Le gouvernement de Prabowo, en place depuis bientôt un an en Indonésie, fait face à des manifestations massives. Initiées par les étudiants en février, les manifestations se sont rapidement élargies, rassemblant des centaines de milliers de personnes dans différentes régions. Il s’agit de la mobilisation populaire la plus importante depuis la chute de Suharto, dictateur militaire renversé en 1998 par le mouvement Reformasi. Les travailleurs et les masses pauvres indonésiennes parviendront-ils à une nouvelle révolution ?

Un pouvoir militaire Au service de l’élite
Prabowo est un commandant de l’armée ayant activement participé à la répression du mouvement Reformasi. Il est impliqué dans l’enlèvement et la torture de militants, dont 13 sont toujours portés disparus à ce jour.
Son arrivée au pouvoir illustre l’échec de la « réforme démocratique » à la chute de Suharto. Un échec lié à l’absence de programme du mouvement de masse pour en finir avec le capitalisme, ayant permis à la bourgeoisie contre-révolutionnaire de reprendre la main.
Prabowo défend ouvertement le développement économique par le biais de la « discipline » militaire. Sous couvert de « modernisation », il réduit les dépenses publiques au profit d’une petite élite.
Les salaires ne suivent pas l’augmentation du coût de la vie et la pauvreté explose. Des coupes frappent l’éducation, entravant l’accès aux études et poussant les enseignants vers la précarité. Les moyens pour la santé publique ont également été réduits jusqu’à 50 %. Les projets d’infrastructures comme les routes et le drainage – vitaux pour la majorité de la population – sont abandonnés, tandis que des milliards sont déversés dans des projets de prestige pour l’élite dirigeante… C’est toute cette politique qui a conduit les Indonésiens à entrer en lutte.
En août, les manifestations ont connu un nouveau souffle à l’annonce de la mise en place d’une allocation logement pour les ministres de 3 000 € par mois, soit 10 fois le salaire minimum !
La violence et la répression au cours de ces manifestations ont fait 20 morts et disparus depuis février. Les manifestants sont qualifiés « d’anarchistes et de terroristes » pour justifier les milliers d’arrestations. Mais la mort d’un livreur de repas tué par un véhicule de police le 29 août a provoqué de nouvelles grandes manifestations et des émeutes.
Doter le mouvement d’un programme socialiste
Le mouvement est encore fragmenté et sporadique, mais la colère est incontestablement dirigée contre l’oppression systémique enracinée dans le capitalisme. Les travailleurs exigent des salaires minimum plus élevés, les jeunes et les étudiants luttent pour l’éducation gratuite, les habitants des quartiers exigent un logement décent…
La tâche est d’unifier ces diverses actions de masse en un seul programme de combat, enraciné dans la lutte des classes. Un programme qui ne vise pas seulement à résister, mais à remplacer le système oligarchique capitaliste par un gouvernement des travailleurs et des pauvres pour établir une démocratie socialiste basée sur la propriété collective des moyens de production dans les principaux secteurs de l’économie, et leur contrôle démocratique par les travailleurs. Ce n’est que par cette transformation que la société pourra être reconstruite pour satisfaire les besoins de chacun et contre la cupidité capitaliste sous toutes ses formes.
Article paru dans l’Égalité n°230