Émeutes de Dublin : le mouvement ouvrier est la seule force capable d’arrêter l’extrême-droite !

L’attaque au couteau perpétrée jeudi 23 novembre contre de jeunes enfants et une employée de crèche à l’extérieur d’une école primaire du centre-ville de Dublin a horrifié les habitants de tout le pays. Sans le courage des personnes, dont un coursier brésilien, qui ont maîtrisé et désarmé l’agresseur, cette attaque aurait pu être bien pire. Le motif n’est pas encore connu et il serait stupide de spéculer.

Article par Militant Left, l’organisation soeur de la Gauche Révolutionnaire en Irlande, publié le 25 novembre sur www.militant-left.org

L’attaque a été suivie d’une nuit de violence, d’émeutes et de pillages sans précédent à Dublin depuis des décennies. Il est clair que cette violence a été organisée et orchestrée par l’extrême droite et les éléments fascistes qui ont émergé cette année. D’autres ont profité du chaos pour piller les magasins. Après une année au cours de laquelle la Garda (police nationale d’Irlande) a donné carte blanche à ces forces pour mener des actions de harcèlement, d’intimidation et d’attaques physiques, les événements de jeudi marquent une escalade radicale et dangereuse.

Nous présentons nos condoléances à toutes les personnes touchées par cet événement choquant. Le fait que de très jeunes enfants et une employée de crèche aient pu être victimes d’une violence aussi terrifiante a, à juste titre, horrifié les gens. Une jeune fille est toujours hospitalisée dans un état critique. Nous espérons qu’elle se rétablira complètement. Nous sommes également pleinement solidaires de toutes les personnes travaillant dans les crèches qui doivent maintenant ressentir une réelle anxiété à la suite des événements violents de jeudi.

Le mouvement ouvrier doit cependant garder la tête froide à ce stade. Le gouvernement de coalition, dirigé par sa composante Fine Gael, s’efforcera sans aucun doute de lancer une campagne de répression policière et tentera d’adopter une législation plus répressive, telle que la législation rapide sur les « caméras corporelles ». Dans le feu de l’action, ces mesures pourraient bien recueillir un soutien important de la part du public, mais elles ne feront rien pour lutter contre l’extrême droite, pour protéger les réfugiés et les demandeurs d’asile ou pour permettre aux travailleurs migrants et à leurs familles de se sentir plus en sécurité.

La vérité brutale est que l’événement d’hier soir marque le point culminant d’un long processus de normalisation des perspectives de l’extrême-droite. Ceux qui sont descendus dans la rue jeudi à Dublin ne sont qu’un élément d’un processus social beaucoup plus large. Leur violente rhétorique anti-migrants est répétée dans les médias « respectables » ainsi qu’au Dáil (Assemblée d’Irlande) et au Seanad (Sénat). Les médias, qui semblent totalement incapables de comprendre la réalité actuelle, ne parviennent pas à demander des comptes aux hommes politiques – y compris les députés et les sénateurs – qui utilisent un langage et des points de discussion d’extrême-droite et carrément fascistes.

Ce qui s’est passé à Dublin ne manquera pas de renforcer le sentiment croissant de chaos, d’incertitude et de confusion dans la société. L’extrême droite en profitera et progressera grâce à cela. Il n’est pas possible de revenir au consensus confortable d’il y a quelques années. L’extrême-droite et les éléments fascistes sont un facteur politique en Irlande aujourd’hui et cela ne peut être ignoré. Le mouvement ouvrier doit les affronter.

Réponse des syndicats

Les personnes impliquées dans l’émeute de jeudi ne se souciaient manifestement pas de s’en prendre aux travailleurs ordinaires qui faisaient leur travail. Les chauffeurs de Luas (tramway dublinois), les chauffeurs de bus de Dublin, les employés du magasin Arnotts, les ambulanciers et les pompiers ont tous été victimes d’agressions, d’intimidations et de menaces. Les syndicats doivent dire clairement que c’est inacceptable. Les travailleurs doivent immédiatement refuser de travailler si l’extrême droite continue à les prendre pour cible. La question de la grève et des débrayages pour stopper l’extrême-droite doit être posée. L’ICTU devrait appeler à des grèves générales d’une journée en guise de démonstration de force. L’appel de l’ICTU à un rassemblement des travailleurs à Dublin le lundi 27 novembre devrait être élargi à l’ensemble du pays.

Outre l’hostilité quotidienne des capitalistes et de l’État, le mouvement syndical est aujourd’hui confronté à un ennemi croissant et dangereux, l’extrême-droite qui, comme nous l’avons vu jeudi, n’hésite pas à recourir à la violence contre les travailleurs ordinaires. Partout où ces mouvements ont accédé au pouvoir, ils ont toujours attaqué le mouvement syndical et cherché à fermer les syndicats. Ces forces politiques sont également des vecteurs de misogynie et d’attaques contre les droits des femmes, acquis de haute lutte.

De nombreux lieux de travail sont aujourd’hui multiculturels, de nombreux syndicats sont multiculturels et les travailleurs migrants y jouent un rôle important. La plupart des membres des syndicats sont des femmes. Le programme de l’extrême-droite constitue une menace directe pour notre mouvement. L’État a montré cette année qu’il n’était pas disposé à s’attaquer à l’extrême-droite. En cas d’escalade de la violence à l’encontre des travailleurs, des comités de défense des travailleurs organisés devraient être créés. Il existe un précédent dans l’histoire du syndicalisme irlandais : James Connolly a fondé l’Armée citoyenne irlandaise pour défendre les travailleurs de Dublin contre la violence des patrons de cette ville.

Et maintenant ?

Les événements de jeudi marquent une rupture dans la société du Sud, en République d’Irlande. Mais ils s’inscrivent dans un processus européen et mondial plus large. Rien que cette semaine, des candidats d’extrême-droite ont triomphé aux élections en Argentine et aux Pays-Bas. Le capitalisme dégénère. L’extrême-droite se développe partout, car les gens cherchent à échapper à l’oppression écrasante du capitalisme. Des richesses considérables sont créées, mais elles ne profitent qu’à une infime minorité de personnes. La vie continue de se dégrader pour la grande majorité. La planète se réchauffe d’année en année, tandis que les riches font la fête comme s’il n’y avait pas de lendemain. Ces contradictions du capitalisme ouvrent un espace politique à l’extrême-droite et au fascisme pour qu’ils se développent et prospèrent.

Une société organisée selon des principes socialistes garantirait à chacun un logement décent, la possibilité de réaliser pleinement son potentiel, l’accès à des soins de santé gratuits, un emploi décent et bien rémunéré, l’accès à des transports publics de qualité, la possibilité de participer à une société durable et bien plus encore. Les brutes d’extrême droite qui se déchaînent dans les rues sont un symptôme de la décadence du capitalisme. La seule façon de les arrêter est de construire un avenir socialiste.