Un emploi pour tous !

La persistance du chômage pour plusieurs millions de personnes a fait de l’emploi une question primordiale. Pour beaucoup, c’est même vital, les aides sociales minimales comme le RMI ne permettant même pas de survivre. Un emploi c’est aussi un statut social. « Le droit au travail est le seul droit sérieux que l’ouvrier ait dans une société fondée sur l’exploitation. Cependant ce droit lui est enlevé à chaque instant. » (Trotsky, programme de transition). Nombreux sont les chômeurs de longue durée qui sombrent dans un pessimisme complet se sentent complètement « déclassés » ou inutiles.

Article paru dans l’Egalité n°87

Les travailleurs victimes des actuels plans de licenciement apprécieront. Après des dizaines d’années dans leur entreprise, les voilà jetés du jour au lendemain car le taux de profit n’est pas satisfaisant pour les actionnaires. Car à peu d’exceptions près tout licenciement est économique. Que le patron licencie pour cesser une activité insuffisamment rentable ou pour continuer cette activité dans une région où il pourra payer des salaires moindres, sa seule préoccupation est de toutes façons son taux de profit : quand la flexibilité, les bas salaires ou la précarité ne suffisent plus c’est aux licenciements qu’on a recourt.

C’est directement ce qui explique la valse des emplois dans certains secteurs : le patronat rêve d’une main d’œuvre si flexible qu’il pourrait à la minute prêt l’employer ou non, la payer ou non. Dans de nombreux secteurs des embauches massives se voient rapidement suivies de débauches tout aussi massives. Dans les nouvelles technologies (NT), la période de développement des sites internet, par exemple, a vu des dizaines de milliers d’emplois hautement qualifiés se créer. Travaillant souvent 10 à 12 heures par jour, ces travailleurs se voient débauchés en masse aujourd’hui que le travail de conception est terminé.

Et le mythe du plein emploi qu’amènerait les NT et qu’ont savamment entretenu les gouvernements et le patronat se révèle comme ce qu’il est : un mensonge de plus pour endormir la méfiance des travailleurs… De plus, cette gestion directement liée aux besoins immédiats provoque de manière chronique des désorganisations de la production : une main d’œuvre formée n’est pas toujours disponible au moment exigé. On se rappelle l’incapacité d’EDF à rétablir rapidement l’électricité lors de la grande tempête de 1999 : le nombre de techniciens ayant été réduit à un strict besoin de maintenance quotidienne du réseau. EDF a été obligé de sous-traiter une partie des opérations et le manque de travailleurs à même d’effectuer ces réparations resta criant.

Le chômage est un moyen de pression

Le Capitalisme se sert du chômage de masse comme moyen de pression sur les travailleurs pour leur faire accepter les plus mauvaises conditions de travail possible. Face à cela c’est par sa capacité à répondre collectivement que la classe ouvrière peut résister. En luttant aux cotés de ceux qui sont menacés de licenciements et dans la perspective de retirer au patronat ce contrôle qu’il a sur l’emploi, la seule façon d’en finir avec le chômage de masse, c’est la répartition du travail entre tous. La constante évolution des techniques de production fait qu’une heure de travail produit de plus en plus : là où des dizaines de personnes étaient nécessaires, quelques travailleurs suffisent aujourd’hui. Répartir le travail entre tous permet, en réduisant le temps de travail, de faire de cette évolution des techniques non pas une destruction du travail mais une amélioration des conditions dans lesquelles il est effectué. C’est pour cela que contre la loi Aubry qui n’instaure les 35 h que pour mieux rationaliser le travail du strict point de vue des patrons et de leur course au profit, il faut revendiquer une véritable réduction du temps de travail sans flexibilité ni perte de salaire avec embauches équivalentes à cette réduction et ce jusqu’à disparition du chômage. C’est également dans cette optique que tous les emplois précaires doivent être transformés en emploi stables et statutaires. De même, la retraite à 55 ans pour tous, chaque départ étant compensé par une embauche.

Cela implique bien évidemment un degré de mobilisation et de combativité qui semble lointain aujourd’hui où les plans de licenciements se succèdent sans qu’on réussisse à les enrayer. Mais une lutte défensive peut se transformer en lutte offensive si elle se dote des bons objectifs et des bons mots d’ordre. Les directions des syndicats, le gouvernement de la Gauche plurielle etc. sont bien évidemment opposés à de tels mots d’ordre. Les travailleurs n’ont donc qu’à compter sur eux-même. Si le patronat refuse d’appliquer ces mesures, la réquisition des entreprises par les travailleurs organisés en comités démocratiquement élus permettra de le faire. Lorsque les salariés de LU ont commencé à occuper leur usine à l’annonce du plan de licenciement, ils auraient pu reprendre la production et ainsi s’affranchir de la domination du Capital, et montrer la seule voie possible pour empêcher les licenciements. De même, le contrôle sur l’embauche par les travailleurs au moyen de leurs syndicats (qui devraient redevenir réellement démocratiques) comme le mouvement ouvrier a longtemps essayé de le faire au moyen des bourses du travail serait un moyen d’imposer ces mesures.

Le droit à un travail et une existence digne pour tous est incompatible avec les appétits des capitalistes. Le patronat ne peut se passer des travailleurs, qui sont les seuls à réellement produire des richesses. Interdire les licenciements, c’est se débarrasser de ces parasites et mettre le travail au service de la société toute entière.

Par Alex Rouillard