La Poste : il est urgent de lutter

Le rythme des attaques augmente à travers tout le secteur postal. Dans le secteur de la distribution le projet  » facteur d’avenir  » commence à faire des ravages. Avec le Contrat de plan 2003-2007, Le but du gouvernement est la libéralisation des services postaux à l’orée 2009 ; projet qui rejoint une directive européenne, signée par Chirac et Jospin, sur la marchandisation de tous les services publics européens. Ces grands projets permettront la mise en concurrence de tous les services publics et à terme aux grands patrons, de s’approprier les plus rentables.

Article paru dans l’Egalité n°123

Le projet « facteur d’avenir » met en place la flexibilité pour les facteurs. Déjà annualisés, leur présence fluctue en fonction du trafic. Au CDIS (Centre de distribution) de Paris VII, les facteurs sont maintenant regroupés en six équipes indépendantes les unes des autres. Chaque facteur travaille 70 heures par quinzaine. Tous sont présents du mercredi au samedi lorsque le trafic est au plus fort et la moitié est en repos, une semaine sur deux, le lundi et mardi quand le trafic est plus faible.

Dit comme ça, rien de très choquant, ni d’illogique. En fait cela signifie que le lundi et le mardi les facteurs qui travaillent se séparent la tournée des facteurs absents. C’est le principe de la marguerite contre lequel les facteurs se battent depuis des années. La marguerite c’est la fin du principe : 1 facteur = 1 tournée. Avec sa disparition c’est la fin de la vente des quartiers : l’attribution à l’ancienneté des quartiers de distribution. C’est aussi la fin des calendriers. Outre la reconnaissance des usagers qui est réconfortante, c’est surtout une entrée d’argent en fin d’année tout à fait appréciable et qui compense un peu le salaire de misère reçu tous les mois.

Les promotions sont loin de compenser les désagréments occasionnés par ces conditions de travail. Surtout, elles seront réservées aux agents les plus serviles, les plus corvéables et qui ne participent pas aux luttes, comme de tradition maintenant dans toute La Poste.

Depuis l’annonce de « Cap Qualité Courrier » en 2004, le grand projet de refonte de tout le réseau courrier de La Poste dans lequel  » facteur d’avenir  » concerne la distribution, les centres de tri, que La Poste avaient rebaptisés Centre de Traitement du Courrier (CTC), sont en passe de devenir des PIC : Plate-forme Industrielle Courrier, ou des PPDC : Plate-forme de Préparation et de Distribution du Courrier, ou sont tout simplement fermés. La Poste souhaite passer de 90 centres de tri, grosso modo un par département, à 45, un pour deux.

Nombreux sont les CTC transformés en PPDC ou en PIC entraînant des centaines de suppressions de postes, et introduit des cadences infernales (passage de 2 nuits de travail sur 7 à 4 sur 7, changement de lieu de travail, changement de positions de travail pour favoriser la polyactivité…) mais aussi des fermetures pures et simples de bureaux de poste.

Dans les Centres Régionaux des Services Financiers (CRSF) la situation est tout aussi dramatique pour le personnel depuis la création par La Poste de sa filiale Banque postale. La Poste souhaite que les CRSF deviennent des sous-traitants aux ordres de la filiale.

Cette dernière doit avoir les même objectifs que n’importe qu’elle banque : rentabilité, profit, sélection de la clientèle, etc. D’ici 2007, La Poste espère supprimer 2800 emplois dans les CRSF et en finir avec le temps où les pauvres pouvaient avoir un compte.

Autre grand chantier de la direction : la réorganisation des bureaux de poste, le Réseau Grand Public. L’expérimentation en Loire atlantique des  »zones de vie » montre la volonté des grands dirigeants à créer des zones de rentabilité. La première conséquence logique étant la création de zones de non droits aux services postaux.

La densité du réseau des bureaux de poste serait fonction des seuils de rentabilité fixés par La Poste elle-même. Ainsi, des bureaux de plein exercice actuellement seraient rattachés à un bureau chef de zone de vie qui gérerait l’ensemble des bureaux, points de contacts ou points poste.

Evidemment, les agents suivraient le mouvement. Ils seraient ballottés d’un bureau à l’autre suivant les ouvertures et leurs horaires seraient également modulés selon les nécessités de service et de rentabilité…

L’expérience de Loire atlantique montre qu’il ne devrait rester que 80 bureaux de plein exercice sur les 200 actuels. Etendu à tout le territoire, près de 6000 bureaux de plein exercice disparaîtraient sur les 11 500 existants.

La situation est grave dans tout le réseau postal et face à cela les luttes se multiplient, mais elles sont isolées : un bureau par-ci, un CTC par là, un CDIS ici ou là. La liste est longue et depuis octobre dans tout le pays ce sont plus de 40 établissements qui ont fait grève avec des taux de participation souvent à plus de 50 %.

A Paris des collectifs de bureaux de poste s’organisent pour résister à ces attaques. Ils sont composés de sections syndicales de SUD, de la CGT et de FO. A Marseille, la CGT-PTT des Bouches-du-Rhône mobilise fortement contre le projet « facteur d’avenir ». Au CTC de Rouen-Madrillet les agents ont mis en place une journée de grève qui se répète tous les samedis.

Il faut que les luttes de toutes ces entités convergent pour avoir du poids et stopper les différents projets de la direction de La Poste et du gouvernement. Au lieu de cela, la CGT, syndicat majoritaire nationalement, a proposé « une action nationale unitaire, de grève et de manifestations, dans la semaine du 13 au 17 novembre ». C’était un peu plus fédérateur mais encore bien insuffisant pour être efficace. Devant la pression de sa base et le développement des luttes, proposition avait été faite pour une journée de grève le 14 novembre à laquelle se sont associés SUD, FO, la CFDT et la CFTC.

Une telle journée aurait dû être une journée de préparation de luttes de plus grande ampleur visant à bloquer l’ensemble des activités postales jusqu’à l’abandon des projets de la direction.

C’est le manque d’un outil politique qui limite actuellement le développement des luttes. Un parti au service des travailleurs pourrait peser dans les syndicats, de la base au sommet, pour organiser la riposte. Il exigerait que les dirigeants syndicaux refusent de négocier sur les bases du contrat de plan et organisent la lutte dès maintenant. C’est dans ce sens que les militants de la Gauche révolutionnaire, postiers ou non, interviennent dans leur syndicats et soutiennent les luttes des travailleurs.

Par Sylvain Bled