Les lycéens se mobilisent au Chili

La mobilisation a duré plus de trois semaines, en mai dernier et s’est étendue au niveau national. Tous les étudiants chiliens se sont mobilisés pour demander au gouvernement l’abrogation de la LOCE (loi organique constitutionnelle de l’enseignement).ainsi que la gratuité de la PSU, (épreuve de sélection pour l’entrée dans les Universités, équivalente au bac en France) et la gratuité du pass scolaire pour les transports en commun.

Article paru dans l’Egalité n°120

Qu’est ce que la LOCE ?

C’est une loi promulguée par le dictateur Pinochet un jour avant de quitter le pouvoir. Elle se place dans une perspective de libre marché et entraîne une inégalité dans l’enseignement. Les enfants qui naissent dans des communes pauvres, et sans ressource n’auront pas les mêmes chances que les enfants issus d’une famille aisée. Le plus dramatique dans cette loi, c’est que n’importe quelle personne ayant les moyens, peut ouvrir du jour au lendemain une école privée, et demander une subvention à l’Etat. Ce dernier n’a néanmoins aucun contrôle sur la gestion des dépenses. On peut donc se poser de nombreuses questions sur la qualité de l’enseignement ainsi que les conditions de travail du personnel enseignant.

Les statistiques montrent que des années 1970 à 1982, le nombre total d’inscriptions dans les établissements publics a chuté de 100.000, et pour l’année 1990 (quand la Loce fut promulguée), l’enseignement public a perdu un demi-million d’élèves.

Une régression rare dans le continent latino américain

Depuis la fin de la dictature, sur cinq places créées dans l’enseignement primaire et secondaire quatre correspondent à des écoles privées et une seule à des établissements publics. En 1981, les écoles publiques représentaient 78% des inscriptions. Aujourd’hui elles n’en représentent plus que 50%. Le reste, c’est du marché privé avec 41% pour des particuliers subventionnés et 9% pour des privés « à sec » (info du bulletin N° 42230 des étudiants en droit de l’ université du Chili.).

Cette accumulation d’inégalités a poussé à la mobilisation générale des lycéens, pour demander l’amélioration de l’enseignement. Tout le monde s’est senti concerné par cette revendication et a soutenu la mobilisation des lycéens d’une façon générale en commençant à occuper les établissements. Le 5 juin, c’est par milliers qu’ils sont descendus dans les rues de la capitale, mais c’est à la répression policière qu’ils ont du faire face. Le gouvernement de « gauche » de Bachelet n’avait apparemment aucune envie de satisfaire les lycéens et étudiants.

Vu l’ampleur de la grève, le gouvernement a été obligé de céder quelques garanties. On peut dire que les lycéens ont mis la puce à l’oreille dans une bonne partie de la population qui, avant, pour la majorité, ne se posait même pas la question de pourquoi ils devraient payer aussi cher, comme si l’éducation était un privilège ou un luxe.

On peut dire que les lycéens s’en sont sortis avec une petite victoire : pour les élèves en difficultés qui ne paieront pas l’épreuve de sélection aux Universités et, dans une région du Nord, la mairie a décrété la gratuité pour tous les étudiants.

Le gouvernement a désigné une table ronde avec des personnes qui ont des intérêts dans les écoles privées. Et c’est pour cela que les lycéens eux mêmes sont attentifs à toutes décisions et toutes modifications éventuelles de cette loi. Il est illusoire de croire que l’abrogation de la LOCE se fera complètement car cela serait s’en prendre directement aux piliers du capital chilien. Trop d’argent s’échapperait de ses griffes et ça serait contradictoire avec la loi des profits. On doit être conscient que n’importe quelle demande ne pourra jamais donner une satisfaction complète que ça sera toujours partiel ou temporaire sous ce système.

Les leçons du mouvement :

La lutte déterminée des lycéens a forcé le gouvernement à reculer sur certains points et a démontré aux travailleurs et au reste de la population qu’il est possible de récupérer nos acquis sociaux si la lutte est organisée et résolue.

C’est pour cela qu’il faut s’unir pour organiser un parti des travailleurs qui représente notre classe et nos intérêts et pas ceux de la bourgeoisie.

Par Diana O.