Elle a d’abord touché l’électorat jeune et les quartiers populaires. Le rejet de la politique de Hollande se reflète dans ce constat. Alors qu’il avait été élu avec au moins le vague espoir que les choses s’adouciraient un peu, il n’en a rien été. Et si l’on excepte des villes comme Paris, Nantes ou Lille et quelques autres, plus la ville a représenté un enjeu pour le gouvernement Hollande plus la défaite a été cinglante. Le Ps réussit même la prouesse de perdre Limoges, ville pourtant dirigée par un maire « socialiste » depuis 1912 sans discontinuer !
L’UMP a du coup pu occuper l’espace mais sans recevoir un réel vote d’adhésion massif. Néanmoins, elle gagne des villes majoritairement à gauche comme Toulouse, et reprend ses villes traditionnelles comme Caen. En tout, 10 villes de plus de 100 000 habitants sont passées à droite, qui en dirige désormais 22 (contre 19 pour le PS , 1 pour les écologistes , 1 pour le pcf et 2 pour le centre). Dans les grandes agglomérations, les « métropoles », la droite risque d’être majoritaire : Lyon, Paris, Marseille… Et pour les villes moyennes, c’est tout aussi lourd, 155 villes de plus de 9 000 habitants ont basculé à droite. Mais le pourcentage total reste de 46% environ contre 45% en 2008, c’est bien évidemment la chute du PS qui permet à la droite de « prendre » des villes.
L’UMP ne présente pas une politique différente de celle de Hollande. Ce qu’il a manqué, c’est une vraie force d’opposition dotée d’une implantation locale qui aurait permis à de nombreux électeurs d’avoir un autre choix que l’abstention pour marquer leur mécontentement voire leur rejet de la politique de Hollande.
Le FN confirme sans s’envoler
Le Front National a donc confirmé ses scores du 1er tour, gagnant 11 villes de taille modeste. Finalement, c’est sa victoire dès le premier tour à Hénin Beaumont, cœur du bassin minier, et à la mairie du 7ème secteur de Marseille. Dans ces endroits très populaires, frappés par le chômage de masse et la désindustrialisation, le FN a avant tout fait campagne sur un programme très social et en essayant d’incarner une opposition virulente au gouvernement PS-EELV. Enfin, l’aventurier Engelmann (il a d’abord été candidat à l’extrême gauche quand celle-ci faisait de bons scores avant de se tourner vers le FN quand celui-ci a ré-émergé) devient maire de Hayange, dans le bassin sidérurgiste de Lorraine, au moment même où la loi qui devait contrer les liquidations de sites industriels comme celui d’Arcelor Mittal, était repoussée par le Conseil constitutionnel sans provoquer beaucoup d’émotion dans les rangs du PS. Un peu comme si Hollande se satisfaisait de ce que chacune des mesures un tout petit peu à gauche qu’il avait formulé dans sa campagne présidentielle soit retoquée par une instance ou une autre (il en a été de même pour la pseudo imposition exceptionnelle des ménages les plus riches). Le FN n’a donc eu qu’à capitaliser le mécontentement social sans pour autant effectuer une percée gigantesque. Dans beaucoup de villes, une partie de ses électeurs s’est reportée sur le candidat de droite au second tour, et dans la plupart il progresse très peu entre les deux tours. En fait, son électorat s’est mobilisé dès le premier tour.
Un potentiel pour le Front de Gauche ?
C’est encore plus difficile de savoir ce que recoupent les résultats des listes à gauche du PS au second tour. Car le Front de gauche s’est présenté certaines fois sans une partie de ses composantes, notamment le PCF, d’autres fois avec EELV pourtant partie prenante de la politique de Hollande, et enfin parfois avec le NPA. Il est certes difficile de plaquer sur un scrutin municipal qui a été aussi bas politiquement (jusque dans le nom des listes bien souvent), mais il est clair que le FdG, notamment rassemblé avec toutes ses composantes et indépendamment du PS, avait fait de bons scores au 1er tour (sans pour autant retrouver ceux du PCF d’antan) bien que se présentant de manière autonome dans un nombre limité de villes. Au second tour, il est encore plus difficile d’avoir une vision uniforme. De fait, c’est l’érosion du PCF qui continue mais sur un rythme très lent et pas de manière inéluctable et continue. Si, de manière assez incroyable, la ville de Bobigny, située dans la banlieue rouge de Paris, passe à droite (tout un symbole), le FdG et le PCF conservent une implantation locale et ancrée dans les quartiers populaires. Le problème, c’est qu’à de rares exceptions, le PCF est incapable de reprendre une mairie qu’il a perdu, et que pour de nombreuses mairies qu’il dirige, c’est souvent au moyen d’une alliance avec le PS…
Le 2nd tour est donc moins riche d’enseignements que le premier, notamment sur ce potentiel réel qui existe pour un Front de Gauche réellement indépendant du PS, tourné vers la masse des travailleurs, des chômeurs, des habitants des quartiers populaires, des jeunes… c’est avant tout en analysant les résultats du 1er tour que d’importantes leçons politiques peuvent être tirées. Lisez notre article d’analyse