L’UE est-elle transformable ?

Dessin de Fanch à retrouver sur son blog : http://blog.fanch-bd.com
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Depuis l’adoption du traité de Maastricht en 1992, la « construction européenne » s’est accélérée. Et surtout, elle a pris un tour plus agressif contre les acquis des travailleurs dans chaque pays. Dans les années 90, les résistances des travailleurs contre les plans de casse des services publics et de la protection sociale ralentissaient l’offensive des gouvernements. L’Union Européenne devait devenir un outil pour accélérer le rythme des privatisations, libéralisations (de l’eau, de la mer, du réseau ferré, ou du ciel), et maintenant de plus en plus des conventions collectives et du droit du travail de chaque pays. Le «projet européen » n’a jamais été social, quoiqu’en disent les bonimenteurs de droite ou de gauche. Les partis qui ont toujours été pour les différents traités européens (PS et EELV, UMP et centristes) essaient par mille contorsions de nous expliquer que l’Union européenne est un acquis. Pourtant, mis à part le fait que pour traverser une frontière on ne perd plus de temps en formalités administratives stupides, ils seraient bien incapables de nous trouver un «acquis» pour les travailleurs et la population qui soit dû à l’UE. Les subventions aux régions défavorisées, les programmes d’échange étudiants ? Autant de choses qui existeraient sans avoir besoin de cette Europe des banquiers et des patrons.

Une machine de guerre contre le social

L’UE, c’est un accord de brigandage contre les travailleurs d’Europe, une zone de libre échange, de dumping social généralisé, et de coordinations des politiques néo libérales. C’est un accord pour détruire les services publics et le monopole qu’ils exerçaient et qui permettait de mettre en place toute une série de législations sociales aidant les plus faibles. Et la destruction de ces monopoles de service public sont désormais remplacés par des monopoles privés, ou des trusts de quelques grandes entreprises en situation de monopole. Il est toujours amusant de constater que la commission européenne ne conteste jamais la situation de monopole dans laquelle sont les compagnies qui possèdent les péages autoroutiers et qui ont des concessions d’exploitation pour 30 ans ou plus. Pas plus d’ailleurs que la situation de monopole dans laquelle se trouve le trust des Telecom avec le trio (et bientôt duo) SFR, Bouygues et Orange. Par contre, les directives de l’UE ont été un moyen de s’attaquer au tarif social de l’électricité, au monopole de service public dans les transport en commun etc.

La Commission européenne, c’est une administration de conciliation des intérêts des classes possédantes des différents pays, qui y trouvent là un moyen de s’affronter et de s’accorder, procédant littéralement à du troc. On veut bien déréguler tel secteur mais si vous nous laissez continuer à subventionner tel autre. L’intérêt des populations, leur santé, leurs conditions de vie ou de travail -quand on en a car il y a 26 millions de chômeurs officiels dans l’UE- n’entre pas en ligne de compte. Ce qui est en vogue depuis quelques années, c’est de pouvoir utiliser les législations sociales de certains pays dans d’autres dès qu’elles sont plus défavorables aux travailleurs. Actuellement, le transport routier est dans le viseur. La circulaire sur le «cabotage» bien qu’encore repoussée, permettra d’embaucher aux conditions salariales de pays à bas salaires des routiers pour effectuer des transports de petits trajets à l’autre bout de l’Europe. L’UE n’est pas un Etat, et elle n’est pas une fédération non plus. Aucune de ses directives n’estune loi, et tout au plus, les Etats doivent s’acquitter d’amendes s’ils ne les appliquent pas. L’UE est un acquis pour les banques, le grand patronat et les groupes d’actionnaires qui peuvent piller les économies des pays les plus faibles, se coordonner pour se partager le gâteau des privatisations. On a vu ainsi avec quel cynisme les grandes banques françaises et allemandes ont pillé les finances grecques et mis à genoux le pays en exigeant des intérêts gigantesques sur les dettes, pour ensuite exiger des travailleurs de leur propre pays qu’ils payent eux aussi pour les errements financiers que ces méthodes entraînaient.

Cette Europe là n’est pas la nôtre, pour une Europe des luttes et des travailleurs

On ne peut pas changer progressivement l’UE et d’ailleurs, les partis qui défendent cela sont bien
incapables d’expliquer par quel miracle les bourgeoisies européennes qui avec l’UE ont un formidable instrument de coordination de leurs politiques se le laisseraient retirer des mains sans rien dire. Malheureusement, c’est la ligne du Front de Gauche ou encore de la plupart des syndicats qui disent à qui veut l’entendre qu’il faut réorienter l’UE, la démocratiser… Les bourgeoisies et le grand patronat sont un peu moins stupides : quand une directive (c’est quand même rare) ou une résolution ne leur convient pas, ils la refusent. Ainsi, l’UE n’aura jamais à l’échelle de tous ses pays membres, de salaire minimum européen, ni de retour aux monopoles de service public, ou autre législation sociale. Dès lors, pourquoi s’acharner à croire et du coup à faire croire que quelque chose peut changer en passant par l’UE ? L’UE étant un outil aux mains des classes possédantes, il s’agit de le briser et de combattre le bras qui le tient. Ce bras, ce sont les gouvernements, les Etats, qui se concertent et se coordonnent pour trouver un point d’accord grâce à L’UE.
Ce sont nos luttes tant locales que nationales qui seront fondamentales dans ce combat et il manque aujourd’hui une véritable initiative politique et sociale qui développe un programme résolument internationaliste et en même temps anticapitaliste.
Nous sommes pour une Europe socialiste et démocratique dans laquelle chaque nation verra ses droits garantis, et où les formidables ressources naturelles et industrielles seront utilisées en commun pour la satisfaction des besoins de tous et toutes.

Par Alexandre Rouillard