Instabilité chronique du Nigéria

Le plus grand pays d’Afrique, le Nigeria a vu les militaires quitter le pouvoir il y a deux ans et demi seulement. Mais entre l’impérialisme, notamment la multinationale Shell, ses représentants (politiciens et militaires) et les sectes religieuses la situation reste précaire.

Article paru dans l’Egalité n°93

Avec le meurtre de Bola Ige, ministre de la justice, le 23 décembre dernier, une nouvelle limite a été franchie dans la série de violences politiques, d’affrontements inter-ethnique ou religieux tandis que l’insécurité générale augmente même depuis le retour à un pouvoir civil.

L’assassinat de Bola Ige est à remettre dans le contexte de crise générale de l’Etat d’Osun (le Nigeria est un état fédéral) qui voit le gouverneur de cet état et son député s’affronter régulièrement. Un juge, plusieurs militants du Parti démocratique du peuple ont été assassinés ces derniers mois. Et ce sont également des centaines de personnes qui ont été tuées lors des émeutes inter-ethniques et religieuses dans plusieurs endroits. A cela s’ajoute l’incapacité de l’administration publique à enrayer la violence organisée, les vols à main armée etc. qui entraînent la mort de nombreux nigérians comme sous la dictature militaire.

L’instabilité politique croissante, la violence etc. sont la source d’un véritable danger pour le régime civil et pourraient être utilisés contre les droits démocratiques, et même pour une tentative de retour à une dictature militaire.

Face à cette situation, le Democratic socialist movement (DSM, section nigériane du CIO) condamne le meurtre de Bola Ige, et tous les autres meurtres politiques, de même que l’utilisation de la terreur et du meurtre pour régler les divergences politiques. Nous revendiquons qu’une enquête indépendante soit menée par un front uni des organisations syndicales, des syndicats étudiants, des partis démocratiques etc.

Dans le même temps, le DSM s’oppose à tout déploiement de troupes et à la menace du recours à l’état d’urgence par le gouvernement.

De telles mesures ne changeraient rien aux problèmes de fond qui sont ceux auxquels doivent faire face les pays du monde ex-colonial notamment : une lutte sans principe entre différentes fractions de la classe dirigeante pour qui l’Etat n’est qu’un moyen d’accroître ses privilèges et ses richesses. Les exactions souvent perpétrées par des personnes payés par les dirigeants, sont le résultats de cette course entre les différentes factions de la classe capitaliste pour contrôler le pouvoir.

De telles tensions n’ont rien à voir avec la résolution des problèmes du peuple nigérian et ne servent pas la lutte contre l’appauvrissement des masses. Dans les différentes factions qui s’affrontent, il n’y a aucun désaccord sur la politique de privatisations, et d’attaques sur les droits des travailleurs.

Face à cette corruption généralisée, financée par les grandes multinationales capitalistes, le DSM se bat pour que les travailleurs et leurs organisations mettent en avant une politique indépendante, contre les divisions ethniques ou religieuses, et pour un programme qui unisse les travailleurs, les jeunes, les petits paysans etc. : santé et éducation gratuite, un emploi pour tous avec un salaire décent et indexé sur l’inflation…

Mais il est évident, notamment dans les pays sous développé, qu’un tel programme n’est pas possible sans le renversement du capitalisme, ce qui implique de lutter pour une perspective socialiste.

Les prochaines élections dont le règlement ne permet qu’aux trois partis institutionnels de se présenter doivent également être le moment d’une lutte des jeunes et des travailleurs pour des élections réellement démocratiques, avec le droit pour tous d’y participer et pour tous les partis de présenter des candidats.

Par Alex Rouillard, d’après la déclaration de Segun Sango, secrétaire général du DSM, 28/12/2001