Le 11 février 100 000 personnes manifestaient à Athènes pour soutenir le gouvernement grec face à l’UE concernant la dette. Dimanche 15 février des rassemblements de soutien et des manifestations ont eu lieu partout en Europe en solidarité et contre les politiques d’austérité.
Stop aux mensonges !
L’Union Européenne a tout fait pour mettre la pression aux travailleurs grecs pour qu’ils ne votent pas pour Syriza en brandissant la menace de la sortie de la zone euro. Malgré cela, ils ont quand même été élus. Maintenant la pression est bien évidemment mise via l’arrêt du refinancement des banques grecques, via les marchés et la fuite organisée de capitaux mais aussi en essayant d’opposer les travailleurs grecs aux autres travailleurs en Europe.
L’UE dit, et cela est repris par le gouvernement français, que si la dette grecque n’était pas remboursée cela correspondrait à plusieurs centaines d’euros à payer par chaque travailleur français et que les grecs en général sont responsables de leur situation. C’est un mensonge !
D’une part l’explosion de la dette grecque provient de la crise économique de 2008, après 15 ans de quasi-stagnation, elle atteint désormais 175% du PIB et les mesures d’austérité n’ont fait que l’aggraver. L’augmentation de la dette publique a été plus forte en Grèce car la dette était déjà plus élevée qu’ailleurs du fait de la corruption politique, d’une fraude fiscale très importante des Grecs les plus riches et des entreprises qui n’est toujours pas enrayée. Il y aurait 280 milliards d’euros de fonds grecs planqués dans les paradis fiscaux, soit 120% du PIB !
Doit-on rappeler d’une part que les armateurs sont depuis des décennies exonérés d’impôts par la Constitution, tout comme l’Eglise orthodoxe qui est le deuxième plus gros propriétaire foncier du pays avec une fortune évaluée à 3 milliards d’euros avec des hôpitaux, des restaurants et des hôtels de luxe, etc.
Alors que d’autre part deux tiers des travailleurs du secteur privé, des fonctionnaires et des retraités eux sont prélevés à la source concernant les impôts et qu’ils n’ont donc pas le choix de payer impôts et taxes en constante augmentation.
La dette a explosé partout en Europe lorsque les états sont venus au secours des banques et n’a fait qu’augmenter ensuite à cause des taux d’intérêts importants imposer par les Etats membres de l’UE via leur prêt puis par le Fonds européen de stabilité et le FMI.
Pendant qu’on nous volait pour donner aux banques, les travailleurs grecs ne voyaient pas non plus la couleur de l’argent qui est parti dans les intérêts et la spéculation sur la dette alors qu’ils ont dû faire d’immenses sacrifices. Si la dette n’était pas remboursée ça ne serait pas si grave car la dette grecque, comme celle de la France, est largement remboursée depuis longtemps et s’auto-entretient à cause des intérêts.
Les travailleurs grecs ne nous doivent donc rien : l’Etat français (et de fait les banques entre autres françaises aussi) s’est même fait du fric sur le dos de la Grèce en empruntant de l’argent aux banques à un taux d’intérêt aux alentours de 1%, voire à des taux négatifs pour les emprunts les plus courts, qu’il prêtait ensuite à la Grèce à un taux de 4 à 5% ! Depuis 2010, cela représente pour les caisses de l’Etat français 729 millions d’euros selon le ministère de l’Economie. Ce qui est vrai pour la France l’est tout autant pour des pays comme l’Allemagne
Aux capitalistes de s’asseoir sur la dette, on a assez payé ! D’ailleurs une partie de la dette grecque avait déjà été annulée. Le gouvernement français trouve 50 milliards à donner aux entreprises mais ne pourrait pas assumer le non-remboursement d’une partie des 17 milliards des plans de relance avancés depuis 2008 ?
L’élection de Syriza, un pas en avant contre l’austérité
La classe ouvrière grecque, après 33 grèves générales, n’a pas réussi à empêcher les politiques d’austérité. Le refus des directions syndicales et des principaux partis de gauche d’aller jusqu’au bout pour refuser de payer la crise en remettant en cause les institutions faites pour cela et poser la question du pouvoir au travailleurs a permis que les différents partis au pouvoir continuent leurs politiques d’austérité.
Beaucoup d’acquis ont disparu : conventions collectives supprimées ou attaquées, licenciements par millions dans le secteur public comme dans le privé, baisse des salaires et du salaire minimum, entraînant 30% de la population dans la pauvreté, des droits notamment syndicaux ont été perdus et leur financement réduit. Tout cela entraîne beaucoup de colère mais de plus grandes difficultés à se mobiliser. Mais la situation politique comme ailleurs a montré un désaveu complet des partis capitalistes de gouvernement comme dans beaucoup de pays en Europe et une tendance plus à gauche et plus à droite des aspirations politiques. L’élection de Syriza arrive dans ce contexte et est un soulagement pour les travailleurs en Grèce car elle marque un coup contre l’austérité.
L’intransigeance face au PS
Un des points qui explique le succès de Syriza a été son intransigeance vis à vis du Pasok, le PS grec. Celle-ci s’est traduite par une indépendance pendant les élections notamment celles des législatives. Le Pasok avait mené l’austérité, ce qui a permis la montée de la droite nationaliste et de l’extrême-droite avec les fascistes d’Aube dorée. Ceci n’a pas empêché que Syriza se présente de manière indépendante. Le Pasok a été dévasté électoralement, ne recueillant que 4 % des voix aux dernières élections législatives. Ce qui n’empêche pas Aube dorée de reculer aussi sous la pression du mouvement anti-austérité.
C’est un élément central qui permet d’expliquer la victoire de Syriza. Elle présente beaucoup d’intérêts dans les autres pays d’Europe où les partis sociaux-démocrates mènent les coupes budgétaires et l’austérité. Cet exemple doit être discuté en France notamment autour des prochaines échéances électorales départementales. D’autres forces comme le PC, EELV, d’autres courants du FDG comptent faire alliance pour les prochaines élections régionales. Ils feraient bien de s’inspirer de l’exemple de Syriza alors qu’EELV se dit toujours dans la majorité et que le PC ira au second tout avec le PS pour avoir des postes comme à chaque élection.
Le gouvernement Hollande-Valls a beau saluer la victoire électorale de Syriza et affirmer que leur programme est proche, cela ne les empêchera pas de continuer leur politique d’attaque frontale des intérêts des travailleurs en France et de soutenir le dépeçage de la Grèce par l’UE au profit des capitalistes.
Quelle sortie de crise ?
Arrivés au pouvoir, les membres du gouvernement Syriza ont annoncé l’arrêt les privatisations et engager les réembauches de fonctionnaires, rouvrir la télé publique et mettre en place des aides pour les plus mal logés, l’augmentation graduelle du SMIC, le rétablissement de la législation du travail et des conventions collectives, la lutte contre la fraude fiscale et la corruption etc. Si Syriza a su convaincre – son élection était attendue du fait d’un programme répondant partiellement aux besoins immédiats des travailleurs et des plus pauvres – une partie des travailleurs reste méfiante à juste titre.
En effet, les mesures mise en place sont plus timides qu’annoncées et il y a de premières reculades du fait des pressions de la Troïka et des gouvernements d’Europe au premier rang desquels se trouve celui de Merkel mais aussi celui d’Hollande-Valls.
L’alliance avec les Grecs indépendants (ANEL, parti nationaliste de droite) du fait du refus sectaire du KKE (le Parti communiste grec) de former une coalition ne facilite pas les choses. Cette alliance pouvant servir de prétexte à l’aile droite de Syriza pour justifier les reculs. Ainsi, le ministre des finances Varoufakis (Syriza) a déclaré qu’il serait impensable de ne pas payer les intérêts de la dette et a remis en cause l’arrêt des privatisations. Le ministre du travail Skourletis (Syriza) a également conditionné l’augmentation du salaire minimum à 750 euros qui serait graduelle et soumise à des conditions : exonérations de cotisations sociales et accord entre syndicats et patronat.
La direction de Syriza continue de croire qu’elle peut venir à une entente et un compromis avec la direction européenne. C’est une erreur ! Un échec de Syriza pourrait rouvrir la crise politique et remettre les fascistes d’Aube dorée, arrivé 3ème aux élections législatives, au premier plan. C’est un danger qui est largement sous-estimé par toute la gauche. D’ailleurs nos camarades militent activement contre le fascisme.
La posture de Syriza dans la prochaine période va beaucoup dépendre de la mobilisation des travailleurs en Grèce qui poussera à l’affrontement avec l’UE au bénéfice des travailleurs face aux capitalistes qui tenteront d’imposer toujours plus de mesures d’austérité. Cela dépend aussi de la mobilisation des travailleurs dans toute l’Europe pour affaiblir nos gouvernements qui tenteront tout pour empêcher qu’une alternative naisse en Grèce et ailleurs. Le meilleur moyen de soutenir les travailleur-ses grecs, c’est de stopper en France la politique d’Hollande-Valls.