Le 1er tour des élections législatives a vu les bons scores de l’alliance de gauche, NUPES et a confirmé celui de Mélenchon à l’élection présidentielle d’avril dernier, où il avait recueilli 7,7 millions de voix.
Il avait mené campagne sur un programme qui reprenait les aspirations des travailleurs et de la population, que ce soit en exigeant la hausse de salaires et des revenus à 1500€ mini, la retraite à 60 ans, la défense des services publics et l’augmentation des impôts sur les riches et les multinationales pour financer cela…
La presse capitaliste se déchaîne depuis des semaines contre ces mesures, qu’elle trouve évidemment « irréalistes », « dangereuses » pour… les capitalistes et les multinationales. La palme de la peur en revient au prétendu « spécialiste de l’économie » sur BFM TV, qui dit « en cas de blocage des prix, il y aura pénurie… Un boulanger ne fera plus de baguettes mais seulement des pains spéciaux ».
La coalition de Macron (Ensemble !), la droite de Les Républicains, et l’extrême droite (RN de Le Pen et Reconquête de Zemmour), tous se sont trouvés hantés par un spectre commun : la possible victoire d’une coalition de gauche qui montre aux travailleurs, aux jeunes… qu’il n’y a pas de fatalité à subir les politiques antisociales.
C’est ainsi que le score de la NUPES atteint presque les 6 millions de voix malgré une abstention très forte (52%), notamment dans les petites villes ouvrières et les quartiers populaires. La NUPES fait jeu égal avec Macron qui est en net recul par rapport à 2017. Sa coalition, Ensemble, qui réunit LaRem, le Modem et autres divers centre, reçoit 5,8 millions de voix contre 7,5 millions pour ces mêmes partis en 2017.
C’est un premier encouragement. Il est tout à fait possible, en élisant un maximum de député-e-s NUPES le 19 juin prochain, d’empêcher Macron d’avoir une majorité à l’Assemblée Nationale, ce qui serait un véritable échec pour le président des riches.
Il est tout à fait possible, en élisant un maximum de député-e-s NUPES le 19 juin prochain, d’empêcher Macron d’avoir une majorité à l’Assemblée Nationale, ce qui serait un véritable échec pour le président des riches.
La NUPES, une campagne militante
Les candidat-e-s de la NUPES sont ainsi au second tour dans 406 circonscriptions. Dans 278 circonscriptions, le second tour les verra affronter un-e candidat-e d’Ensemble,. Dans 63, ils et elles seront contre le RN ; dans 29, face à la droite LR. La NUPES est donc, dans 370 circonscriptions, la force d’opposition aux partis pro-capitalistes, de Macron à l’extrême droite. Même si certains de ses candidats restent très discrets dans leur soutien aux mesures essentielles de la NUPES sur les salaires ou les retraites, il est clair que tout faire pour que la NUPES gagne dans ces circonscriptions est un pas essentiel pour mettre en avant les intérêts des travailleurs-ses et de la vaste majorité de la population.
Pour autant, ces résultats sont très inégaux. Les bons scores de la NUPES se font souvent là où les groupes insoumis se sont maintenus, ou encore lorsque des militant-e-s PCF ou EELV ont mené campagne. Comme nous l’analysions déjà pour l’élection présidentielle (lire notre analyse : Très fort score pour Mélenchon (21,95%) face à Macron et Le Pen aux présidentielles – La possibilité d’un nouveau parti de masse des travailleurs-es et de la jeunesse pour lutter contre les politiques au service des ultrariches devient réelle !), là où il n’y a pas eu de maintien de groupes de militant-e-s, par absence de vraie structuration de la France Insoumise, il a été difficile de rattraper le retard. Cela confirme malheureusement ce que nous disions déjà en 2017, à savoir qu’il est impératif que la FI se structure, tant localement que régionalement et nationalement, de manière collective et démocratique.
Cela sera encore plus indispensable une fois les élections passées, selon que la NUPES obtienne une majorité à l’Assemblée (et donc forme le gouvernement) ou qu’elle soit la première force d’opposition à Macron avec 150 à 200 député-es.
D’une part, cette campagne législative a vu des milliers de jeunes et de travailleurs s’investir en soutien à la NUPES, apprendre le porte-à-porte, les discussions pour convaincre du programme et des revendications. Cela a montré une certaine énergie militante qui va demander à se concrétiser et ne voudra pas rester passive dans les prochains mois. D’autre part, il s’en trouve aussi des milliers parmi les 6 millions de votants qui s’engageront plus si la FI se transforme en force politique structurée, capable de discuter, de décider, et ainsi, patiemment, se réapproprier la défense de nos intérêts.
Beaucoup voient bien aussi que la séquence électorale n’est qu’un premier pas et qu’elle ne sera pas suffisante pour changer durablement les choses. Les capitalistes, les multinationales, les politiciens bourgeois et les médias vont tout faire pour bloquer les actions parlementaires d’un gouvernement NUPES. Et Macron maintiendra sa politique même avec une forte opposition de la NUPES contre lui.
Il nous faut donc préparer une lutte de masse, s’organiser pour la construire, et ainsi obtenir l’application de nos revendications sur les salaires, les retraites ou les services publics.
Il nous faut donc préparer une lutte de masse, s’organiser pour la construire, et ainsi obtenir l’application de nos revendications sur les salaires, les retraites ou les services publics.
C’est un véritable nouveau parti de masse et de lutte, des travailleurs et de la jeunesse, contre le capitalisme, qu’il faut construire dans la prochaine période. Un tel parti permettrait également de discuter ensemble de la véritable alternative dont nous avons besoin pour remplacer le capitalisme. On ne pourra pas se contenter de quelques nationalisations, bien qu’elles soient indispensables, notamment dans le secteur de la Santé ou de l’Energie. Il faudra un plan pour mettre en propriété publique les principaux secteurs de l’économie afin de la planifier démocratiquement et écologiquement, sous le contrôle et la gestion des travailleurs en lien avec la population. Ce sont ces axes de lutte pour le socialisme que nous proposons également au débat au delà de la lutte pour notre victoire électorale le 19 juin prochain.
Une étape dans le combat
Comme dit plus haut, il y a des régions où la NUPES n’est pas parvenue à incarner l’opposition à Macron. C’est le cas dans les Pyrénées-Orientales, le Grand Est, dans certaines régions défavorisées de la façade Atlantique, ou dans le Sud Est ou dans une partie des Hauts-de-France comme le pas-de-Calais. L’extrême droite de Le Pen a vu son score augmenter, passant à 4,2 millions de voix contre 2,9 millions en 2017. Il faut ajouter les 960 000 voix de Reconquête, le parti d’extrême droite de Zemmour, qui n’a cependant aucun qualifié au second tour.
Le RN arrive en tête dans 110 circonscriptions. Même s’il est peu probable qu’il obtienne un grand nombre de député-e-s et qu’il a beaucoup reculé dans les endroits où les candidats de la NUPES étaient particulièrement combatifs sur les questions sociales, il confirme sa présence. Et il peut être un danger si nous échouons à structurer autour de la FI une véritable opposition des travailleurs et des jeunes à la politique de Macron.
Ce dernier risque fort de ne pas obtenir de majorité (289 sièges) à l’Assemblée. Et la droite traditionnelle de Les Républicains continue sa chute avec seulement 42 candidats arrivés en tête, quand elle avait 320 députés en 2007. Il est clair que LaRem/Ensemble et LR vont compter les uns sur les autres pour sauver des sièges, notamment face à la NUPES ce qui va rendre l’élection plus compliquée pour de nombreux-ses candidat-e-s. C’est là aussi que la question d’avoir un programme suffisamment combatif sur les questions sociales et contre le capitalisme sera indispensable tout comme la nécessité de construire et structurer la France Insoumise.
Avoir un programme suffisamment combatif sur les questions sociales et contre le capitalisme sera indispensable tout comme la nécessité de construire et structurer la France Insoumise
La NUPES, une coalition instable
Rien ne dit que certains partis qui participent à la NUPES seront réellement des défenseurs des revendications portées par celle-ci.
Le PCF a fortement fait campagne avec tous ces éléments, mettant également en avant les nationalisations d’EDF ou d’Engie. Nombre de ses députés sortant ont ainsi réalisés des scores très élevés, dépassant les 30 ou 40 %. Et sur les 50 candidatures PCF au sein de la NUPES, 32 sont au second tour. Certes, le PCF n’a pas mis la même énergie partout, notamment quand les fédérations locales du PS ont maintenu des candidatures contre la NUPES. La ligne de repli qui avait prévalu pour justifier la candidature Roussel à la présidentielle n’a pas disparu partout, loin de là. Mais les militant-es du PCF peuvent justement aider à ce que les revendications salariales ou de blocage des prix fassent réellement partie des premières préoccupations des élus NUPES.
Sur les 100 circonscriptions dévolues à Europe Ecologie-Les Verts (EELV), il y a 76 qualifiés pour le second tour. Mais on sait qu’EELV, sur le fond, est assez contre les revendications comme le blocage des prix (notamment des carburants, alors que la hausse du prix de l’essence n’affecte que les plus modestes) ou est pour la mise en place de taxes qui, là encore, touchent avant tout les travailleurs (c’est le cas des mises en place de vignettes Crit’air comme à Rouen). Enfin, on sait qu’EELV a une vision déconnectée de la réalité de l’Union Européenne, pensant que celle-ci pourrait être changée alors qu’elle n’est qu’un organisme de concertation des principaux pays capitalistes en Europe pour mener leurs politiques ultra-libérales.
Enfin, le PS a finalement joué son double-jeu habituel. D’un côté la direction nationale qui accepte l’accord NUPES, de l’autre des fédérations qui ont maintenu des candidats. Dans 13 circonscriptions, c’est même le candidat PS qui fait éliminer celui de la NUPES. Dans la 4ème circonscription de Seine-Maritime, celle dont Fabius était le député, le PS a ainsi mené une campagne virulente contre la NUPES, tant pour ce parti la question essentielle était de conserver son pouvoir local sur l’agglomération de Rouen. Il s’en est fallu de 167 voix que Mérabet, pourtant déjà maire d’Elbeuf et vice-président de la métropole, n’élimine la candidate de la NUPES, Alma Dufour. C’est la campagne dynamique qui a permis de mobiliser dans les principales villes ouvrières de cette circonscription et a envoyé la candidate de la NUPES au second tour.
Sur la ville de Rouen même, la candidate du PS, de Cintré, n’avait toujours pas fait retirer au 14 juin, l’affichette « ni Macron ni Mélenchon » de la vitrine de son local de campagne…
52 candidat-e-s PS sont au second tour grâce à la NUPES, mais la plupart d’entre eux n’ont fait qu’un accord tactique même s’ils seront sous une forte pression de la part des électeurs et des militants de la campagne qui leur disent : « Gare à vous si vous ne votez pas pour les revendications comme la retraite à 60 ans ! ».
Une occasion à saisir !
Macron qui recule, l’extrême droite qui progresse mais sans être aussi forte que la coalition de gauche, on le voit, il y a un potentiel pour combattre plus efficacement la politique de Macron. Certes, les élections ne sont pas le principal moyen de changer la société, mais elles peuvent représenter un point d’appui. Et la tendance qui s’est vue à l’élection présidentielle pour une politique combative contre Macron et le capitalisme en soutenant la candidature de Mélenchon se confirme à ces élections législatives.
Cela traduit de manière encore timide et confuse une volonté d’unir notre camp, celui des travailleurs, des jeunes, et de la majorité de la population, contre ces politiques qui nous font tant souffrir et dégradent sans cesse nos conditions de vie et même la société toute entière.