Le 18 avril 2019 se tiennent les élections présidentielles en Algérie, dans un climat tendu. Le président algérien multiplie les allers retours entre la résidence présidentielle et les grands hôpitaux européens, français en particulier.
Arrivé au pouvoir en avril 1999 pour stabiliser un système incapable de mettre fin à la guerre civile, Abdelaziz Bouteflika a su pérenniser son règne et asseoir ses adversaires politiques au sein du régime lui-même. Il a rallié à ses côtés les dirigeants syndicaux et des différentes organisations nationales (estudiantines, féminines, etc). Sa méthode : diviser et pulvériser l’opposition, corrompre les personnalités (artistes, sportifs, etc), et acheter la paix sociale en utilisant la flambée des prix du pétrole pour donner quelques miettes. Pour achever sa monopolisation du trône en toute sérénité, il a conclu un accord avec les islamistes avec la politique de la Concorde civile et de la réconciliation nationale. Il rassure le peuple sur le plan sécuritaire. Il a octroyé certains privilèges aux islamistes et les a introduit dans la vie active (« à vous la société, et à nous le pouvoir »).
Bouteflika s’arroge le droit absolu de détenir tous les pouvoirs exécutifs. Il a même acté l’éloignement de l’Institution militaire de la vie politique algérienne en mettant à la retraite plusieurs généraux. Il est incontestablement le maître à bord d’une locomotive destructrice. Depuis son arrivée, tous les droits ont été bafoués : en 2001, plus 127 morts en Kabylie pour avoir exigé la justice sociale, le travail et la reconnaissance des droits culturels. Il a fait la chasse aux non-Jeûneurs, aux non musulmans, aux militants des droits de l’Homme, avec privation de passeport.
Utilisation cynique de la décennie sanglante
Le Messie ! Telle est l’image qui lui a été associée par un régime politique qui a fait plonger le pays dans la « décennie sanglante » des années 1990, qui a connu plus de 200 000 morts. Le régime a instauré un climat de psychose durant cette période de terrorisme. Le peuple vivait une angoisse au quotidien, accompagnée d’une misère sociale atroce. Le peuple était cerné entre l’enclume et le marteau, entre le fascisme islamiste et le pouvoir militaire et corrompu.
Des promesses illusoires avait été énoncées, depuis sa première élection en avril 1999, sans qu’elles trouvent de concrétisation sur le terrain. Des sommes faramineuses ont été dilapidées dans des projets soit inutiles (construction de mosquées, subvention des organisations proches du régime…) soit dans des projets mal achevés (grand projet de l’autoroute Est-Ouest). Plusieurs secteurs sont ignorés : manque d’infrastructures hospitalières qui répondent aux normes modernes, d’écoles, d’universités, de centres culturels, marginalisation du secteur agricole alors que l’Algérie possède les plus grandes potentialités dans la région.
Un système corrompu
L’Algérie de Bouteflika a connu un nouveau phénomène, « Haraga » : ces migrants clandestins qui traversent la Méditerranée dans une petite barque. De 1999 à nos jours, le banditisme, les réseaux de prostitution, le trafic de drogue et différents stupéfiants, les viols, les crimes et les suicides sont en recrudescence. La société algérienne, dans son ensemble, vit un climat de dégénérescence : les étudiants sans savoir, les travailleurs sans syndicats et salaires décents, les chômeurs et diplômés sans perspectives, les femmes et minorités sexuelles sans liberté, etc.
Des nouvelles restrictions budgétaires ont été énoncées par les lois de finance successives. La chute des prix du pétrole a eu un effet direct sur l’augmentation des produits de première nécessité et des services. En 2018, le prix de l’essence sans plomb a augmenté de 17,80 %, essence « normale » de 19,15 % et le gazole de 12,93 %. Ces augmentations ont eu des répercussions sur les transports, l’agriculture, l’industrie,etc. alors que les salaires n’augmentent pas.
Les grandes puissances impérialistes ne voient pas l’intérêt de remettre en cause le régime algérien qui leur est si favorable. Et de son côté, le régime algérien fait de la prostitution politique et diplomatique son jeu favori en s’alliant aux grandes puissances mondiale (Russie, Union Européenne, Chine, USA,) en leur offrant des pots de vin et des privilèges. Les pays impérialistes partagent leurs parts du gâteau algérien : hydrocarbures, bâtiment, mines, télécommunications,…
L’Algérie de Bouteflika est plongée dans une grande crise économique et sociale : délaissement du secteur public, privatisation des entreprises publiques au profit des barons de l’import-export. Une nouvelle bourgeoisie corrompue et esclavagiste émerge sous le parrainage des militaires et du clan au pouvoir qui veut se servir des élections présidentielles pour continuer. Mais cette fois ci, la donne a changé. La mobilisation citoyenne dans tous les territoires algériens et même au niveau de la diaspora pour demander son départ s’amplifie. Comment canaliser cet élan de révolte pour le mener sur la bonne voix et éviter de reproduire les erreurs du passé ?
Comment lui donner une nature de lutte de classe, et qu’il s’oppose autant à Bouteflika qu’aux islamistes et aux arrivistes qui veulent se servir du mouvement pour faire carrière ? Comment faire comprendre au peuple que le problème ne réside pas en une ou plusieurs personnes mais dans tout un système bourgeois qui va à l’encontre des intérêts des travailleurs, des jeunes, et de la majorité du peuple, femmes ou hommes : nos intérêts de classe ? La bourgeoisie algérienne cherche des plans pour étouffer cet élan révolutionnaire, elle ne peut le trouver que dans ces pantins qu’elle a mis sur scène pour jouer le jeu du changement.
Par Amar Benhamouche
Pour des comités démocratiques dans chaque entreprise, université, lycée, quartier, pour développer la lutte et les revendications : hausse des salaires, égalité entre toutes et tous, respect des droits des minorités… Pour que la lutte s’étende dans les entreprises, avec les syndicats, pour organiser des grèves
Pour que ces comités discutent de la nouvelle société algérienne, démocratique, fraternelle, tolérante, respectant la liberté de conscience à l’opposé de ce régime corrompu, et son code de la famille Pour qu’ils discutent de l’organisation de la production économique et de l’investissement, par l’arrêt des privatisations et la renationalisation des entreprises privatisées, et organise des plans de développement, de reforestation
Pour la séparation des institutions publiques et de la religion
Pour des investissements massifs dans les services publics (santé, éducation…)
Pour une Algérie socialiste et démocratique, libérée du capitalisme et de l’asservissement aux puissances impérialistes que cela entraîne, avec des relations internationales de solidarité avec les pays de la région et leurs populations en lutte elles aussi contre des régimes servant les capitalistes