Argentine : Perpétuité pour Astiz et tous les auteurs de la répression

Le tortionnaire Alfredo Astiz s’est livré dimanche 1 juillet au commissariat central de Police à Buenos Aires, suite à la demande d’arrestation de la juge fédérale Servini de Cubria.

Article paru dans l’Egalité n°88

Ce magistrat a répondu positivement à la demande d’extradition faite par l’Italie qui accuse l’ancien marin de la disparition de trois citoyens italiens : Susana et Giovanni Pegoraro et Angela Maria Aietta. Depuis 1990 Astiz ne peut sortir du pays parce qu’il a été condamné à perpétuité par contumace, en France, pour la séquestration et l’homicide des religieuses françaises Alice Domon et Léonie Duquet.

Astiz est un des mille cinq cents responsables de séquestrations, tortures, assassinats, disparitions, viols et vols de bébés de disparus de la dernière dictature militaire en Argentine (1976-1983). Le terrorisme d’Etat structuré et organisé par ce régime a fait disparaître 30 000 personnes (sans parler de la période immédiatement précédente où l’extrême droite du gouvernement péroniste a fait des centaines de morts) avec un objectif très clair : en finir avec une importante avant-garde de travailleurs, de jeunes et d’intellectuels qui se battaient contre le projet économique et social libéral que les Américains (et les Européens, avec une moindre force, certes) voulaient imposer au Chili, en Argentine et dans toute l’Amérique Latine.

Comme l’écrasante majorité de ces répresseurs, Astiz était jusqu’à maintenant en liberté ; les Mères et Grand-mères de la Place de mai, les enfants des disparus, prisonniers et exilés (H.I.J.O.S.), les ex-détenus disparus et la société dans son ensemble l’ont signalé à chaque fois que la possibilité s’est présentée. Face à l’impunité juridique des tortionnaires il reste la condamnation sociale.

En Argentine, l’impunité fait partie de l’appareil d’Etat : en 1986 et 1987, sous le gouvernement de R.Alfonsin, deux lois d’amnistie ont laissé libres tous les responsables de crimes contre l’humanité commis sous la dictature, sauf la plus haute hiérarchie militaire (Videla, Massera, etc…) qui a été graciée en 1990 par Carlos Menem. Videla et Massera sont assignés à résidence depuis 1998 pour être responsables du plan systématique de vol d’enfants de « disparus », le seul crime que les lois d’amnistie n’incluent pas. Les deux partis politiques du système, l’un après l’autre, ont montré que l’impunité était une nécessité politique pour maintenir la structure répressive sur pieds, donc le  » calme  » et la  » stabilité institutionnelle « .

La « démocratie » a également ses morts : en 15 ans les cas de jeunes tués par la Police s’élèvent à plus de 600 (et 96% des cas restent impunis) ; sous l’actuel gouvernement de De La Rùa, élu en 1999, la répression contre les blocages de routes a fait entre 4 et 6 morts. Les crimes économiques comme les privatisations ne seront probablement jamais jugés alors que des dizaines de militants sociaux ont un casier judiciaire ou sont emprisonnés pour avoir lutté contre les plans économiques de misère. Astiz est un symbole de la répression des année 70 et de l’impunité des années 80 et 90 : en Argentine il n’a jamais été jugé pour les crimes commis. Ce sont l’Espagne, l’Italie et la France (dont l’Armée et ses actions au Cambodge et en Algérie, disons-le au passage, ont inspiré tant de tortionnaires latino-américains) qui veulent le juger mais c’est aussi tout le peuple argentin, et ceci malgré les politiciens honteux qui gouvernent notre pays.

La solidarité internationale, la lutte coordonnée en Europe et en Amérique Latine sont fondamentales pour que Astiz et tous les autres soient châtiés à perpétuité.

Par Natalia