Vu d’Allemagne : entretien de deux camarades par Solidarität, notre parti-frère outre-Rhin

Après les succès du Rassemblement national (RN) populiste de droite lors des élections européennes en France, c’est la nouvelle alliance de gauche Nouveau Front Populaire, NFP, qui est arrivée en tête lors des élections législatives anticipées. Entretien avec Yohann, membre de la direction de la Gauche révolutionnaire (GR), membre de la commission exécutive France Travail Normandie et Elémiah, aide à domicile et secrétaire de la GR à Rouen. Interview parue le 8 septembre sur le site de nos camarades solidarität.info

Comment expliquez-vous ce revirement en faveur de la gauche ?

Elémiah : La possibilité d’une majorité parlementaire du RN a été perçue par une grande partie de la population comme une menace, comme un danger. Beaucoup ont donc participé, comme nous, à la campagne pour le NFP. Je pense néanmoins que l’alliance entre La France insoumise (LFI, la France Insoumise, le mouvement de Mélenchon) et le Parti socialiste (PS) n’est pas une bonne chose.

Pourquoi ?

Yohann : Le NFP est composé de quatre principaux partis : LFI, le PS, le Parti communiste et les Verts. La politique est définie par des négociations entre les directions des partis. Il n’y a pas de structures locales du NFP.
Le Parti communiste est en déclin en raison de sa politique. Le PS représente une politique bourgeoise et s’oppose à de nombreux points de la LFI. Les Verts tentent de jouer les médiateurs. C’est ainsi que le programme de LFI est édulcoré. Ces derniers temps, LFI ne parle que de la nécessité pour le peuple de s’opposer aux élites. Il n’est plus question de la classe ouvrière.

Quel est le programme du NFP ?

Elémiah : Elle n’a qu’un programme de 100 jours : il s’agit des retraites, de l’augmentation du salaire minimum et du retrait des lois racistes sur les étrangers.

Yohann : Sur le thème de Gaza, LFI s’est imposé. La fin de la guerre et une mission de casques bleus sont exigées. Sur l’Ukraine, le NFP a repris la position du PS et est favorable à la livraison d’armes. Au Parlement, LFI veut voter contre. Cela montre les contradictions de la formation.

La gauche n’a pas de majorité. Que peut-elle faire ?

Elémiah : Elle ne doit pas se coaliser avec le parti de Macron et devrait se mobiliser pour protester, car les attaques contre les conditions de travail et de vie continuent.

Yohann : Macron a promis aux capitalistes français de ne pas faire de réformes sociales. Cela rend un accord avec le NFP quasiment impossible pour lui. Il peut toutefois essayer de former une alliance avec le PS et les Verts.

Elémiah : La masse de la population a voté pour les revendications sociales du NFP. Et veut que la réforme des retraites soit annulée. Il est nécessaire de créer un vrai parti pour défendre les intérêts des travailleurs. Beaucoup de gens veulent discuter, participer, s’organiser. Un tel parti serait un instrument pour cela.

Que font les syndicats ?

Yohann : Les syndicats ne font rien en ce moment. Pour la première fois depuis longtemps, il n’y a pas eu de grèves nationales pendant un an. Maintenant, il est nécessaire d’organiser des grèves pour l’automne. Nous avons besoin d’une stratégie de lutte. Si les revendications ne sont pas satisfaites après une journée de grève, il faut une grève de deux jours, etc. L’un des problèmes est que de nombreuses luttes ont été perdues ces dernières années. Les accords salariaux étaient presque tous inférieurs au taux d’inflation.

Comment la droite peut-elle être battue ?

Elémiah : La classe ouvrière doit devenir plus forte et plus organisée. La droite profite de la détérioration des conditions de vie. Elle en rend l’immigration responsable et détourne ainsi l’attention des vraies causes, qui sont le capitalisme. Nous avons besoin d’une force puissante qui montre clairement qu’une société socialiste est possible.

Yohann : Nous avons besoin d’une grève en septembre pour plus de prestations sociales, de meilleurs salaires et une échelle mobile des salaires qui combat les effets de l’inflation, des prix de l’énergie plus bas ainsi que la nationalisation des groupes énergétiques sous contrôle et gestion démocratiques. Une grève forte montrerait où se situe la droite sur les questions sociales et qu’elle est le véritable ennemi.