Côte d’Ivoire : le piège de l’ivoirité

A un an de la présidentielle, les adversaires politiques sont déjà en campagne et préparent l’échéance alors que le processus de paix reste bloqué.

Article paru dans l’Egalité n°110

On ne finit pas de découvrir les bouleversements des accords d’Accra III signés le 30 juillet dernier et destinés à relancer le processus de paix et à préparer les élections présidentielles et législatives de 2005. Ceux-ci consistent en l’application de Marcoussis dans son intégralité « dans le fond et sur la forme », notamment le vote par l’Assemblée Nationale de l’article 35 de la constitution (relatif aux conditions d’éligibilité). Ce processus est bloqué par le groupe parlementaire FPI Front populaire ivoirien, parti au pouvoir du président Laurent Gbagbo qui exige le désarmement des « Forces nouvelles » (ex-rebellion) avant de procéder au vote au parlement de l’article 35.

Les deux grandes forces d’opposition que sont le RDR (Rassemblement des républicains d’Alassane Ouattara) et le PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire de l’ex-président Konan Bédié) se sont unis et ont formé le G7 qui les associent à l’ex-rébellion et aussi l’UDPCI de feu Robert Gueï, avec pour slogan : Tout sauf Gbagbo !

Derrière chaque parti existe une force à domination ethnique exceptée le PIT (Parti ivoirien des travailleurs) malheureusement associé au groupe parlementaire FPI. Le PIT se présente maintenant comme un parti de « décrispation des crises » au lieu de lutter pour les droits des travailleurs. Faible politiquement, son rapprochement avec Gbagbo, loin de lui apporter plus de moyens d’action, l’a encore plus coupé des travailleurs. Une scission a eu lieu récemment emmenée par un député qui veut directement intégrer le FPI.

Ivoirité : ils y ont tous contribué

Concept créé par Konan Bédié pour empêcher Alassane Ouattara d’être éligible à la présidentielle de 95, finalement tous les hommes politiques, y compris Laurent Gbagbo ont contribué à l’ivoirité. Bédié qui a eu recours à l’article 35, Outtara qui a créé la carte de séjour qui pénalise les travailleurs immigrés et rend plus difficile l’accessibilité à la nationalité ivoirienne pour leurs enfants, Gbagbo qui a créé le Front patriotique avec le PDCI avec le slogan de lutter contre la fraude à l’identité ivoirienne, en réalité cela consistait à empêcher les ressortissants du nord de voter juste avant les élections de 2000.

Jeunes patriotes : une bande armée à la solde de Gbagbo

Il est très difficile de critiquer ouvertement le gouvernement ivoirien aujourd’hui de peur de se faire lyncher. Les Jeunes patriotes de Charles Blé Goudé ne sont que 5 000 mais ils sont entièrement soutenus par le pouvoir, et peuvent agir sans crainte et en toute impunité. Ils ont à leur actifs des dizaines d’assassinats, de pillages, de viols etc.

La jeunesse ivoirienne est révoltée de cette situation, de misère et la terreur, et songe massivement à quitter le pays ne voyant pas d’issue pour l’instant. Ce n’est malheureusement pas ainsi que les choses changeront. La Côte d’Ivoire ne doit pas être laissée aux mains de ces politiciens corrompus ou aux bandes armées comme les Jeunes patriotes

Quelle issue ?

La Côte d’ivoire possède de nombreuses richesses, pillées par des multinationales (la plupart françaises : Bouygues, Bolloré etc.) avec l’aide des politiciens locaux et des institutions internationales. Il faut tourner le dos à tous ces politiciens qui ne visent qu’à s’en mettre plein les poches sur le dos de la population et se servent ensuite du racisme pour masquer leur responsabilité et tenter de diviser la population.

Seule une société socialiste, où les principaux moyens de production et les sources naturelles de richesse seront nationalisées sous le contrôle des travailleurs et non aux mains d’une poignée de corrompus, permettra à la Côte d’Ivoire de se sortir de la misère et du chaos dans laquelle le capitalisme et les politiciens à son service la plonge. Il faut un nouveau parti en Côte d’Ivoire qui organise les jeunes et les travailleurs quelque soit leur origine, leur sexe ou leur culture, pour avancer dans cette perspective : une société socialiste et démocratique.

C’est à ce combat que la Gauche révolutionnaire et le Comité pour une internationale ouvrière participent.

Par Idrissa Soumaré