Perspectives et moyens d’action pour interdire les licenciements, Quelques propositions

Le 21 avril dernier le PCF appelait, sans chercher à y associer qui que ce soit, à manifester contre les licenciements « économiques » à Calais où l’usine LU-Danone est vouée selon les termes du plan de la direction à fermer. Alors que l’urgence est là, on ne peut que déplorer la façon dont cette manifestation a été préparée, tout autant que la participation timorée de certaines organisations voire le refus de la direction nationale de la CGT de venir à Calais. Aujourd’hui, la lutte contre les licenciements demande l’unité, et le seul intérêt que devrait avoir à défendre une organisation ouvrière est celui de la classe ouvrière.

Article paru dans l’Egalité n°87

Nombreuses sont les sections locales du PCF qui exprimaient leur colère face aux gesticulations de Hue qui parade le samedi mais qui reste au gouvernement le reste de la semaine. Certaines avançaient même des mots d’ordre comme la nationalisation des groupes qui licencient.

A Calais, Robert Hue, secrétaire national du PCF a bien parlé d’interdire les licenciements mais « dans les entreprises qui font des bénéfices », ce qui est également la position de nombreuses organisations : Verts, LCR… Souvent, cette revendication s’articule avec celle d’une loi qui interdirait ces licenciements dits « économiques ».

Sur la question des bénéfices, il suffit à une entreprise de modifier sa comptabilité pour avoir l’air déficitaire. Un groupe comme Marks & Spencer peut se clamer déficitaire dans certains pays, son PDG touche quand même 6 millions de francs par an de salaire, plus de 20 millions de francs d’avantages, et a un portefeuille d’actions de plus de 100 millions. De quoi payer de nombreux salariés qui eux au moins travaillent vraiment. L’interdiction des licenciements, c’est dans toutes les entreprises !

L’interdiction des licenciements, un mot d’ordre pour la lutte

Poser la question d’une loi n’est pas mauvaise en soit. C’est une mesure qu’un véritable gouvernement en faveur des travailleurs devrait prendre. Or, la Gauche plurielle a depuis longtemps prouvé qu’elle était beaucoup plus sensible aux intérêts des patrons qu’à ceux des travailleurs. Faire de l’interdiction des licenciements une revendication en terme de loi ne servira qu’à démontrer cela mais pas à armer les travailleurs en lutte. Qui plus est, une loi met toujours plus de 6 mois a être appliquée et elle ne peut être rétroactive, sauf modification constitutionnelle. Le conseil constitutionnel invaliderait cette loi sous prétexte que le gouvernement n’a pas à légiférer dans ce domaine. Dans le cas des licenciements en cours, ce mot d’ordre est inopérant et ne sert, bien que cela ait son importance, qu’à démontrer une fois de plus que Jospin et cie sont du coté des patrons.

Pourtant lorsque les plans de licenciements ont été annoncés, plusieurs usines ont été occupées. Si le mouvement avait reçu le soutien dont il avait besoin, cela aurait certainement permis aux travailleurs de construire un rapport de force bien plus menaçant face à leurs patrons. L’interdiction des licenciements, c’est par les luttes et les grèves que nous l’imposerons. Et à défaut, cela permettra aux salariés de vendre bien plus chèrement leur peau.

La manifestation du 9 juin, un levier pour la lutte

En initiant une réunion unitaire pour une manifestation nationale pour l’interdiction des licenciements les salariés de LU Ris-Orangis, AOM-Air Liberté et Marks & Spencer offrent de véritables perspectives. En s’adressant à l’ensemble des organisations en faveur de ce mot d’ordre, qu’elles soient politiques, associatives ou syndicales, ils montrent que ce combat est celui de tous. Dans la préparation de cette manifestation des réunions unitaires ont pu se mettre en place par endroit, bien que souvent le PCF reste dans son coin, et que les directions nationales de nombreux syndicats ont refusé de participer. Cela ne doit pas nous arrêter. Ces réunions unitaires doivent tout faire pour que le 09 juin soit une réussite et unir tout ceux qui s’opposent aux licenciements. Mais également, il faut éviter que la manifestation nationale soit une fin en soi. Ce n’est pas elle qui arrêtera les licenciements mais une mobilisation continue.

Un axe pourrait être de continuer ces réunions unitaires pour avancer vers des comités de lutte contre les licenciements, un réseau de solidarité que fédérerait les réunions initiées par les salariés de LU, AOM, Marks & Spencer… En s’adressant à l’ensemble de la population, en parlant des suppressions de poste dans les services publics, en trouvant des axes qui permettent à tous ceux qui subissent la politique ultralibérale de se battre ensemble (salaires, retraites…) de tels comités seraient un levier pour la riposte. Et dans le cas d’une journée de grève interprofessionnelle contre les licenciements, ils pourraient en être les relais et un premier pas vers une véritable remise en cause des attaques gouvernementales et patronales.

Par Aissata Konté et Alex Rouillard