Grandes manifs syndicales et des mouvements sociaux au Québec

indexquebecUne interview de Julien, membre de Alternative socialiste Québec, section du CIO.

Une interview de Julien, membre de Alternative socialiste Québec, section du CIO.

Quelle est la situation actuellement au Québec depuis le mouvement de 2012?
Au Québec, on connaît la plus grande vague d’austérité jamais vue depuis l’élection des libéraux l’an passé. Ils ont délogé le gouvernement du Parti du Québec qui avait été élu à partir des aspirations du mouvement étudiant. Le parti québécois (parti nationaliste québécois) a renié toutes ses promesses électorales un peu progressistes pour couper dans l’aide sociale, augmenter les tarifs d’électricité puis a promis un budget d’austérité. Ensuite ils ont mené une campagne identitaire et raciste autour de la charte des valeurs, voulant instaurer une laïcité à deux vitesses, ciblant les femmes voilées mais laissant les crucifix à l’Assemblée nationale. Le parti québécois a anticipé les élections en mai dernier pensant avoir l’avantage, à tort. L’abstention a été forte et le parti québécois a tout perdu au profit des libéraux qui ont raflé la majorité absolue.

Des manifestations massives ont lieu contre le gouvernement libéral, que se passe t-il ?
Le premier budget des libéraux était un budget austère et pendant l’été et l’automne, ils ont imposé des coupes massives, sous prétexte d’obtenir un déficit 0, contre la dette… Ils se sont attaqués aux pensions des employés municipaux avec l’appui des populistes de droite qui dirigent Montréal et Québec. Leur loi veut imposer une variation de ce que tu reçois en fonction des lois du marché !!!
Les employés municipaux dénoncent depuis juin ce vol du salaire différé avec une campagne « On a rien volé, nous ! » Pendant l’été, il y a de grosses manifs des employés municipaux à Québec avec entre 10000 et 20000 participants. (les grèves sont interdites si elles ne sont pas dans le cadre des négociations des conventions collectives, considérées comme des grèves politiques)

Comment cette lutte s’est elle étendue à d’autres secteurs ?
Les employés municipaux sont le fer de lance de la lutte contre l’austérité et il était nécessaire de faire solidarité autour d’eux. Au début de l’automne, une manif très combative à Montréal a regroupé 30 000 personnes avec les familles des employés municipaux. Puis les mouvements sociaux se sont mis en action à nouveau en prévision d’un front commun intersyndical du printemps 2015 (négociation du secteur public et para public avec 400 000 personnes concernées).
A Halloween une première manif a eu plus large organisée par les mouvements sociaux directement contre l’austérité avec 50 000 personnes. Ceci s’est élargi à la dénonciation de la hausse des frais de garderie, des coupes dans les budgets des administrations des CEGEPs et universités, de la continuation du plan Nord d’exploitation des minerais pour des compagnies étrangères et d’industries pétrolières dans le golfe…

Quelles sont les revendications des manifestants ?
La coalition de la manif de samedi 28 novembre a organisé des manifs très importantes de 100 000 Montréal et 25000 à Québec. Les manifestants demandent la fin de l’austérité s’opposent « au démantèlement de l’état social et exige un gouvernement d’abord au service de la population et non des grandes entreprises ». Une escalade dans le mouvement et un plan d’action est nécessaire. Nous poussons à une journée nationale de perturbation du Front commun pour appuyer l’idée d’une grève générale de 24 h avec blocages, piquets, grèves….

La colère a monté sans cesse au Québec depuis 2010 puis en 2012, comment le mouvement peut -il avancer ?
En 2010 nous avons eu une seule grande manif avec la crise, mais tout est très vite retombé après un accord pourri entre les syndicats et le gouvernement. Cette fois-ci, la situation est différente car tous les secteurs sont touchés et nous avons eu la longue grève étudiante en 2012.
L’expérience des étudiants en lutte donne de l’énergie au mouvement, réveillant une combativité syndicale. Le mouvement motivent les membres des syndicats à défier la loi spéciale qui va être déclarée sûrement par le gouvernement si le mouvement grandit. La ténacité des étudiants a montré qu’il faut être prêt à hausser le ton et probablement lutter contre une future loi spéciale. Il s’agit d’un décret qui impose les termes des conventions collectives sans discussion pendant 4 ans et qui a été utilisé pour interdire de manifester les étudiants.

Quelle peut être la traduction politique de cette colère ?
Les directions des centrales syndicales sont très liées au parti québécois. Et la gauche de la gauche avec Québec solidaire (3 députés) n’organise pas les mouvements sociaux, très peu ancrée dans le monde du travail. Nous sommes partie prenante de Québec solidaire, cette force dénonce l’austérité mais sans campagne ni objectifs pour engager le combat contre l’austérité. Québec solidaire est donc peu perçue comme une option pour les travailleurs et les jeunes. Nous nous battons pour que la combativité d’une partie de la jeunesse étudiante et des travailleurs qui luttent contre l’austérité trouve une expression politique et des perspectives pour gagner. Alternative socialiste Québec travaille dans ce sens dans les syndicats en ayant impulsé le réseau syndical Offensive syndicale, au sein des mouvements de lutte et intervient dans Québec solidaire.

Propos recueillis par LM