Cégélec, Référendum loi Aubry : démocratie bafouée

Entreprise après entreprise, la mise en place de l’aménagement – réduction du temps du temps de travail (ARTT) fait des dégâts. La presse se fait notamment l’écho de l’augmentation croissante du nombre de grèves liées aux lois Aubry.

Article paru dans l’Egalité n°86

Ici contre la dégradation des conditions de travail due à l’annualisation et la modulation des horaires, là contre le blocage des salaires issu des accords. Comment comprendre ces grèves alors qu’une grande majorité des référendums montre que le OUI l’emporte souvent massivement !

Reportage à Alstom Entreprise Paris

Contrairement à ce qui peut être cru, le référendum n’a pas pour but de rendre valide un accord d’ARTT. En effet, le code du travail prévoit qu’il suffit de la signature d’une seule organisation syndicale, même ultra minoritaire dans l’entreprise, pour qu’un accord s’impose à tous. Mais si dans ce cas, l’accord est valide, son application n’en est pas moins difficile. Ainsi, à deux reprises, en 1985 et en 1994, des accords nationaux sur la modulation avaient été signés au niveau central sans être appliqué dans les agences, le rapport de force ne le permettant pas.

Légalement, le référendum permet pour l’entreprise, si le OUI l’emporte, d’obtenir les aides de l’Etat lors de l’application d’un accord minoritaire. Pour une entreprise comme Alstom Entreprise Paris comprenant 3 000 salariés, les aides avoisinent les 20 millions de francs soit près d’un quart des bénéfices annuels de l’entreprise. Devant ce pactole, les patrons sont près à tout pour l’emporter. De plus, une victoire du Oui facilite souvent la mise en place, l’accord gagnant en légitimité.

Commencées en février 2000, les négociations avaient mal débuté puisque la direction refusait en préalable de garantir la non-remise en cause des acquis du personnel. De projet en projet, neuf en dix mois, la direction n’a été en mesure que d’obtenir la signature du syndicat maison CGC. Même la CFDT, pourtant favorable à une modulation maîtrisée, n’a pas signé cet accord pourri prévoyant modulation et travail du samedi.

Avec quatre organisations syndicales, CGT, CFTC, CFDT et FO appelant à voter NON, nous aurions pu être confiants sur le résultat du scrutin. C’était sans compter sans la forte mobilisation des cadres de la direction allant de réunion en réunion pour expliquer les bienfaits de l’accord. Mais, devant le scepticisme, il a fallu aller plus loin. Ainsi, la direction a multiplié les courriers au personnel en précisant que si le NON l’emportait, elle appliquerait directement l’accord de branche sans renégocier.

Chantage électoral

Entreprise de travaux électriques, Alstom Entreprise (ex-CEGELEC) dépend de la convention collective des Travaux Publics. Dans cette branche, un accord national a été signé par les syndicats FO et CFTC. Celui-ci prévoit une modulation complète des horaires de 0 à 46 h par semaines, une flexibilité totale en fonction du besoin de main d’œuvre. Si pour certains salariés, les deux accords étaient grosso modo de la même teneur, « la peste ou le choléra » résumera un électeur sur son bulletin de vote, d’autres pensaient quand même que les quelques jours de RTT faisaient de l’accord Alstom, un accord plus favorable.

Pour couronner le tout et assurer sa victoire, la direction a annoncé quelques jours avant le scrutin que si le NON l’emportait, l’augmentation de salaire prévue pour le 01 avril serait annulée. Devant ce nouveau chantage, les salariés ont choisi de voter OUI à 65 % malgré les consignes syndicales. Si un tel score peut refroidir l’ardeur de certains militants qui bataillent depuis de longs mois contre la loi Aubry, les choses sont loin d’être finies. Une bataille a été perdue mais la guerre de classe continue. Ainsi, les salariés risquent de se rendre compte assez rapidement de la vraie nature de l’accord lors de sa mise en place. A Marseille et à Rennes, les salariés qui avaient eux aussi voté OUI majoritairement sont entrés en grève et ont réussi partiellement à faire reculer la direction.

Malheureusement, contre les plans du patronat sponsorisés par le gouvernement Jospin, les batailles locale ne suffisent pas. Les dirigeants syndicaux confédéraux doivent prendre leurs responsabilités pour organiser la convergence des luttes privées – publiques pour en finir avec les lois Aubry.

Par Gérald Le Corre