Interview : Le jeudi 28 avril, 9 livreurs de ce sous-traitant d’Amazon se sont mis en grève, organisant un piquet avec les syndicats CGT de la zone et les Unions locales. Le 1er mai, Lumina Services a annoncé la fermeture complète de l’entreprise par WhatsApp voulant licencier en toute illégalité 30 autres travailleurs. Les militant-e-s de la Gauche révolutionnaire (et souvent syndicalistes aussi) passent régulièrement leur apporter le soutien.
Interview/discussion avec les livreurs en lutte
Des promesses pour mieux exploiter
Z. et D., sont chauffeurs-livreurs.
Ils sont 9 travailleurs dont 8 sans-papiers qui habitaient à Paris, et ont commencé à travailler en octobre 2021 chez l’entreprise Lumina-Service, une des entreprises sous-traitantes d’Amazon. Elle les avait fait venir de Paris avec une promesse d’embauche en CDI, avec logement, et régularisation prévue en mars. Ils ont effectivement reçu un contrat en CDI, mais tout le reste a été « oublié ». Un mois avant la date où les travailleurs sans papiers devaient recevoir leurs CERFA signés, la responsable de Lumina-Service commençait à les harceler pour les licencier. Ils ont été virés de leur logement et privés de travail depuis le 24 février, sans recevoir de papier de fin de contrat : ils n’ont donc plus accès à aucun droit, et se sont donc mobilisés avec la CGT pour défendre leurs droits.
Ils sont 12 dans cette situation, et 9 se sont mobilisés avec la CGT pour défendre leurs droits.
La mobilisation de soutien a continué lundi 2 mai dès 8h00, rue de la brèche à St Etienne du Rouvray !
Des conditions de travail abusives, et différences de traitement !
« Nous étions sous pression constante avec même des appels en pleine nuit, pas de mutuelle, entassés dans un logement exigu, un vrai manque de respect, et du racisme. »
Le logement « fourni », un 3 pièces (pour 12 !) « comme des moutons » à Canteleu, ils en ont été expulsés fin février quand ils ont demandé que les promesses soient tenues. Ils livrent sur toute la région, avec parfois 150 colis en une journée, « et si on n’a pas fini de livrer, ils nous obligent à dormir dans le camion ».
Sur leurs contrats, ils doivent faire 8h45 de travail par jour, 4j/7. La réalité est différente : ils se retrouvent parfois à faire des horaires tels que 10h-1h du matin, avec des heures supplémentaires et même des jours travaillés supplémentaires (jusqu’à une semaine de plus par mois) notés par les livreurs, mais jamais payées. Ils pointent sur une application, mais elle se coupe automatiquement à 20 heures. « Si on travaille après, on n’est donc pas pointés » mais « interdit de rentrer dans l’entrepôt avec le colis ». Il faut mettre le colis dans sa voiture personnelle, et repartir le livrer le lendemain, dès 6 heures. Chaque mois, « on se retrouvait avec des centaines d’euros en moins lors du versement de la paye, et on a jamais reçu de fiche de paye ».
Refus de se laisser faire !!
Les livreurs se sont alors mobilisés et « on est allé voir la responsable », RH de Lumina-Services ! Elle a répondu : « vous me prenez la tête dès le matin, je peux pas vous payer c’est Amazon qui n’a pas versé ».
Parfois lorsqu’un des livreurs allait revendiquer ses droits, il pouvait toucher un peu plus, avec la promesse de n’en rien dire ! Mais les travailleurs ne se sont pas laissés divisés par ces manœuvres patronales.
Le 24 février elle est venue à Canteleu, en déclarant qu’elle ne pouvait pas les garder puisqu’il fallait qu’ils aient des papiers français pour travailler, et qu’ils devraient partir. Dès le lendemain, « on a contacté la CGT ».
Les autres travailleurs de l’entreprise n’étaient pas au courant, et mais ils ont montré de la solidarité quant à ces attaques.
Les revendications !
A ce jour, les travailleurs sans-papiers n’ont toujours pas de droit de fin de travail puisque le CDI n’est pas officiellement clôturé. Ils réclament pour tous, leurs fiches de paye, le payement des heures et jours manquants, les papiers de fin de contrat, et le respect des engagements, comme la régularisation de la situation administrative…
« Il faut du respect pour tous et toutes ».
Certains travailleurs ont quitté un bon emploi de Paris pour ici en pensant trouver mieux.
Z. déclare « je suis d’accord pour payer mes impôts en France (contrairement à Amazon), c’est un devoir. Mais je ne peux pas le faire, je ne suis pas payé ! »
Maintenant Lumina-Service annonce fermer du jour au lendemain. On ne peut pas les laisser faire ! Ce sont des méthodes de voyous et tous les travailleurs doivent lutter ensemble, en participant à la manifestation appelée par la CGT jeudi 5 mai ; à 8h30 à la gare de Sotteville.
Amazon doit mettre fin à ses pratiques de sous-traitance, avec harcèlement, racisme, exploitation. Il y a au moins 7 entreprises différentes de sous-traitants sur la zone industrielle de Sotteville-lès-Rouen, et Amazon évite de les réunir pour ne faire que des entreprises de moins de 50 travailleurs, donc avec moins de droits syndicaux. Qu’Amazon ne se cache pas derrière ses sous-traitants, paye ce qui est du et embauche les livreurs !
Par Lu M