Plus que jamais un nouveau parti des travailleurs est nécessaire !

Le mouvement de mai a montré la capacité des salariés à réagir contre les attaques d’une ampleur sans précédent menées par le gouvernement et le patronat. Ils ont non seulement pu construire un mouvement de masse, certes limité essentiellement au secteur public, mais ils ont surtout organisé le mouvement de la base. Par les AG de secteurs, par les AG de villes et les Ag interpro ils ont pu faire l’expérience de leur force et de leur capacité à organiser une lutte, obligeant un moment les directions syndicales à les suivre. Ceci est indispensable, mais n’est pas suffisant face à la volonté des capitalistes de casser totalement les acquis des travailleurs.

Article paru dans l’Egalité n°105

Car cette lutte a été également le révélateur de l’impossibilité actuelle des travailleurs à contrer le blocage opéré par les directions syndicales. Celles-ci aujourd’hui cherchent à tuer dans l’œuf tout mouvement des salariés. En effet, elles ne peuvent plus jouer le jeu de la gauche plurielle, laquelle, décrédibilisée par la politique de droite de Jospin, n’apparaît plus comme une alternance crédible à la droite. La direction de la CFDT collabore ouvertement avec le patronat et le gouvernement. La direction de la CGT effectue, sous un discours en apparence revendicatif, une sorte de collaboration passive préférant de loin une apathie des travailleurs à un mouvement qu’elle risquerait de ne pas pouvoir contrôler.

Ce vide politique, que rien actuellement ne vient combler, n’offre alors aucune perspective offensive pour les travailleurs, et par conséquent ni tactique ni programme pour les amener à se débarrasser leurs directions syndicales. Le fait que les luttes sont uniquement défensives, c’est à dire motivées par la défense d’acquis attaqués, et non offensives pour acquérir de nouveaux droits, laisse la marge aux bureaucrates pour prétendre défendre les intérêts des ouvriers, leur donne le paravent nécessaire à leurs magouilles. C’est ce manque d’une alternative qui a laissé une marge de manœuvre à Thibault pour demander de nouvelles négociations alors que les manifestants réclamaient le retrait de la réforme. C’est ce manque d’alternative qui lui a permis de présenter la grève générale comme un moyen inadapté et dangereux. Pourtant appeler à une grève générale en la présentant comme un moyen de mettre en place un gouvernement ouvrier au service des travailleurs aurait souligné l’absence de réponse de l’ex-Gauche plurielle.

Un premier pas qui permettrait d’en faire d’autres

Car les anciens partis ouvriers tels que le PS en France ou le Labour en Grande Bretagne, ont définitivement quitté le camp des travailleurs. Ils ne raisonnent plus que dans le cadre du capitalisme, et ne défendent plus une seule revendication des travailleurs (même si avant ils les trahissaient souvent) qui s’en prenne réellement aux patrons. Cette « bourgeoisification » des anciens partis traditionnels de la classe ouvrière étant achevée, un espace politique s’est créé, accompagné dans un premier temps par une dépolitisation de nombreux travailleurs dans les années 90.

En avançant la revendication d’un nouveau parti des travailleurs, on répond à cette nécessité pour les travailleurs de se reforger l’outil politique nécessaire pour faire triompher leurs luttes et leurs revendications. Un tel parti devra être en rupture avec « tous les partis de la bourgeoisie afin d’établir leur propre pouvoir » (Trotsky).

L’histoire nous a montré qu’un parti des travailleurs de masse était un outil de lutte, malgré les freins mis par la social-démocratie, les staliniens ou les bureaucraties syndicales, qui ont empêché toute victoire révolutionnaire dans de nombreux pays.

Selon les pays, un nouveau parti représente une étape qui se franchira différemment. Au Brésil par exemple, il y aura certainement scission du PT du président Lula pour construire un nouveau PT authentiquement socialiste. Le PT brésilien aura néanmoins permis à des dizaines de milliers de travailleurs de s’organiser, de faire leur éducation politique, et de raisonner en termes de perspectives politiques globales.

En France, un nouveau parti pourrait être initié par la LCR et LO du fait de leurs hauts scores électoraux et du degré d’auto-organisation qui existe dans les luttes. Même si les débuts resteront limités, un parti ouvert, démocratique et sur des bases plus radicales que dans d’autres pays, serait possible si les directions de ces organisations s’attelaient à cette tâche. Trotsky nous rappelle dans le programme de transition que l’orientation des masses est déterminées d’une part par les conditions objectives du « capitalisme pourrissant » et d’autre part, par la politique de trahison des vieilles organisations ouvrières. Aujourd’hui cela ne peut que nous faire écho, lorsque le système capitaliste ne connaît que crise sur crise et que les organisations politiques et syndicales ne cessent de trahir les travailleurs.

La nécessité d’un nouveau parti des travailleurs est par conséquent flagrante

Dans sa création les organisations d’extrême gauche pourraient et devraient jouer un rôle crucial. Tout d’abord pour mettre en avant le principe de l’indépendance de classe et le refus de toute collusion avec les représentants de la bourgeoisie, conditions indispensables à l’émergence d’une politique par et pour les travailleurs. Mais aussi parce que les révolutionnaires sont les seuls à pouvoir proposer aux travailleurs un programme réellement alternatif car en rupture complète avec le capitalisme.

La création d’un parti des travailleurs n’exclurait pas en soi des regroupements, des réunions de différentes organisations et groupes. Mais ce n’est pas ce qui va le fonder principalement. Ce parti doit être de masse et doit s’adresser à l’ensemble des travailleurs à travers des campagnes de masse sur les luttes. Un tel parti construirait ainsi aujourd’hui tout un travail de soutien concret aux luttes contre le chômage les licenciements et la précarité et fournirait également une analyse politique et des perspectives claires sur cette question à l’ensemble des travailleurs. Un tel parti construirait une campagne électorale autour des revendications des luttes et à travers des comités réunissant jeunes, chômeurs et travailleurs.

Alors le but d’une organisation comme la nôtre, avec les forces qu’elle peut avoir ici, est d’aider les jeunes et les travailleurs à construire eux mêmes l’outil de leurs luttes et de les amener à lutter contre le capitalisme en défendant au sein de ce parti large une alternative socialiste. C’est en montrant que le capitalisme n’est pas réformable et en aidant la classe ouvrière à s’organiser elle même que nous pourrons en finir avec le capitalisme.

Par Geneviève, Faustine, Leïla et Alex