Défendons les retraites !

La réforme des retraites voulue par le gouvernement et le MEDEF n’est qu’un nouveau moyen de faire payer la crise aux travailleurs. D’emblée, les partis de l’ex-gauche plurielle et les grandes organisations syndicales se positionnent sur le terrain du gouvernement Raffarin en intégrant les prétextes qu’il invoque pour justifier cette attaque.

Article paru dans l’Egalité n°100

Cette réforme prétendument inéluctable tiendrait aux changements démographiques, le rapport des retraités aux actifs passant de 4 à 7 pour 10 entre 1998 et 2040, selon le rapport Charpin de 1999. Dans le même temps, la masse salariale (pour une population active supposée constante) aurait doublé alors que les charges de retraites tripleraient. Cette augmentation représenterait 6 % du PIB. La CGT estime qu’une bonne  » politique de l’emploi  » réduisant le chômage à 4,5% permettrait d’augmenter le total des cotisations retraites à hauteur de 3 % du PIB. Ce faisant, elle admet plus ou moins implicitement qu’il est inévitable d’augmenter le montant ou la durée des cotisations de chaque salarié. Rappelons quand même que, par rapport à ces quelques pour cent, la capitalisation boursière était en janvier de 892 milliards d’euros, soit plus de 60% du PIB. En plus, selon les prévisions du Commissariat général au plan, le PIB devrait augmenter de plus de 1 400 milliards d’euros d’ici 2040, soit plus de cinq fois l’augmentation du coût des retraites.

Mais toutes ces démonstrations oublient le facteur principal qui explique le manque à gagner pour les cotisations des retraites par répartition : la dévalorisation du travail salarié. Durant les 15 dernières années, la part de la masse salariale a baissé de 7% (Monde Diplômatique de février 2002). Parallèlement les taux de profits ont explosé. Jamais le travail n’a produit autant de richesses. Pendant cette période, les politiques des gouvernements successifs, impulsées par le CNPF puis le MEDEF, ont d’abord fait pression sur les salaires. Tous les prétextes ont été bons : rigueur à cause de la crise, chômage, réduction du temps de travail,  » sauvegarde  » des entreprises. Mais pour le patronat, les cadeaux se sont multipliés : allègement des charges, crédits d’impôts et autres mesures fiscales. Le plus fort, c’est que ceux qui réclament l’augmentation de la durée des cotisations sont les mêmes qui licencient ou mettent en préretraite le maximum de salariés.

Tout ceci montre que l’objectif est encore une fois l’augmentation des profits patronaux, en faisant supporter par les seuls salariés l’augmentation globale du coût des retraites et en limitant le plus possible le montant des pensions versées. Le maintien du principe de la retraite à 60 ans, annoncé par Chirac, laisse entrevoir la méthode choisie par le patronat : OK, vous pouvez partir à 60 ans, mais avec une retraite de misère. Donc soit le salarié part en retraite, avec une pension faible, soit il poursuit son activité ou en reprend une autre, avec toutes les conséquences sur le chômage, la précarité de l’emploi et la pression sur les niveaux de salaires qui s’ensuivent.

Malheureusement, la plate-forme unitaire signée par les différents syndicats ne garantit rien contre ces menaces. Au contraire, elle ne peut qu’aller dans le sens de Fillon qui a déjà annoncé qu’il voulait aligner les annuités du public sur les 40 du privé. Elle aurait pu s’intituler  » 40 pour tous  » alors que la revendication des salariés est et doit rester 37,5 pour tous.

On voit dans quel état d’esprit les directions syndicales abordent ces négociations quand Thibault déclare que la réforme des retraites doit résulter d’un  » pacte social  » entre  » entreprises, syndicats et pouvoirs publics « . Comme si leurs intérêts pouvaient être convergents !
Pourtant, le vote des salariés d’EDF-GDF refusant la réforme de leurs retraites a été un premier avertissement au gouvernement et aux directions syndicales (rappelons que la direction de la CGT appelait à voter oui à cette réforme, malgré l’opposition de nombreux syndicats de base). Dans les manifs, on a vu fleurir les banderoles réclamant 37,5 pour tous, au grand dam des Le Duigou (secrétaire de la CGT) et consorts.

Maintenant, le gouvernement et le MEDEF veulent mettre les bouchées doubles et boucler cette réforme avant l’été, avec la complicité annoncée de la CFDT et sans opposition radicale des autres directions syndicales.
Le maintien des retraites par répartition passe d’abord par une augmentation générale des salaires, et en premier lieu du SMIC, par l’éradication du chômage et donc l’interdiction des licenciements. Bien sûr, le patronat et le gouvernement ne peuvent accepter de telles mesures et seules les luttes des travailleurs pourront permettre de les mettre en place.

Ils doivent refuser tout compromis revenant sur les acquis des retraites pour exiger :
-37,5 annuités pour tous Public-Privé
-Maintien des retraites par répartition – Non aux fonds de pension et autre épargne salariale
-Augmentation générale des salaires avec un relèvement prioritaire du SMIC
-Un emploi pour tous : et une réelle réduction du temps de travail sans perte de salaire, tous ensemble contre les licenciements

Par Pascal Grimbert