Loi Perben 2 : renforcement des inégalités face à la justice

Le parlement a voté le second volet des lois Perben, qui concerne les pouvoirs de la justice. Cette loi arrive à un moment où d’un côté Juppé s’en tire juste avec du sursis et où de l’autre, un jeune prend un mois de prison ferme pour insulte à Sarkozy. Elle a été vivement dénoncée par les avocats et les juges qui se sont mobilisés contre les dérives et le climat sécuritaire depuis l’arrivée du gouvernement Raffarin-Sarkozy.

Article paru dans l’Egalité n°106

Déjà les lois Sarkozy s’en prennent aux plus faibles, comme l’interdiction faite aux jeunes de se réunir dans les cages d’escalier, l’interdiction de mendier dans les centre-ville, ou l’interdiction de la prostitution. Cette loi ne s’attaque qu’aux causes apparentes et non aux problèmes eux-mêmes : misère, chômage, précarité…C’est ainsi que le système capitaliste en crise utilise la répression pour canaliser et limiter le mécontentement ou les révoltes qui peuvent surgir. Les lois Perben 2 en sont un parfait exemple.

Une loi qui protège les hommes politiques et les patrons

La loi prétend s’attaquer à la criminalité organisée mais elle ne concerne ni la corruption, ni la délinquance financière. Elle crée des mesures d’exception qui pourront être utilisées pour la délinquance ordinaire, car elle ne donne pas de définition précise de la criminalité organisée. Deux jeunes qui volent une mobylette, est-ce de la criminalité organisée ? La même question peut être posée dans le cas d’ouvriers qui cadenasseraient les portes de leur usine pendant une lutte ou qui séquestreraient leur patron. Par contre, le patron qui déménage une usine en douce dans la nuit ne sera pas inquiété.

De nouveaux pouvoirs pour la police

Les nouveaux pouvoirs donnés à la police sont eux aussi inquiétants. La durée de la garde à vue passe de 48h à 96h, même pour les mineurs de 16 à 18 ans, et la présence de l’avocat n’est plus obligatoire dès la première heure. On peut parier que les accusés ne tarderont pas à avouer tout ce qu’on leur demande s’ils sont laissés à la merci des policiers ! A cela s’ajoute l’élargissement des écoutes téléphoniques , pose de micros ou de caméras dans les domiciles privés (alors que jusque là cela était réservé aux services secrets). La cerise sur le gâteau : si l’enquête prouve qu’il ne s’agissait pas de criminalité organisée, il n’y a aucune possibilité d’annuler la procédure.

Des procureurs encore plus soumis aux volontés du gouvernement

La loi accorde beaucoup plus de poids aux procureurs (nommés par le conseil des ministres), donc qui tiennent leurs ordres directement du gouvernement. On imagine aisément quelle utilisation les gouvernements peuvent en faire pour étouffer les affaires qui les dérangent. Comment peuvent-ils nous parler d’indépendance de la justice ? Les pouvoirs des juges (qui ne sont pas nommés par le gouvernement) sont limités. Les procédures simplifiées, comme le plaider-coupable peuvent être négociées directement dans le bureau du procureur sans procès public. Alors qu’une telle procédure concernera les délits passibles jusqu’à 5 ans d’emprisonnement. Même si le juge s’oppose à la procédure il devra le faire en secret ! Si le gouvernement a fait cette loi c’est pour mettre la Justice encore plus à ses ordres et protéger les classes dirigeantes d’affaires gênantes pour eux.

Justice à deux vitesses

Cette loi démontre ce que beaucoup d’entre nous pensent déjà : la justice est à deux vitesses. Dans la mesure où les lois sont faites par et pour les classes dirigeantes, il n’est pas étonnant qu’elles ne s’appliquent pas à tous de la même façon. C’est le rôle de l’Etat de faire voter des lois qui justifient la domination d’une classe sociale sur une autre. A l’époque de l’esclavage il était légal de posséder un esclave, la loi disait que les esclaves n’avaient pas d’âme et étaient comme des meubles. Ce sont les luttes qui ont fait changer les choses, car les propriétaires terriens auraient bien voulu continuer à avoir des esclaves.

Aujourd’hui en France et dans les pays industrialisés, les lois justifient le fait qu’un patron peut décider de fermer une entreprise du jour au lendemain juste pour maintenir son taux de profit. Alors que quand un travailleur ne paie pas ses impôts, il peut voir ses biens saisis. Et pour les patrons, qui va aller les saisir bien qu’ils doivent à la Sécu 19 milliards de charges non payées ?

Les libertés individuelles que nous avons aujourd’hui (droit d’organisation, de vote, d’expression…) ont été gagnées par les luttes des travailleurs, ce n’est pas l’Etat qui les a accordées par bonté d’âme. L’Etat capitaliste défend le système capitaliste, il n’y a donc qu’un Etat ouvrier socialiste qui défendra les travailleurs.

C’est par nos luttes que nous pourrons défendre nos droits et en gagner de nouveaux, des luttes indépendantes et sans aucune illusion sur l’Etat et la Justice des capitalistes.

Par Cabira et Virginie