L’année 1983 a été marquée par plusieurs dizaines de meurtres et agressions racistes, ainsi que des affrontements fréquents entre la police et des jeunes de quartiers HLM. En réaction, des jeunes des Minguettes près de Lyon, pour beaucoup maghrébins ont rallié à l’automne 83 Marseille à Paris en une marche « pour l’égalité et contre le racisme ». Ils l’ont fait pour mettre fin aux discriminations et aux injustices dont ils étaient victimes et pas seulement celles basées sur le racisme, exigeant également un emploi, un logement etc. Parti à une trentaine, c’est près de 100 000 manifestants qui les accueilleront le 3 décembre 1983 et Mitterrand fut forcé d’accorder la carte de résidant de 10 ans pour les travailleurs étrangers contre une carte d’un an avant qui les laissait sans cesse dans la précarité.
Article publié dans L’Egalité n° 164, par Jacques Capet
Cette marche changea radicalement la situation. L’antiracisme devint une question centrale et des dizaines de milliers de jeunes s’engagèrent dans ce combat, multipliant actions et manifestations. La gauche, bousculée par ce mouvement a néanmoins tenté de le récupérer et de temporiser. Au moment où germait l’idée de la Marche, Mitterrand exigeait que la TV nationale accueille Le Pen comme un interlocuteur valable et son 1er Ministre Pierre Mauroy dénonçait le caractère religieux des revendications des grévistes maghrébins de Poissy. Pour brouiller les pistes, le PS créait SOS racisme qui évacue la dimension sociale de la Marche pour confiner l’antiracisme sur le plan moral.
Mais même cela témoignait d’une politisation de la situation. Les manifestations en réaction à des meurtres racistes, les premières luttes importantes de Sans-Papiers et contre les lois racistes de Pasqua ont été facilitées par l’ambiance qu’avait créée la marche contre le racisme et pour l’Egalité.
L’Egalité est un combat Les gouvernements, y compris PS, malgré les promesses de Mitterrand et Hollande, ne veulent pas vraiment donner le droit de vote aux étrangers non-ressortissants de l’Union Européenne, et ils ne font rien pour faire disparaître les discriminations dont sont victimes leurs enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants pourtant citoyens français. Sous l’étiquette « diversité », tout juste acceptent-t- ils que les classes moyennes et les classes dirigeantes accueillent une élite « issue de l’immigration ».Dans un contexte de chômage de masse, la méfiance et la haine s’emparent vite des victimes du système capitaliste, non contre les bourgeois profiteurs, mais contre les autres exploités. Ce n’est peut-être pas une marche comme celle de 1983 qui est possible aujourd’hui, mais une des leçons est de faire comme eux : se lever et lutter, travailleurs, jeunes, chômeurs, hommes ou femmes quelque soient nos cultures et nos origines