Brésil : Refusons la politique antisociale, celle de Dilma comme celle de la droite!

manifestation au brésilLe Brésil est secoué par de larges mobilisations tandis que la présidente Dilma Rousseff (Parti des Travailleurs, PT) a vu son taux de popularité chuter au niveau historiquement bas de 8% sous le triple coup de la récession économique et des mesures d’austérité, des révélations dévastatrices du scandale de corruption autour du géant public pétrolier Petrobras dans lequel est impliqué le PT et d’autres partis alliés et d’une sévère crise politique menaçant sa fragile majorité parlementaire.

Le texte ci-dessous est basé sur une déclaration de nos camarades de LSR (Liberdade, Socialismo e Revolução, section brésilienne du Comité pour une Internationale Ouvrière), qui oeuvre au sein du parti large de gauche P-SOL (Partido Socialismo e Liberdade).

Construisons une alternative de gauche pour et par la classe des travailleurs!

L’actuelle crise économique, sociale et politique qui sévit au Brésil est très grave. Le modèle qui a soutenu les intérêts de la classe dominante brésilienne au cours des douze ans de gouvernement du (Parti des travailleurs) montre son vrai visage.

La droite et le PT n’ont rien à offrir qui n’a pas déjà été tenté par la présidente Dilma Rousseff: des coupes budgétaires, des attaques contre les manifestations et une répression massive. La corruption du PT, illustrée par les récents scandales, n’est pas neuve et suit l’exemple des gouvernements du PSDB (droite officielle) au gouvernement fédéral et dans les divers Etats du pays. Le PT, même sur ce point, ne représente pas d’alternative.

Les banques et les grandes entreprises utilisent l’occasion de la crise économique pour restructurer, abaisser les salaires et refuser aux travailleurs des droits qu’ils ont acquis. L’aide du gouvernement leur est notamment assurée pour abaisser les salaires par le biais du « programme de protection de l’emploi » (quelle ironie). Les capitalistes ont utilisé le PT plus d’une décennie durant afin d’obtenir une relative stabilité sociale et, alors que sa politique leur a permis de se remplir les poches comme jamais auparavant, ils menacent à présent de jeter l’éponge sur ce gouvernement.

La réaction du gouvernement du PT n’aurait pu être pire. La présidente Dilma s’est efforcée de montrer par tous les moyens aux riches à quel point elle pouvait encore leur servir, pour finir le sale boulot de contre-réformes fiscales, de révision antisociale du droit au travail ou encore de privatisations d’entreprises. Pendant ce temps, chaque jour qui passe est marqué par une nouvelle répression anti-populaire en défense des plus nantis. Le prétendu « agenda du brésil », un accord conclu entre le gouvernement de Dilma, son ministre Joaquim Levy et le président du sénat Renan Calheiros (PMDB), représente un pas de plus dans le gigantesque détricotage des droits des travailleurs. La politique actuelle ne bénéficie qu’au grand capital.

En plus de cela s’ajoute encore la « libéralisation générale » de l’élevage intensif, l’intrusion dans les territoires indigènes et dans des zones normalement protégées au grand bénéfice des grandes entreprises agraires, etc. Le gouvernement veut aussi appliquer de nouvelles coupes budgétaires contre le soi-disant « gâchis social ». D’autre part, il existe divers programmes visant à s’attaquer au système universel de soins de santé.

Pour empirer les choses, le congrès vient de voter, avec l’appui du gouvernement et du PT, une loi « anti-terroriste » qui sera utilisée pour menacer et réprimer les manifestations populaires et les luttes des travailleurs contre ces avalanches d’attaques antisociales.

Finalement, Dilma a offert aux banquiers et aux grandes entreprises la tête des travailleurs en échange de son maintien à la présidence à la république. Mais, même ainsi, ses chances de succès sont incertaines. La coalition gouvernementale ne va pas nécessairement continuer à la soutenir. Le grand capital veut stabiliser la situation au nom de l’application de mesures destinées à soutenir l’économie. Si Dilma n’y parvient pas, la bourgeoisie a déjà des plans alternatifs de prévu.

Les mobilisations de la droite contre Dilma, particulièrement celle du 16 août, peuvent créer de nouveaux éléments à tenir en compte dans cette situation. Ces manifestations étant dirigées par des secteurs réactionnaires qui n’ont rien à apporter aux travailleurs et au peuple, Dilma pourrait alors gagner l’appui des travailleurs contre le danger de la droite. La grande bourgeoisie semble préférer que ces mobilisations soient contrôlées, capables de maintenir Dilma sur la défensive sans nécessairement la déranger véritablement. Mais les capitalistes ne contrôlent pas totalement la situation et le gouvernement Dilma peut être poussé vers la sortie.

Le gouvernement Dilma et sa présidence ne peuvent toutefois pas voir leur survie garantie par une mobilisation des travailleurs. Cette chimère de quelques gouverneurs nostalgiques d’une autre époque ne peut être qu’une illusion réactionnaire. Le gouvernement du PT est payé la position qui est la sienne au prix de nombreuses trahisons des travailleurs. Les conditions de vie de la population ont empiré avec l’augmentation du chômage, des prix et des services ; la détérioration des services publics ;… Le mépris des travailleurs ne fait que grandir contre le gouvernement.

C’est pourquoi la rhétorique du gouvernement contre la politique réactionnaire que représentent des figures de l’opposition comme Eduardo Cunha et Aecio Neves (droite officielle) et leurs machinations antidémocratiques contre le gouvernement ne représente pas la meilleure base pour être reconduits et élus. La défense du gouvernement Dilma alimente justement la droite réactionnaire tout en distillant la confusion parmi les couches populaires.

La seule option véritable au bénéfice des travailleurs et des pauvres repose sur la capacité de réaction de ces couches de la population qui ont subi ces attaques de la politique de droite. Cette alternative émergera des rues, des quartiers, des usines, les hôpitaux et des campagnes. Les travailleurs et la jeunesse ont un seul chemin à prendre : celui de la lutte contre ce gouvernement, le congrès et tous les niveaux de pouvoir qui veulent aider le grand capital à se remplir les poches sur le dos de la classe des travailleurs.

De nombreuses de catégories de travailleurs sont déjà entrés en conflit ouvert ou se préparent à le faire : dans le secteur public et parmi les bastions ouvriers (métallurgie, pétrole, etc.). Mais devant la gravité de la situation, cette lutte ne peut être menée de manière fragmentée et désordonnée, comme ce fut le cas jusqu’ici. Elle nécessite d’être unitaire et construite à partir de la base pour représenter une alternative globale contre la crise qui part du point de vue des travailleurs.

L’organisation d’une grève générale destinée à lutter contre les attaques antisociales et à garantir les revendications des travailleurs continue d’être une ligne de conduite nécessaire. Dans cet objectif, il nous faut construire une plus ample unité d’action entre tous les mouvements sociaux. Ce processus de lutte peut aussi servir à développer une alternative politique véritablement de gauche qui doit se matérialiser en un front de gauche de tous les travailleurs, un front social et politique armé d’un programme anticapitaliste et socialiste. Le PSOL, le PSTU, le PCB, le MTST, la CSP-Conlutas,… doivent être unis et rassembler les forces nécessaire à la constitution d’une alternative politique combattive.

Ils doivent défendre un programme qui fait payer la crise aux responsables: la bourgeoisie. Ce programme doit refuser le payement de la dette publique aux grands capitalistes et la nationalisation du secteur financier sous contrôle et gestion démocratiques des travailleurs. Il doit défendre la nécessité de nationalisation les entreprises privées des secteurs stratégiques de l’économie pour assurer une libération tant économique que sociale.

Les manifestations appelées pour le 20 août, principalement à l’initiative du MTST, avec le soutien du PSOL, partent de la nécessité de répondre fermement aux actions de la droite dont sa manifestation du 16 sans pour autant laisser le gouvernement de Dilma indemne. Cette manifestation doit clairement se positionner contre les politiques du gouvernement Dilma et contre la droite officielle d’Eduardo Cunha et son programme réactionnaire tout en proposant une politique de gauche comme base d’une lutte populaire. La manifestation du 20 août pourrait contribuer à construire l’unité d’action qui est nécessaire pour contrer les attaques antisociales.

Le fait que même certaines organisations alliées au gouvernement (CUT, UNE, MST) doivent participer à une manifestation qui critique durement les politiques de Dilma reflète la crise à la base de ces mouvement en relation avec leur attitude face au gouvernement. Le fait que le PCB (parti communiste du Brésil, qui a une politique d’alliance avec le PT) ait tenté de retirer son nom de la liste des participants à cette manifestation n’est pas secondaire.

A présent, une partie des organisations qui soutiennent le gouvernement tentent consciemment de donner à la mobilisation du 20 août un caractère de défense du gouvernement contre la « machination » de la droite officielle. Dans diverses régions du pays (Rio de Janeiro, Salvador, Fortaleza, etc.), elles ont mis à la poubelle l’invitation à la manifestation nationale du 20 août pour organiser leurs propres rassemblements. Cela a provoqué une division et même quasiment la désintégration des manifestations à venir. La direction du CUT, du CTB, de l’UNE et d’autres entités pro-gouvernementales essayent de limiter le caractère combatif et indépendant du 20 août. Pendant ce temps, Dilma et la droite approfondissent leurs attaques au Congrès.

Des mouvements sociaux et des gouvernements locaux aident le gouvernement national de l’intérieur ou de l’extérieur au gouvernement. Mais, cette position est insupportable. Aucune raison ne justifie de s’appuyer sur la ligne gouvernementale. Les partis de gauche qui essayent lutter contre les attaques de Dilma tout en essayant de défendre l’unité avec la droite au congrès vendent les intérêts des travailleurs et creusent leur propre tombe.

Nous luttons – avec le MTST et d’autres force de gauche – pour assurer que le 20 août soit, dans tout le pays, un rassemblement contre le gouvernement et la droite et non une tentative de défendre l’indéfendable, c’est-à-dire le gouvernement Dilma. Si cela se produit tout de même, nous dénoncerons cette approche et continuerons à lutter pour donner une expression à la riposte contre les attaques du gouvernement.