Après le référendum, les contradictions s’aggravent au Venezuela

La droite vénézuelienne a eu beau déployer mille forces pour dénoncer une fraude, avant, pendant et après le référendum du 15 août, ses efforts ont été vains. 58.25% des voix ont soutenu le président Hugo Chavez. La population s’est mobilisée en masse pour ces élections. Jamais le taux d’abstention n’a été aussi bas.

Article paru dans l’Egalité n°109

La nouvelle défaite de l’opposition (Coordinadora Democratica,) alliance de partis politiques, de syndicat patronal, et d’un syndicat des travailleurs) polarise davantage la situation politique dans le pays. Les votes favorables à Chavez entre quartiers pauvres (60%) et riches (40%) reflètent cette polarisation.

La situation au Venezuela est regardée attentivement partout sur le continent sud-américain tant par les bourgeoisies que par les classes ouvrières.

La bourgeoisie (qui ne représente que 5 % de la population) soutenue par les Etats-Unis et la bourgeoisie internationale cherche à garder ses privilèges, détient presque tous les médias et se livre à des campagnes de propagande massives. Elle organise des déstabilisations économiques (le « lock out  » pétrolier entre décembre 2002 à février 2003) et a déjà tenté plusieurs coups d’état que ce soit en avril 2002 par l’opposition elle même ou cette année avec les paramilitaires colombiens. Mais elle est divisée, et n’offre aucune perspective commune sur les questions du chômage, de l’emploi. De plus le soutien des Etats unis ne peut pas se concrétiser en force militaire à cause de l’enlisement du conflit irakien.

Aujourd’hui la situation économique au Venezuela est instable, la population a subi plusieurs vagues d’inflation (22% en tout cette année). Ce qui a valu le retrait du soutien à Chavez de la part de la classe moyenne. Celle ci a subi de plein fouet la crise économique. Elle oscille donc entre soutien à Chavez et opposition.

Ce sont des signes d’une période prérévolutionnaire, mais l’absence de la classe ouvrière à la tête du mouvement de masse et l’absence d’un parti révolutionnaire de masse font que la situation au Venezuela peut devenir très critique. Comme nous l’écrivions dans le numéro 108 de l’Egalité, c’est un choix entre révolution socialiste et réaction répressive qui se joue au Venezuela.

Chavez a encore gagné grâce à la mobilisation des masses comme à chaque coup de la réaction. Et ce mouvement continuel des masses l’a obligé à pousser à gauche. Après la grève patronale du pétrole et la mobilisation des travailleurs pour le soutenir, il a nationalisé le PDVSA (pétrole vénézuélien) et utilisé cet argent pour des réformes et des missions sociales.

Chavez, populiste de gauche, a augmenté les retraites, le budget de l’enseignement de 7%, mais il n’a pas nationalisé les banques ni re-nationalisé la métallurgie par exemple. Il se dit anti-impérialiste mais ne remet jamais en cause le capitalisme. Juste après sa victoire au referendum, il a déclaré qu’il paierait la dette extérieure et rassuré les capitalistes et les pétroliers.

Il n’a pas remis en cause non plus les privatisations faites avant son arrivée au pouvoir. Après chaque attaque de l’opposition, il était sauvé par la classe ouvrière. Mais au lieu de lui donner les moyens de diriger leur lutte, il appelle à une unité nationale, à un terrain d’entente avec l’opposition. Il ne veut pas réellement rompre avec le capitalisme, il n’a pas de perspective socialiste. Quelles sont les taches des révolutionnaires ?

Une des tâches est d’aider les secteurs les plus avancés par exemple les salariés de la métallurgie (7000 ouvriers ont fait grève dans la province de Bolivar pour demander la renationalisation de cette industrie).

De même, en 2003, ce sont les travailleurs du pétrole qui en réquisitionnant les tankers de pétrole, ont arrêté la grève patronale. La classe ouvrière doit renforcer ses propres organisations pour faire face aux capitalistes et à la bourgeoisie. La tâche des révolutionnaires est de renforcer l’organisation de la classe ouvrière et de développer sa conscience d’être celle qui fera la révolution, d’œuvrer à ce qu’elle s’organise en comité d’usine, de quartier avec des délégués élus locaux, régionaux et nationaux qui seraient révocables. La base pourrait en être les comités bolivariens élargis et réellement démocratiques. Aujourd’hui, la classe ouvrière a besoin d’un parti qui lui appartienne et qui mette en avant l’intérêt des travailleurs, un parti révolutionnaire.

Pour le socialisme au Venezuela !

Après la menace des paramilitaires colombiens recrutés par l’opposition, Chavez a déclaré « Chaque pêcheur, chaque étudiant, chaque citoyen doit apprendre à se servir d’un fusil pour défendre en collaboration avec l’armée nationale, la terre sacrée du Venezuela « . Cette déclaration n’est restée qu’une belle parole. Pourtant l’armement de la classe ouvrière est crucial pour qu’elle puisse se défendre contre des nouveaux coups d’état organisés par la bourgeoisie. Mais l’armement seul ne sera pas suffisant. Un mouvement révolutionnaire doit briser consciemment le pouvoir des capitalistes et des structures de l’état capitaliste. En 1972, au Chili le gouvernement socialiste n’a pas entièrement brisé l’influence des capitalistes et n’était pas prêt à armer la population contre les forces réactionnaires. Ce qui a coûté des milliers de vies avec le putsch sanglant de Pinochet en septembre 1973.

Au Venezuela, il est alors nécessaire que les soldats du rang s’organisent en comités de soldats et s’unissent aux comités des travailleurs et des paysans dans chaque quartier, ville, région pour former la base d’un nouveau gouvernement ouvrier et paysan. Après la prise du pouvoir de la classe ouvrière, la nationalisation des banques et industries sous le contrôle et l’administration démocratique des travailleurs seront les premières mesures pour renverser le capitalisme et pour mettre en place une société socialiste. Aujourd’hui, il est crucial de construire un parti révolutionnaire de masse, capable de mener la bataille pour le socialisme.

Par Faustine Ottin et Marie-José Douet