Brésil : la gauche du P.T. face à une politique droitière

Quelques mois seulement après son arrivée au pouvoir, Lula confirme toutes les craintes que son programme de collaboration de classes laissait présager.

Article paru dans l’Egalité n°103

Alors qu’il ne cesse de donner des preuves de « bonne gestion » aux sbires du FMI et de la Banque Mondiale (voir les numéros précédents de l’Egalité), il laisse en suspens son fameux programme « Faim zéro », n’établit même pas les premières amorces d’une réforme agraire pourtant essentielle et n’a de cesse d’amputer tous les budgets sociaux dans un pays où le rapport entre le revenu des 20 % les plus riches et celui des 20 % les plus pauvres est de 32 (aux Etats Unis le rapport est de 9 ; en France il est de 8. Source : Alternatives économiques septembre 2003).

Le fossé entre les aspirations des travailleurs et la réelle teneur libérale de sa politique se creuse de jour en jour et aboutit à des premiers éléments de riposte.

Face au projet de réforme des retraites qui vise à augmenter de sept ans la durée de cotisation dans le secteur public et à abaisser le niveau des pensions, une première manifestation a rassemblé 80000 fonctionnaires à Brasilia à l’appel du CUT (Centrale Unique des Travailleurs).

Cette manifestation a donné lieu à un débat sérieux au sein du Parti des travailleurs, le parti présidentiel, entre ceux qui conçoivent le parti comme une courroie de transmission de la politique gouvernementale et ceux qui tenaient à apporter leur soutien aux travailleurs du public. Les membres allant à la manifestation n’ont pas été sanctionnés mais ce fait révèle bien les contradictions internes créées par le tournant à droite opéré par la direction du P.T.. D’ailleurs, la volonté de contrôle de la direction du parti est telle qu’elle traduit devant une « commission d’éthique » interne trois membres de l’aile gauche, dont une sénatrice du courant Démocratie socialiste (équivalent brésilien de la LCR),pour avoir ouvertement déclaré qu’ils ne voteraient pas la réforme des retraites.

Mais l’opposition de gauche est d’une extrême faiblesse, voire même d’une réelle inconsistance. En effet, le courant Démocratie socialiste , qui se présente comme le courant le plus important de l’opposition radicale de gauche au sein du PT, continue à avoir un de ses dirigeants au gouvernement en tant que ministre de la réforme agraire aux côtés d’un représentant émérite des gros propriétaires terriens alors que l’une de ses camarades est mise en accusation par la direction. Plus grave l’ensemble du courant à décidé de voter la réforme des retraites.

Plusieurs appels existent contre l’orientation donnée au PT par l’équipe Lula. Certains pour reconquérir le PT, d’autres dans la perspective d’un Parti des travailleurs pour le socialisme.

Nos camarades de Socialismo revolucionario (section brésilienne du CIO) appellent à renforcer les luttes des travailleurs et créer ainsi les bases pour lutter contre la direction droitière de Lula. Cette opposition peut se baser sur l’unité de la gauche dans et à l’extérieur du PT, et ne peut s’établir que sur les bases d’un programme socialiste remettant clairement en cause toute collaboration de classes et inféodation aux capitalistes locaux et internationaux.

Par Geneviève Favre