Où va la gauche après la victoire du 29 mai ?

La plupart des partis de gauche n’en pouvait plus d’enthousiasme au lendemain de la victoire du non au référendum sur la constitution européenne. On avait le droit aux adjectifs les plus démesurés : « victoire historique », « vote d’espoir »…

Article paru dans l’Egalité n°114

Et c’est sûr qu’il y avait de quoi se réjouir, non seulement le vote Non représente un cinglant désaveu des partis politiques dirigeants (UMP, UDF et PS), un rejet d’une « constitution européenne » néolibérale, mais en plus le vote non a été un vote de classe rassemblant les travailleurs, les jeunes, les chômeurs etc (seuls les catégories gagnant plus de 3000 euros par mois ont voté majoritairement pour le traité).

Les ténors de la gauche gouvernementale tremblent, ils craignent d’être de nouveau minoritaires (comme en 2002) mais cette fois-ci avec quelqu’un les doublant sur leur gauche. Alors, les Hollande-Aubry-Strauss Khan bloquent les prétendants comme Fabius. Ce même Fabius, Emmanuelli ou Montebourg… s’agitent pour ne pas laisser le terrain au PCF, à la LCR et à la nébuleuse alter mondialiste. Ces derniers multiplient les réunions pour discuter de l’alternative… sans pour autant tout focaliser sur les présidentielles de 2007, nous jurent-ils. Le point commun de toutes ces discussions ? C’est l’absence justement de discussion sur comment organiser les luttes contre les prochaines mesures du gouvernement. Certes il y est fait référence ici ou là, mais pas de proposition de grève, de journée d’action…

Du côté du PS, rien avant 2007 ?

De la part des ténors du PS, quels qu’ils soient, on était habitué. Quand ils nous parlent de luttes, ces gens pensent à l’Assemblée nationale, aux prochaines élections… Le PS nous dit, sans rire, qu’ils vont travailler à un programme, autrement dit qu’ils n’en n’ont pas.

Fabius met en garde contre une politique qui couperait le PS des altermondialistes d’Attac ou autre, et du PCF, et peut être même de la LCR qu’il ne nomme pas mais dont il reprend la caractérisation formulée par d’autres dirigeants du PS: « Si on pense vraiment que ses propres alliés sont des passéistes, des populistes, voire des xénophobes, alors avec qui bâtira-t-on le rassemblement? ».

Et lui, il dit avoir un programme : « un emploi, un logement, un savoir », des « rattrapages salariaux dans le public comme dans le privé » etc. En gros, le programme de Jospin en 1997, celui là même qui avait par ailleurs dans ce même programme les lois Aubry qui ont introduit une flexibilité accrue pour les travailleurs. Et Fabius ne dit jamais comment il financera cela. En termes clairs, cela s’appelle de la poudre aux yeux.

Du coté du PCF, de la LCR et d’autres opposants du PS…

A Arles, le 3 juillet, Mélenchon, Buffet, Besancenot et autres dirigeants du non de gauche se sont retrouvés pour discuter des « perspectives » et du « projet » après la victoire du Non. Besancenot de la LCR, a même déclaré : « je pense sincèrement qu’on peut continuer à avancer sur le contenu positif d’une politique anticapitaliste, voir jusqu’où on peut aller ensemble ».

La démarche n’est pas en soit illégitime, tout dépend du contenu qu’on y met. Et si on se réfère aux projets de Mélenchon ou du PCF, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils brillent par leur absence toute perspective authentiquement socialiste, toute référence aux luttes des travailleurs contre les patrons, toute condamnation de la gestion du capitalisme par les précédents gouvernement de gauche (il faut dire que Mélenchon et Buffet y étaient ministres…).

On pourrait s’attendre à plus de virulence de la part d’une organisation qui s’intitule Ligue communiste révolutionnaire. Mais, que ce soit dans ce genre de réunions, ou dans celle réunissant les représentants des collectifs pour le Non de gauche le 25 juin à Nanterre, elle déclare (et les différents points de vue publiés dans Rouge disent tous les trois la même chose) : que les collectifs pour le Non sont un cadre unitaire, qu’ils doivent permettre de tout discuter, depuis les luttes jusqu’aux élections, ces dernières pouvant déboucher sur des candidats communs.

Quelques revendications, quelques mots comme « mobilisation » ou « rompre avec le capitalisme » mais rien de plus précis. A moins que les bureaucrates du PCF, de certains syndicats aient réellement changé de nature, la LCR se trompe ou trompe ses militants. On peut avoir des discussions et des initiatives communes avec de telles forces mais à condition de proposer un véritable programme de lutte pour le socialisme et ainsi permettre aux travailleurs de voir quels sont ceux qui sont les plus conséquents, les plus prêts à lutter réellement pour en finir avec l’exploitation et la politique du gouvernement.

Nous participerons aux différents débats qui se tiendront à la rentrée mais nous réaffirmerons que seule l’organisation d’une lutte d’ensemble des travailleurs, des jeunes et des chômeurs peut stopper le gouvernement, et que cette lutte devra, pour commencer, prendre la forme d’une journée nationale de grève sur les salaires, les embauches, contre les privatisation, les licenciements et les attaques du gouvernement.

Ce qui manque aujourd’hui, c’est un authentique parti de combat pour les travailleurs et les jeunes, contre le gouvernement et les patrons, pour une véritable alternative socialiste au capitalisme. Nous ne prétendons pas réussir seuls à construire un tel parti, mais pour le faire il faut déjà ne pas entretenir d’illusions sur une nouvelle alliance de gauche dont le programme serait insuffisant pour s’attaquer au capitalisme.