« Gauches » du PCF, du neuf enfin ?

Ces dernières années, chaque congrès du Parti communiste a eu son lot de départs, et le dernier n’a pas dérogé à cette règle. La direction Hue continuant sur la ligne de la « mutation », il ne pouvait en être autrement. La grande nouveauté, Robert Hue qui devient président et Marie Georges Buffet secrétaire nationale, n’a pas masqué l’absence complète de projet politique du PCF. Hors de la gauche plurielle et du gouvernement, point de salut !

Article paru dans l’Egalité n°92

Cette ligne ne peut que se terminer en dissolution du PCF dans un parti du type du PDS en Italie (centre-gauche). Ceci fait du PCF un simple appendice du PS. Cette ligne est largement contestée, mais jusqu’à aujurd’hui de manière très désunie.

Les nombreuses tendances qui veulent reconstruire un parti communiste ou redresser le PCF ont jusqu’à maintenant brillé par leur incapacité à aller au delà de la critique de R. Hue. Beaucoup versent surtout dans la nostalgie du « grand PCF » de Thorez. Certaines comme la Gauche communiste essaient une approche un peu plus critique et n’hésitent pas à effectuer un bilan plus approfondi du stalinisme, ce qui leur vaut l’appelation de « trotskiste » par les premières, comme quoi les vieilles pratiques ont la vie dure. L’évènement du congrès de la Défense sera quand même l’extraordinaire… absence de participation des militants. 46% seulement ont voté dans les conférences préparatoires. Qui plus est au lendemain du congrès, plusieurs militants ont démissionné, dont Charles Hoareau, le leader des comités chômeurs-CGT de Marseille. Il aurait pu être présenté comme candidat alternatif à Robert Hue, lui qui représente les luttes, mais là encore les vieilles pratiques pèsent lourd, le souci de ne pas « diviser » le parti a eu le dessus. Résultat, le congrès du PCF n’aura pas servi à rassembler les « gauches » autour d’une ligne d’opposition qui s’ancrerait dans les luttes.

Depuis, Hoareau a choisi de démissionner, avec d’autres, rejoignant ainsi certains qui l’ont déjà fait. Un travail existait déjà au sein du courant « Rouges vifs », notamment dans le syndicalisme CGT.

Les stratégies sont différentes selon les courants mais un pas vient peut être d’être franchi. Une réunion de travail a rassemblé différents groupes avec pour objectif la constitution d’un regroupement (une sorte d’association ?) à la fois interne et externe au PCF, et doté d’un journal commun.

Deux questions se posent alors : avec qui et pourquoi faire ?

L’opposition à la « mutation » est aujourd’hui très large. Dans les opposants, il y en a beaucoup qui ne remettent pas en cause la participation au gouvernement. Tandis que d’autres ont une réaction à la « concurrence » de LO (et dans une moindre mesure de la LCR) qui les font qualifier « d’entrisme trotskiste » toute position trop critique par rapport au stalinisme. Enfin, très peu sont sur une ligne réellement internationaliste et révolutionnaire, les très anciennes traditions « chauvines » du PCF pesant lourd dans la formation des militants.

L’objectif de ce regroupement est la question déterminante. Soit la reconstruction d’un véritable parti ouvrier, défendant les droits des travailleurs jusqu’au bout, et luttant pour une véritable alternative au capitalisme, le socialisme, en sachant tirer les leçons des échecs répétés du 20ème siècle. Soit une formation soudée avant tout par sa nostalgie du grand PCF, et incapable de comprendre que la ligne du PCF a cessé d’être révolutionnaire bien avant R. Hue.

Dans les autres pays qui avaient eu un Parti communiste fort, des recompositions et des regroupements s’opèrent souvent autour de ces derniers ou après une scission de l’appareil. Cependant, à chaque fois l’irrésolution des directions de ces partis en freine le développement et surtout les capacités d’action.

L’exemple du Parti de la refondation communiste (PRC) en Italie est symptomatique. Véritable rupture à gauche lorsque la direction du PC italien décida sa transformation en parti de centre gauche, le PDS. Le PRC est entré en léthargie sous le gouvernement PDS malgré les nombreuses mesures antisociales de ce dernier. La victoire de Berlusconi aurait du les réveiller mais c’est surtout la grande manifestation de Gênes, les réactions face à l’assassinat de Carlo Giuliani par les flics, qui ont réactivé les luttes, et dans la suite le PRC. Pour autant, celui-ci ne propose pas de perspective politique, s’en remettant au mouvement anti-mondialisation (Genova social forum) et ne parle toujours pas de renversement du capitalisme, tout au plus de son dépassement. En résultat, l’extraordinaire contestation qui se développe en Italie peine à prendre une orientation réellement anticapitaliste et la base est nettement plus à gauche que le sommet.

Les gauches du PCF en s’unissant peuvent permettre un véritable pas en avant pour la lutte contre le capitalisme. Mais c’est en proposant un véritable cadre d’actions et de débats ouvert à tous et allant dans ce sens que ce pas sera significatif et utile. Une nouvelle réunion est prévue le 15 décembre, c’est avec attention que nous en suivrons les débats et les résultats.

Par Alex Rouillard