Pierre Gluckstein : le « troisième homme » de l’extrême-gauche

Comme nous le redoutions dans  » L’Egalité  » d’octobre 2001, la multiplication des candidatures est la règle à l’extrême-gauche comme ailleurs.

Article paru dans l’Egalité n°94

Défenseur des maires menacés dans leurs prérogatives par l’intercommunalité, Daniel Gluckstein a pu recueillir les 500 signatures. Même si le candidat du Parti des Travailleurs a choisi une démarche un peu spéciale (il ne se classe pas lui-même à l’extrême-gauche et ne se réclame pas du trotskisme qui ne serait le fait que d’une des 4 tendances de son organisation), nous voilà bien avec en lice trois trotskistes. Bonjour les dégâts !

Le P.T. a hésité avant de se lancer dans la bataille : d’une part, il n’était pas sûr d’avoir ses 500 élus ; d’autre part, il ne tenait pas, en rééditant le score de Boussel alias Lambert en 88 d’arriver loin derrière L.O. et la L.C.R. ce qui serait un peu démoralisant ; enfin, certains ne voulaient pas cautionner l’institution présidentielle en participant à ce scrutin alors qu’ils étaient restés à l’écart des Régionales au prétexte qu’ils contestent ce niveau du pouvoir prôné par Bruxelles pour saper l’état national et les départements issus de la Révolution Française…

Mais on avait beaucoup parlé du  » lambertisme  » au printemps 2001 lorsque Jospin avait « avoué » que, dans sa jeunesse, il avait bel et bien été anticolonialiste et antistalinien et il était tentant de capitaliser cette notoriété inhabituelle en se présentant à l’élection présidentielle. La sortie prochaine d’un bouquin cosigné par Lambert et Gluckstein va exploiter ce filon des révélations en citant le plus possible d’ex-membres du P.C.I., de l’O.C.I. et du M.P.P.T. , étiquettes antérieures de l’actuel P.T.

Le mal-aimé des médias

Nous verrons si, à cette occasion, la presse se fera l’écho des déclarations du candidat ou si elle continuera à boycotter ses faits et gestes. Car il faut bien constater que, pour le moment, Gluckstein est le mal-aimé des médias. Il vient d’intenter un procès à Christophe Nick qui, dans son livre « Les trotskistes » (A. Fayard éd.), entre autres contre-vérités, raconte des sornettes sur ses origines et sa jeunesse. Le Tribunal, sans faire saisir le bouquin, a condamné l’auteur ; mais la presse, à la suite de l’A.F.P., l’a dans l’ensemble ignoré et reste très avare en petites phrases lambertistes.Il faut reconnaître que cette campagne manque singulièrement d’éclat.

On oublie trop souvent, à l’extrême-gauche, de parler des institutions et du rôle anti-social qu’elles jouent, mais ce n’est pas en se contentant de défendre comme le fait les PT les « acquis de 89 » en la matière qu’on fait avancer le schmilblic, bien qu’il soit vrai qu’à la faveur de la régionalisation et de l’intercommunalité, la bourgeoisie essaie de renforcer son emprise. Mais on peut en dire autant de toutes les innovations techniques ou autres. Il y a des combats à mener dans ce domaine-là comme ailleurs, mais sans forcément considérer tous les maires jaloux de leurs pouvoirs comme des exploités et des alliés.

Les élites et les poux

C’est une des contradictions du lambertisme d’être très peu regardant sur ses alliances et ses participations (F.O., Grand-Orient de France, médecins en conflit avec le gouvernement… à croire que, comme les Jésuites, on chouchoute les élites) et de chercher au-delà du raisonnable des poux dans les alliances des autres. Comme le P.T., nous soulignons les ambigüités du mouvement anti-mondialisation et en particulier d’ATTAC.

Mais une chose est de dire que la taxe Tobin est parfaitement compatible avec le capitalisme, que le « contrôle citoyen de l’O.M.C. » est une fumisterie et qu’il est scandaleux de faire comme si tous les pélerins de Porto Alegre étaient fiables, même ceux qui ont fait escale au retour au sommet de Davos-New-York (comme un certain Delanoë).

Autre chose est de nier tout ce qu’il y a de positif dans les mobilisations de Gènes ou de Bruxelles (et, à l’échelle française, autour de la Confédération Paysanne : Pas un mot dans « Informations Ouvrières » sur la manifestation de défense du secteur public à Millau en août dernier alors qu’il y avait toute une page pour dénoncer José Bové trahissant les éleveurs de brebis au profit des exportateurs de fromage…).

Autre chose encore de se retrancher dans son splendide isolement et de ne combattre la déréglementation que dans des conférences internationales comme celle qui vient de se tenir à Berlin où ne participaient que ceux qui font allégeance au « lambertisme ».

Le P.T. est présent et actif dans certaines luttes dans l’enseignement, la santé, l’équipement etc, mais il brille par son absence dans beaucoup d’autres (antiracisme, soutien aux Sans-papiers, mouvement des chômeurs, manifs de Calais et du 9 juin avec les Lu-Danone, etc.).

Ceux qui voteront Gluckstein diront non à Maastricht, au gouvernement Chirac-Jospin. Ils ne perdront pas leur voix comme ceux qui hoisiront un candidat de droite ou de la gauche plurielle. Mais ils ne feront pas avancer le nécessaire vrai Parti des Travailleurs dont nous avons besoin.

Par Jacques Capet